Phi (esprits animistes)Les phi (thaï :ผี) relèvent des cultes animistes et chtoniens. Dans la culture folklorique et populaire thaïlandaise, ce sont des esprits tourmentés par l'amour, la passion, la colère voire la vengeance. Les phi sont une sorte de démons voyageurs parfois bienveillants, parfois implorant l'aide des vivants et souvent plus ou moins malveillants. Ils sont partout et font partie intégrante de la vie quotidienne et culturelle des thaïlandais. En siamois, on emploie le mot /phĭː/ (ผี /fantôme, esprit) dans de nombreuses expressions : /phĭː sùʔra:/ (« fantôme + boisson alcoolisée ») ou /phĭː pháʔnan/ (« fantôme + jouer à un jeu de hasard ») par exemple, pour désigner des personnes obsédées par l’alcool ou le jeu, comme si elles étaient possédées par un esprit maléfique, un démon de la boisson ou du jeu. Origine de la croyanceLe culte des esprits a traversé l'histoire des peuples indochinois, et garde encore aujourd'hui une notoriété d'importance. Au carrefour de plusieurs cultures, ces croyances se sont développées en Thaïlande au contact de la société khmer hindouiste à partir du XIIe siècle[1] et renvoient à l'opposition entre deux types d'esprits. D'une part, les pra phum (thaï : พระภูมิ ou พระภูมิเจ้าที่, langue formelle) ou chao thi (thaï : เจ้าที่, langue populaire) sont des génies bienveillants pourvus d'un rôle de gardien (champs, maisons, arbres...) : en guise de protection, la plupart des constructions privées ou publiques du pays disposent d'une maison des esprits (San Phra Phum) à laquelle les thaïlandais versent des offrandes dans le but de se prémunir de malheurs. Les phi quant à eux, souvent assimilés à des fantômes, cherchent à répandre désolation et malheurs. Ces esprits malins sont de plusieurs natures, certaines sont traditionnelles, tandis qu'une partie a été adoptée au contact d'autres cultures (laotienne, cambodgienne, malaise). Ce type de croyance s'entremêle avec le bouddhisme theravāda implanté dans la région, qui place les génies bienveillants (« Arak »)[1] au rang intermédiaire entre les hommes et les dieux. DescriptionLes phi sont caractérisés comme des fantômes, des démons, ou des esprits démoniaques, généralement nocturnes. Ils peuvent également se manifester sous la forme d'un esprit d'une personne tourmentée car décédée subitement, de façon inattendue et souvent brutale comme les accidentés de la route, les victimes d'assassinat, les suicidés... Chaque région a développé des variétés importantes de phi, pouvant être catégorisés en fonction de leurs actions, de leur apparence ou de leur environnement[2]. Les plus connus sont les suivants :
ReprésentationBasé sur un principe de tradition orale[3], les phi ont été assez peu représentés dans l'art thaïlandais, à l’exception d'un des plus populaires, Phi Pret (Preta). On peut cependant mentionner Hem Vejakorn, le maître du genre en littérature populaire, qui a écrit et illustré une centaine d'histoires de fantômes basées sur les deux thèmes majeurs de l'Amour avec des nouvelles comme "Souvenir d'amour" (Sanya Rak / สัญญารัก) et "Promesse" (Sanya / สัญญา) et de la Vengeance avec des textes comme "Maître Aroon" (Kru : Arun / ครูอรุณ) et "Transfert de faute" (Mao Thot / เหมาโทษ). Ces histoires de fantômes ont par la suite trouvé un nouveau support par le biais de l'industrie cinématographique[4], qui en adaptera de nombreuses en salle[5][6] : la plus populaire est la fameuse légende de Nang Nak, une histoire d'amour éternel adaptée plus de 25 fois au cinéma, 7 fois à la télévision, une dizaine de fois comme feuilleton à la radio et 5 fois au théâtre, dont une comédie musicale et un opéra de S.P. Somtow, ceci sans compter une version en bandes dessinées et plusieurs dessins animés ; et aussi le dessin animé Les aventures de Sudsakorn (1979) et les films Headless Hero (2002), Shutter (2004), The Unseeable (2006), Le pensionnat (2006), Nymph (2009), The Medium (2021) et bien d'autres... Pratiques associéesLes pratiques associées à ce type de croyance se traduisent de manières diverses et variées en fonction de la zone géographique et du phi concerné. On peut citer pour exemple les femmes enceintes, qui sont généralement perçues comme vulnérables aux Phi (Phi Krasue, Phi Phrai...) qui peuvent faire compliquer la grossesse (pour elle comme pour l'enfant). En conséquence, il est considéré comme sage pour la future mère de faire preuve de vertu. D'une part pour échapper à l'emprise hostile du Phi, mais aussi pour que ces valeurs se transmettent à l'enfant. En Isan par exemple, la croyance veut que le mari prépare des fagots de bois pour alimenter un feu auprès duquel il est prescrit à la femme de rester allongée entre 15 jours et un mois (après le 8e mois de grossesse). Cela dans le but de chasser les Phi, craints puisque connus pour se nourrir des femmes en fin de grossesse[7]. Galerie
Bibliographie
Notes et références
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