Avec Cheri Samba, Chéri Chérin et d'autres peintres de l'école de Kinshasa comme Cheik Ledy, Tshibumba Kanda et Sim Simaro, il est l'un des meilleurs chroniqueurs de la vie congolaise contemporaine. Autodidacte souvent considéré comme un peintre naïf, lui-même se définit comme « peintre-journaliste » ou même « grand maître de la peinture populaire », selon une inscription écrite sur un mur, quand il n'était encore qu'un artiste de la rue[1].
Biographie
Il arrive à Kinshasa vers l'âge de dix ans. Dépourvu de moyens d'existence, il se voit réduit au vagabondage. Le suicide le tente[2]. Et c'est pour survivre qu'il commence à peindre sur des cartons, après avoir croisé les peintures naïves des nombreux artistes qui exposent dans les rues de Kinshasa. Mobutu remarque en 1965 un tableau le représentant lui-même en général saluant la foule et offre au jeune Moké une bourse qui lui permet de continuer à peindre[2]. En 1973, Haffner, l'animateur du Centre culturel français devient son mécène. Sa participation au Festival de Berlin Horizonte 79, les expositions au Centre culturel français et au Goethe-Institut de Kinshasa commencent à établir sa réputation artistique. Depuis les années 1990 et plus encore après sa mort, ses œuvres sont représentées dans la plupart des grandes expositions consacrées à l'art contemporain africain.
Sa peinture
Comme beaucoup de peintres africains contemporains, il utilise de la peinture industrielle par goût des couleurs vives et brillantes. Dans ses scènes de rue (scènes de marché, bistrots, fêtes, danses, manifestations publiques et officielles, défilés militaires), il privilégie les vues panoramiques où de nombreux personnages joufflus et hauts en couleur évoluent joyeusement. Dans ses portraits, les personnages se découpent le plus souvent sur un fond bleu uni. À l'instar d'autres peintres de l'école de Kinshasa, un de ses thèmes préférés est celui de Mami Wata, la sirène de la mythologie populaire africaine[3]. Pour Moké, elle représente la femme libérée, parfois même la prostituée dominatrice[4]. Il aime la représenter dans toutes sortes d'attitudes et, à travers elle, élargit son œuvre aux dimensions de l'imaginaire et du phantasme. Ainsi, à propos d'un tableau intitulé Moké n'a pas d'argent (1991), Joëlle Busca commente : « Les corps des femmes se dressent, flottant, entre frayeur et extase, dans une immatérialité bleue alors que le peintre chaussé de mâchoires animales et masqué de blanc maîtrise un volant sans voiture. Il y a un effet de surgissement, une distorsion du réel, une assurance plastique, une inventivité qui le tirent au-delà de la communauté des peintres chroniqueurs et font de lui un peintre à part entière, malgré l'aspect convenu de nombre de ses toiles et une production surabondante de qualité très inégale »[5].
Expositions principales
2019 - "Congo Paintings", Musée des Arts d'Afrique et d'Asie de Vichy, France.
2018 - "Congo Paintings, une autre vision du monde", Musée Africain de Namur, Belgique.
2016 - " Songeries et réjouissances ", Collection Philippe Pellering & Boris Vanhoutte, Musée Africain de Namur, Musée du Masque de Binche, Belgique.
1997 - "Ecole de Kinshasa", Galerie Peter Herrmann, Stuttgart, Allemagne
1996 - Bomoi Mobimba Toute la vie, 7 artistes zaïrois, Collection Lucien Bilinelli, Centre d'art contemporain, Palais des Beaux-Arts de Charleroi, Belgique.
1995-1996 - An Inside Story : African Art of our Time Beyong Art, Setagaya Art Museum, Tokyo; The Tokushima Modern Art Museum; Himeji City Museum of Art; Koriyama City Museum of Art; Marugame Inokuma-Genichiro Museum of Contemporary Art; The Museum of fine Art, Gifu, Japon.
1993-1994 - Skizzen eines Projektes, Afrika Im Ludwig Forum für Internationale Kunst, Ludwig, Allemagne.
1991-1992 - Africa Hoy/Africa Now, Centro Atlantico de Arte Moderno, Las Palmas de Gran Canaria; Cultural Center and Contemporary Art, Mexico City; Groningen Museum, Groningen, Hollande.
1991 - Ny Afrikansk Billedkunst Rundetarn, Copenhague, Danemark.
1985 - Peintre Populaires du Zaire; L'art vivant d'Afrique Centrale, Université de Montréal, Marius-Barbeau Museum, Gallery Trompe-l'œil, Media Center, Québec.
1979 - Moderne Kunst aus Afrika, Festival de Berlin Horizante'79, Stautliche Kunsthalle Berlin, Allemagne.
1978 - Art Partout, Académie des beaux-arts, CIAF, Kinshasa, RDC.
1969 - Première Foire internationale de Kinshasa, RDC.
1968 - Exposition artistique et artisanale de Kinshasa, Ministère de la Culture et du Tourisme, Parc de la Révolution, Kinshasa, RDC.
Bibliographie
Moke, Chéri Samba : peinture populaire congolaise, Volume 21 des Cahiers de l'ADEIAO, Éditeur ADEIAO ; Centre d'Études Africaines (EHESS-CNRS) ; Maison des Sciences de l'Homme, 2004, (ISBN2906267228)
(es)Pintura popular congolesa: Moke i Chéri Samba, collection Antonio Lanzas au Museu de Prehistòria i de les Cultures de València, du 26 de juin au , Éditeur Diputació de València, Àrea de Cultura, 2001, (ISBN8477952914)
Notes et références
↑Les arts du Congo: d'hier à nos jours, p. 72, de Roger-Pierre Turine, Éditeur La Renaissance du Livre, 2007, (ISBN2874158119)
↑Pour une étude approfondie du sujet, voir Mami Wata la sirène et les peintres populaires de Kinshasa, de Lucie Touya, Éditions L'Harmattan, 2003, (ISBN2747544729)
↑Femmes médiatrices et ambivalentes, Mythes et imaginaires, de Anna Caiozzo et Nathalie Ernoult, Éditeur Armand Colin, 2012, (ISBN220028165X).
↑Perspectives sur l'art africain contemporain, p. 65, de Joëlle Busca, Éditions L'Harmattan, 2001, (ISBN2296426174)