Après la fin de la Première Guerre mondiale, de novembre 1919 à mai 1920, à la suite d'une décision prise par le gouvernement belge à la fin de 1919, une entreprise spécialisée a déversé sur ce banc environ 35 000 tonnes de munitions non-explosées. On a pensé dans un premier temps que parmi ces munitions 12 000 tonnes environ étaient principalement des munitions chimiques allemandes (centaines de milliers de grenades chargées de gaz moutarde et de chloropicrine ou d'autres poisons...)[1].
Cette décision pourrait avoir été inspirée par une opération faite peu avant lors de laquelle un stock d’obus non-chimiques de l’armée belge (stockées dans le dépôt central dit « Grand Parc de Campagne ») avait été déversé de la même manière sur des bancs de sable devant la côte de Gravelines en comptant sur le poids des munitions et le courant pour qu'elles s'y enfoncent en profondeur. Sur la base des avis alors disponibles, Urbain, chef du service Hydrographie de la Marine a proposé le banc du Paardenmarkt comme le lieu idéal d'immersion[1].
Histoire
Ce déversement a été effectué à la demande des habitants et élus locaux qui craignaient que des milliers d’obus stockés dans les creux de dunes proches de la ville n’explosent.
L'existence de cette décharge sous-marine d'environ 3 km2[1](recouverte par un sédiment fin à la suite de la prolongation des digues du port) a été ensuite oubliée jusqu'à ce qu'elle ait été redécouverte en 1971 presque par hasard[1] et que des études notamment basées sur des matériels nouveaux d'exploration sismiques et/ou magnétiques également utilisés en mer Baltique[2] permettent d'évaluer la quantité de munitions présente en profondeur sous le sédiment.
La décharge est actuellement couverte par environ deux à quatre mètres de sable et sédiments mais reste proche de la surface de l'eau[3],[4].
En 2013, après des recherches faites par des scientifiques dans les archives gouvernementales belges, il est apparu que ces munitions n'ont probablement jamais été tirées (elles sont souvent encore dans leurs caisses de bois). Il apparait aussi que le nombre de munitions (obus, grenades...) a été jusqu'alors sous-estimé et qu'une grande partie du stock, voire la totalité (les 35 000 tonnes environ), pourrait être constituée de munitions chimiques[1] ; 1/3 de ces munitions seraient chargées en gaz moutarde, le reste pouvant contenir des arsines et d'autres composés toxiques[1].
Après l'armistice en 1918 de vastes opérations de désobusage et de récupération de dépôts de munition ont permis de collecter des millions de munitions non-explosées. Elles se sont ajoutées aux dépôts de munitions qui n'avaient pas eu l'occasion d'être tirées.
Les munitions classiques étaient souvent détruites par pétardage dans des fosses sécurisées, mais cela n’était pas possible pour les obus chimiques stockés près de zones habitées (en raison de leur grande dangerosité)[1].
Pour des raisons de sécurité et en raison du coût financier élevé de transport et stockage d’armes chimiques, le gouvernement belge, en accord avec les forces alliés a décidé de jeter ces munitions en mer via une péniche à fond ouvrant qui a effectué de nombreux voyages entre la côte et le banc.
Quand le dépôt a été retrouvé après qu'une drague ait "touché" des objets durs sur le fond[5], et après plusieurs études d’état des lieux faites avec l'Université de Gand sous l'égide de l'OSTC (Federal Office for Scientific, Technical and Cultural Affairs), le gouvernement a estimé que la solution la moins couteuse et la plus sûre serait de ne rien toucher.
Le site est néanmoins marqué par des bouées et constamment surveillé ; il est naturellement interdit aux activités de pêche et à l'ancrage[6],[7] mais les petits voiliers de l'école de voile peuvent encore y circuler[5].
Prospective
Une modélisation de la dispersion de l'ypérite et d’agents chimiques arsénicaux (composés des obus dits Clark I et Clark II) dans les sédiments a été faite et discutée.
La modélisation a généré des données simplifiées de concentration pour des échelles temporelles et géographiques en cas de fuite d'une munition modélisée.
Selon ce modèle, tant que le banc reste en place et que les obus sont enfouis dans le sédiment marins (relativement anoxique en sub-surface dans cette zone) une fuite d'ypérite (dans le sédiment) ne produira des effets toxiques directs qu'à quelques centimètres de l’enveloppe de la munition. Par contre en utilisant une munition avec un contenu estimé de 44 g d'arsenic des simulations pour des obus chargés au CLARK I et II, donne une estimation de sous-produits arséniés plus préoccupante (volume théorique concerné serait une sphère de sédiment d'un rayon de 0,5 m 10 ans après le début de la fuite, et trois fois plus (en volume) après 100 ans.
Le risque de tsunami et tremblement de terre est faible mais non nul. Une certaine bioturbation semble possible et le risque d’un échouage accidentel de grand navire sur le banc est plus élevé.
Des études cherchent à améliorer le protocole de surveillance de ce type de site [8], et l’évaluation du risque écotoxique[9] et à retrouver leur histoire dans les archives[10]
↑Missiaen T & Feller P (2008). Very high resolution seismic and magnetic investigations of a chemical munition dumpsite in the Baltic Sea. J. Applied Geophysics, 65, 142-154.
↑Corsi, Ilaria et al. 2012(), Studies on Environmental Effects of Underwater Chemical Munitions in the Southern Adriatic Sea (Mediterranean Sea) ; Volume 46, Number 3, May/June 2012, p. 10-20(11) |Marine Technology Society Journal -résumé
↑ Carton, Geoffrey et al. (), Historic Disposal of Munitions in U.S. and European Coastal Waters, How Historic Information Can be Used in Characterizing and Managing Risk | Marine Technology Society Journal, 2009
De Batist M, Missiaen T, Vanninen P, Soderstrom M et al. (2013). Aanbevelingen betreffende chemische monitoring. Studieopdracht DG5/INSPA/RMa/23.160, 88 pp.
De Vos L, Mathys P & De Rouck J (2009). Studie “Haalbaarheid kapping” ter hoogte van de Paardenmarkt, een munitiestortplaats uit W.O-I. Studieopdracht DG5/INSPA/RMa/23.123, 49pp.
Francken F & Ruddick K (2003). Ontwikkeling van een dispersiemodel voor de evaluatie van de impact op het leefmilieu van toxische producten afkomstig van chemische wapens die zich bevinden op de bodem van de zee (Paardenmarkt site). Studieopdracht DG5/ INSPA/RMa/22.472, 44 pp.
Francken F & al.(2009) A Case Study in Modeling Dispersion of Yperite and CLARK I and II from Munitions at Paardenmarkt, Belgium | Marine Technology Society Journal, Volume 43, Number 4, Automne 2009, pp. 52-61(10) | DOI: https://doi.org/10.4031/MTSJ.43.4.3 |résumé
Francken F, Ruddick K & Roose P (2006). Studie naar de dispersie van CLARK I & II, afkomstig van chemische wapens die zich bevinden op de bodem van de zee. Studieopdracht DG5/INSPA/RMa/23.059, 27 pp.
Missiaen T & Henriet J-P. et l'équipe d'évaluation du Paardenmarkt Project Team (2001), Evaluatie van de Paardenmarkt Site. DWTC Final Report, Project MN/02/88, 185 pp.
Missiaen T (2010). Synthese van het wetenschappelijk onderzoek dat werd uitgevoerd op de Paardenmarktsite en formuleren van aanbevelingen m.b.t. de verdere aanpak. Studieopdracht DG5/INSPA/RMa/23.132, 112 pp.