La presse en Tunisie est un secteur économique qui, sous les régimes autoritaires des présidents Habib Bourguiba puis Zine el-Abidine Ben Ali, a connu des périodes de libéralisation puis de difficultés, notamment en raison de la censure. La révolution tunisienne de 2011 constitue un tournant dans ce domaine.
En 2007, le site officiel du gouvernement indique que le pays compte quelque 245 quotidiens et revues, contre 91 en 1987[1]. S'ils sont en grande partie (90 %) détenus par des groupes privés et des indépendants, le discours gouvernemental tend à accaparer l'espace médiatique. Le , le ministère de l'Intérieur annonce l'autorisation donnée à 187 nouveaux journaux et revues de paraître depuis le début de la révolution[2].
Après le , la libéralisation de la presse permet la parution d'un grand nombre de journaux et de revues mais rares sont ceux qui réussissent à percer et à survivre.
Histoire
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Le premier quotidien imprimé en Tunisie voit le jour le sous le nom de Arra'id Attunisi : il s'agit du Journal officiel tunisien fondé par le souverain de l'époque, Sadok Bey[3]. Mais ce sont les attaques anti-arabes du parti colonial et de son chef, Victor de Carnières, qui poussent en 1907 les intellectuels tunisiens à lancer Le Tunisien, premier journal en langue française, pour se faire entendre des autorités du protectorat et de l'opinion publique française.
À partir de cette date, le nombre de titres francophones augmente pour atteindre 41 en 1956, tandis que la presse arabophone (dont en judéo-arabe) compte 288 titres à la même date[4]. Au début de l'année 1991, les quotidiens en français sont au nombre de six, ceux en arabe de neuf ; il existe par ailleurs 140 hebdomadaires — dont 45 en français — et 160 mensuels[5].
Les partis politiques ont le droit de publier leurs propres journaux mais ceux des partis d'opposition ne le font que de façon intermittente[6]. Face à cette situation, le gouvernement octroie en 1991 une subvention de 30 000 dinars à chacun de ces partis ; d'autres aides sont également prévues pour couvrir d'autres frais (papier, timbrage, etc.) mais semblent être accordées sur des critères imprécis[6]. En vertu d'un décret amendant la loi de 1999 relative au financement public des partis politiques, l'État alloue une subvention de 120 000 dinars pour les titres des partis politiques et 30 000 dinars pour les autres périodiques. Ces mécanismes constituent toutefois un outil de pression envers les journaux qui se montreraient un peu trop critique.
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Le Code de la presse de 1975 a été réformé le , le et le .
Il interdit notamment les informations troublant l'ordre public ou « diffamant » les autorités, même par le biais d'allégations avérées ; la saisie du titre relève dès lors du seul ministre de l'Intérieur[7]. Le délit de « diffamation de l'ordre public » a été supprimé, tout comme la formalité administrative du dépôt préalable des organes de presse auprès du ministère de l'Intérieur avant publication, le .
La liberté de la presse est garantie par la Constitution de 1959 même si la quasi-totalité des titres suivent la ligne gouvernementale et rapportent sans approche critique les activités du président de la République, du gouvernement et du parti au pouvoir, en se basant sur les dépêches de l'agence de presse gouvernementale Tunis Afrique Presse ; elle se penche également peu sur les sujets « qui ne sont pas du goût du gouvernement ». Un rapport de la Commission des droits de l'homme des Nations unies indique en 2000 que malgré les 188 titres de la presse tunisienne, celle-ci est marquée par son « uniformité de ton » ; celle-ci a été reconnue par le président Zine el-Abidine Ben Ali et le Premier ministre Hamed Karoui[8] sans que cela n'apporte de changement significatif. Selon Lise Garon, la presse suit « l'impérieux mot d'ordre d'offrir à l'extérieur une image lisse du pays », donnant à voir une forme d'« unanimité intérieure »[9].
Tous les journaux et magazines, y compris les publications de l'opposition, peuvent bénéficier de la publicité, aussi bien des organismes publics que des entreprises privées. La Presse de Tunisie, propriété d'une société publique (Société nouvelle d'impression, de presse et d'édition), détient cependant une position de quasi-monopole, y compris par rapport aux titres de la presse arabophone[10].
La presse tunisienne institutionnelle est parfois accusée de plagier de grands journaux internationaux. Récemment, des cas où des titres de la presse écrite se sont inspirés, pour la réalisation de leurs articles, de blogs et autres portails en ligne, sans demander ni obtenir un accord préalable de l'auteur pour les traduire et les publier, ont été recensés[17],[18],[19].
↑En 1947, la Tunisie française, un quotidien du soir, ayant cessé sa parution, Maurice Bailleul, invité par le commandant Branet (chef du service de l'information) et en plein accord avec le général Charles Mast, crée Tunisie-France. Bailleul, un propriétaire foncier et agricole important, a aussi créé l'hebdomadaire Opinions. Durant la Seconde Guerre mondiale, il est un fervent partisan local des alliés via ses initiatives locales et ses médias. Il s'est présenté à l'assemblée constituante française.
↑Il annonce dans son numéro 32 du 28 juin 2012 qu'il cesse de paraître.
↑Le premier quotidien paru après le 14 janvier 2011 cesse de paraître une première fois au lendemain de l'élection de l'assemblée constituante puis reprend en janvier 2012 avant de disparaître définitivement.
↑Le propriétaire est membre de la direction du Mouvement du peuple mais le journal est indépendant par rapport au parti.
↑Il ne paraît plus depuis janvier 2012 mais aucune information n'est disponible sur sa reprise.
Belkacem Mostefaoui, « Professionnalisation et autonomie des journalistes au Maghreb : éléments de mise en situation des actions et conflits », Réseaux, vol. 10, no 51 « Sociologie des journalistes », , p. 55-66 (lire en ligne).
Christiane Souriau-Hoebrechts (préf. Roger Le Tourneau), La Presse maghrébine : Libye - Tunisie - Maroc - Algérie, Paris, CNRS, coll. « Publications du Centre de recherches et d'études sur les sociétés méditerranéennes », , 369 p. (ISBN2222012015 et 978-2222012016, OCLC715634661).