Petite-Pologne (quartier parisien)
La Petite-Pologne ou la Pologne était un quartier de Paris, un de ces « noms du vieux Paris »[1], faubourg populaire situé dans l’actuel 8e arrondissement, avant la construction de la gare Saint-Lazare, dite alors de l’Ouest, en lieu et place des jardins de Tivoli, dans les années 1830, et le réaménagement du quartier autour de la place de l’Europe qui fut complété à la fin du Second Empire, dont le couronnement fut la construction par Baltard de l’église Saint-Augustin (1860-1871). SituationLa Petite-Pologne était située au nord du grand égout (approximativement à l'emplacement de la rue des Mathurins) couvert à partir de 1760 jusqu'aux environs des actuels boulevards de Courcelles et des Batignolles, entre le quartier des Porcherons à l'est qui s'était développé à partir du château du Coq, soit l'espace actuel autour de l'église de la Trinité et aux alentours de la partie nord de la rue de la Chaussée d'Antin et la Pépinière royale du Roule à l'ouest qui s'étendait au nord de l'actuelle rue La Boétie. Le hameau de la Petite-Pologne était construit le long d'un chemin qui prit le nom de rue des Grésillons qui conduisait à son extrémité occidentale à un carrefour formé par les rues Saint-Lazare, de la Pépinière, de l'Arcade, du Rocher et un chemin disparu en direction de l'actuelle place de Clichy. Ce carrefour était bordé par une voirie, c'est-à-dire un dépôt d'ordures, approximativement à l'emplacement de l'actuelle place Gabriel-Péri (ou cour de Rome de la gare Saint-Lazare). Cet ancien chemin est l'actuelle rue de Laborde. HistoriqueÀ l’époque de Louis XV, le quartier était encore de friche, aux confins de Paris, la rue du Rocher n’étant qu’un simple chemin de poussière. Une barrière d’octroi y était située, qui prit le surnom d’un cabaret installé dans les environs, la Petite-Pologne[2]. Cette enseigne était une référence au hameau voisin, dit de la Pologne, qui s'était développé à l'entrée nord du domaine du château du Coq, c'est-à-dire le long de l'actuelle rue de Clichy, au nord de l'actuel square de la Trinité[3]. Jacques Hillairet, dans son Dictionnaire historique des rues de Paris, parle comme source possible d'une autre enseigne : Au Roi de Pologne, une allusion au duc d'Anjou, le futur Henri III[4]. La fin du XVIIIe siècle vit un premier mouvement de constructions immobilières aux abords de cet espace, quartier de guinguettes, notamment du fait de princes comme Philippe-Égalité, qui y possédait une folie, la Folie de Chartres, réalisée en 1778, dont le parc fut plus tard transformé sous Napoléon III pour devenir le parc Monceau. En 1798, Joseph Bonaparte s’installe à son tour dans un hôtel, rue des Errancis.
En 1770, le gouvernement avait établi à la Petite-Pologne l’une des quatre Maisons de Santé, établissement d’un nouveau genre où l’on soignait gracieusement les maladies vénériennes[5]. Celle-ci était destinée aux femmes et dirigée par un ancien chirurgien-major, le Dr Roger, mais elle ferma vers 1780, comme les autres maisons de Santé, faute de financements. Sous la Seconde Restauration et la Monarchie de Juillet, la Petite-Pologne — à peu près située dans le triangle formé actuellement par les rues du Rocher, de la Pépinière et de Miromesnil et bordé au nord par le boulevard Monceau et le cimetière des Errancis (aujourd’hui disparu[6]) — est un quartier au bâti intermittent, miséreux, turpide et crasseux, peuplé d’indigents et d’insolvables, de chiffonniers[7], de « ferrailleurs » (Balzac), un « repaire pour la pègre » (Eugène Sue, dans Les Mystères de Paris). Les travaux de construction de la gare Saint-Lazare et les projets d’aménagement du 32e quartier de Paris, mis en chantier dès la fin des années 1820, laissent cet îlot, ainsi que le nomme Balzac, dans un état de stagnation poussée, alors même qu’il est aux portes des beaux quartiers[8], comme l’élégante plaine Monceau, et des quartiers fashionables que sont les Grands Boulevards à l’époque.
Lors de la Révolution de 1848, la Petite-Pologne fut considérée par les autorités comme un quartier difficile à l’instar d’autres quartiers populaires et les mesures de désarmement des habitants y furent plus minutieuses qu’ailleurs :
Les grands travaux haussmaniens ont progressivement fait disparaître ce faubourg et son nom est graduellement tombé dans l’oubli. LittératureLe pittoresque farouche de la Petite-Pologne a servi de décor à plusieurs romanciers du XIXe siècle. Giacomo Casanova s’y installe dans une maison de campagne entre 1758 et 1759. Honoré de Balzac s’est servi de ce quartier comme décor dans La Cousine Bette : l’emménagement de Hulot symbolise de son déclassement. Maxime Du Camp évoque dans ses Souvenirs de l’année 1848 la Petite-Pologne lors de l’insurrection au travers du récit d’une patrouille effectuée rue du Rocher. Eugène Sue fait également de nombreuses références à la Petite-Pologne dans ses œuvres, la qualifiant d’« espèce de cour des Miracle située, en ce temps-là, non loin du palais de l’Élysée-Bourbon » ou « entourée de maisons sombres et délabrées », « lieux sinistres » abritant des « cabarets souterrains » (dans La Famille Jouffroy). Dans Les Mystères de Paris, il en fait la description suivante :
Ernest Daudet parle dans la scène d’exposition des Aventures de trois jeunes Parisiennes (1880) de « terrains vagues, déserts, accidentés, de mauvaise mine, qui étaient une injure à la civilisation. » Il parle d’« un cloaque », d’une « plaie infecte, qui était une honte pour la première capitale du monde. » Mais à l’époque où il écrit, il note que déjà « la Petite-Pologne n’est plus qu’à l’état de souvenir dans la mémoire des Parisiens. » Notes et références
Sources
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