L'ordre de préséance en France est une hiérarchie symbolique définissant l'ordre des personnalités officielles lors des cérémonies publiques en France. Cet ordre diffère selon que les cérémonies publiques se tiennent à Paris ou dans d'autres territoires.
Historique
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Mise en place progressive sous l'Ancien Régime
Le cérémonial se développe sous l'Ancien Régime, selon Ralph Giesey[1], au même rythme que les trois genres que sont le « spectacle », c'est-à-dire les réjouissances organisées pour divertir le roi, les « cérémonials d'État », tels que le sacre, les entrées urbaines(en), les funérailles, et la « société de cour », gouvernée par l'étiquette.
Au XVe siècle, les préséances et les places, à la cour de France comme de Bourgogne, dépendent du degré de parenté avec le souverain[2]. À partir du milieu du XVIe siècle, apparaît une volonté de formaliser les rangs et préséances. En 1547, Henri II confie à Jean du Tillet la charge de rechercher dans les archives tout ce qui peut aider à déterminer l'ordre que devront suivre les pairs de France lors de son sacre prévu trois semaines plus tard[3]. Un édit du roi accorde alors la préséance aux princes du sang sur les autres princes et pairs[4].
Sous l'influence de Catherine de Médicis qui cherche à affermir le pouvoir de ses fils rois ébranlé par les guerres de religion, Charles IX, puis Henri III prennent des règlements, notamment celui du [5], qui contribuent à définir un véritable ordonnancement de la cour. En particulier, contrairement à ce qui prévalait dans l'ancien ordre féodal, les princes du sang prennent définitivement le pas sur les autres grands du royaume. La place attribuée à chacun est un signe de faveur et permet au roi de récompenser ses fidèles et ses favoris, tels le duc de Joyeuse et le duc d'Épernon[6].
L'expression « en rang d'oignons », selon une tradition douteuse mais significative de l'importance prise alors par ces questions, viendrait ainsi du nom du baron d'Ognon, maître de cérémonie aux états généraux de Blois en 1576[7].
Si Henri IV est moins attentif aux questions de préséance que les derniers Valois, il prescrit avec soin l'ordre à suivre pour le sacre de la reine en 1610. Il en sera de même au sacre de Louis XIII. Enfin Louis XIV utilise les rangs pour conforter la place de ses fils adultérins, allant jusqu'à les inclure dans l'ordre de succession juste après les princes légitimes. Sa volonté de réglementer l'étiquette dans ses moindres détails l'amène toutefois, selon Fanny Cosandey, à se contraindre lui-même et à perdre la marge de manœuvre dont disposaient ses prédécesseurs dans la distribution de ces faveurs[8].
Les principes généraux de l'ordre de préséance sous l'Ancien Régime
L'attribution des rangs est un moyen de contrôle du roi sur les grands du royaume, qu'il peut ainsi favoriser ou, au contraire, mettre à l'écart, en particulier lorsqu'il joue le rôle d'arbitre dans un conflit de préséance entre deux dignitaires. Le roi est tout de même soumis à certaines règles générales[9] :
un titre plus ancien a préséance sur un titre plus récent ;
les titres s'ordonnent selon une hiérarchie : ducs, marquis, comtes, barons ;
les femmes partagent le rang de leur mari vis-à-vis des autres participants, mais se tiennent à gauche de lui.
L'ordre de préséances se traduit par la position spatiale respective des dignitaires. Le plus digne est placé plus en hauteur. À hauteur égale, l'avant prime sur l'arrière ; sur une rangée, la droite est plus honorable que la gauche. Cet ordre demande des adaptations dans certaines circonstances : dans un banquet, ou dans une procession où le roi est placé au milieu, c'est la proximité par rapport à celui-ci qui compte plus que la position en avant[10].
Définition par décret depuis le XIXe siècle
L'ordre est institué par Napoléon Ier par le décret impérial du 24 messidor an XII (), qui définit l'ordre dans lequel les dignitaires doivent assister aux cérémonies publiques. Il précise que ces personnes marchent par rangs de trois personnes, de sorte que, sur chaque rang, la personne marchant au milieu a le rang le plus élevé et celle qui marche sur la gauche le rang le moins élevé[11].
En 1984, le préfet Jacques Gandouin est chargé par le président de la République de refondre le protocole de 1907, qui est remplacé par le décret du [14],[15]. Ce décret est toujours en vigueur en 2023.
L'ordre de préséance aujourd'hui
L'ordre de préséance est régi par le décret du [14].
À l'intérieur d'un grade, le plus ancien passe avant ses pairs ou, à égalité d'ancienneté, le plus âgé[4].
Règles générales
L'article 13 du décret du dispose que « les rangs et préséances ne se délèguent pas », c'est-à-dire que la personne qui représente une autorité dans une cérémonie publique se place à son rang propre et non au rang de cette autorité, sauf si elle représente le président de la République[16].
L'autorité la plus élevée se place au centre ; les autres autorités se placent à sa droite puis à sa gauche, du centre vers l'extérieur, dans l'ordre décroissant des préséances[17]. L'autorité qui occupe le premier rang arrive la dernière et se retire la première[18].
Ordre de préséance à Paris
À Paris, lorsque les membres des corps et les autorités assistent aux cérémonies publiques, ils y prennent rang dans l'ordre de préséance suivant[19] :
les hauts-commissaires, commissaires généraux, commissaires, délégués généraux, délégués, secrétaires généraux, directeurs de cabinet, le directeur général de la gendarmerie nationale, les directeurs généraux et directeurs d'administration centrale dans l'ordre de préséance des ministères déterminé par l'ordre protocolaire du Gouvernement et, au sein de chaque ministère, dans l'ordre de préséance déterminé par leur fonction ou leur grade ;
le préfet, secrétaire général de la préfecture de la région d'Île-de-France, le préfet, directeur du cabinet du préfet de police, le préfet, secrétaire général de la préfecture de Paris, le préfet, secrétaire général de l'administration de la police, le préfet, secrétaire général de la zone de défense ;
le chef du contrôle général des armées, les généraux de division ayant rang et appellation de généraux d'armée, les vice-amiraux ayant rang et appellation d'amiraux, les généraux de division aérienne ayant rang et appellation de généraux d'armée aérienne, les généraux de division ayant rang et appellation de généraux de corps d'armée, les vice-amiraux ayant rang et appellation de vice-amiraux d'escadre, les généraux de division aérienne ayant rang et appellation de généraux de corps aérien ;
le directeur général des services administratifs de la région d'Île-de-France ;
les présidents et secrétaires perpétuels des académies créés ou reconnus par une loi ou un décret ;
le président du Conseil économique, social et environnemental de la région d'Île-de-France ;
les chefs des services déconcentrés de l'État dans la région d'Île-de-France et dans le département de Paris dans l'ordre de préséance attribué au département ministériel dont ils relèvent et les directeurs généraux et directeurs de la préfecture de région, de la préfecture de Paris et de la préfecture de police ;
Dans les autres départements ainsi que dans les collectivités territoriales de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte[21], l'ordre de préséance ne comprend que des personnalités liées à la collectivité locale. C'est ainsi le préfet ou le représentant de l’État dans le département ou la collectivité qui est au premier rang, précédant les députés et les sénateurs[22].
L'ordre de préséance est le suivant :
Le préfet, représentant de l'État dans le département ou la collectivité ;
Le maire de la commune dans laquelle se déroule la cérémonie ;
Le général commandant la région terre, l'amiral commandant la région maritime, le général commandant la région aérienne, le général commandant la région de gendarmerie ;
Le président de la cour administrative d'appel, le premier président de la cour d'appel et le procureur général près cette cour ou, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, le président du tribunal supérieur d'appel et le procureur de la République près ce tribunal ;
L'amiral commandant l'arrondissement maritime, le général commandant la région de gendarmerie ; dans les départements et les collectivités territoriales d'outre-mer, l'autorité militaire exerçant le commandement supérieur des forces armées ;
Les dignitaires de la Légion d'honneur, les Compagnons de la Libération, les dignitaires de l'ordre national du Mérite et le délégué national de l'Ordre de la Libération ;
Le président du Conseil économique, social et environnemental de la région, ou, dans les départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse (1), le président du conseil économique, social et culturel de Corse, les membres du conseil exécutif de Corse ; dans les départements d'outre-mer, le président du conseil de la culture, de l'éducation et de l'environnement ;
Le président du tribunal administratif, le président du tribunal judiciaire et le procureur de la République près ce tribunal ou, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, le président du tribunal de première instance et le procureur de la République près ce tribunal, le président de la chambre régionale des comptes ;
Les membres du conseil régional ou, dans les départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse (1), les membres de l'assemblée de Corse ;
Les membres du conseil départemental ;
Les membres du Conseil économique, social et environnemental ;
Le préfet adjoint pour la sécurité, le préfet délégué pour la sécurité et la défense ;
Le sous-préfet dans son arrondissement, le secrétaire général de la préfecture et, le cas échéant, le secrétaire général pour les affaires régionales et le secrétaire général pour l'administration de la police, le directeur du cabinet du préfet du département ;
Les officiers généraux exerçant un commandement ;
Les chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans la région et dans le département, dans l'ordre de préséance attribué aux départements ministériels dont ils relèvent, le délégué militaire départemental, le commandant de groupement de gendarmerie départementale ;
Les présidents des universités, les directeurs des grandes écoles nationales ayant leur siège dans le département, les directeurs des grands établissements de recherche ayant leur siège dans le département ;
Le directeur général des services de la région, ou, dans les départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse, le directeur général des services de la collectivité territoriale de Corse (1) ;
Le directeur général des services du département ;
Les conseillers municipaux de la commune dans laquelle se déroule la cérémonie ;
Le secrétaire général de la commune dans laquelle se déroule la cérémonie ;
Le président de la chambre régionale de commerce et d'industrie, le président de la chambre régionale d'agriculture, le président de la chambre ou de la conférence régionale de métiers, le président de la chambre départementale de commerce et d'industrie, le président de la chambre départementale d'agriculture, le président de la chambre départementale de métiers ;
Le bâtonnier de l'ordre des avocats, les présidents des conseils régionaux et départementaux des ordres professionnels ;
Le secrétaire de mairie.
Contestation de l'ordre de préséance
Dès sa publication, le décret du a été contesté devant le Conseil d'État au motif qu'il méconnaîtrait le principe constitutionnel de l'indépendance de l'autorité judiciaire, ainsi que le principe de supériorité hiérarchique ou protocolaire des fonctions représentatives sur les autorités désignées par le pouvoir exécutif. Le Conseil d'État a rejeté ces recours le [23].
↑Alexis Garrel, Recueil des dispositions relatives aux honneurs et préséances militaires qui ont modifié le décret impérial du 24 messidor an 12, sur les cérémonies publiques, préséances, honneurs civils et militaires, Paris, Librairie militaire de J. Dumaine, , 2e éd., 162 p. (BNF30483435, lire en ligne).
↑Xavier Mauduit, Le Ministère du faste : La Maison de l'empereur Napoléon III, Paris, Fayard, coll. « Lieux et expressions du pouvoir », , 443 p. (ISBN978-2-213-70153-0).