Est-ce le premier évènement mondial digne de ce nom ? Qu'est-ce qu'un événement majeur[2] ? L'événement est pour Derrida ce qui ne se laisse pas anticiper.
Qu'est-ce que la perversion auto-immune ? Si la violence coïncide, pour Lévinas, avec la nécessité pour Autrui de se montrer dans le Même et pour le Même (la racine ultime de la violence étant le temps) Derrida élabore une notion d'historicité qui échappe à la forme temporelle du présent et à toute détermination archéo-téléologique de l'histoire, auto-affective, synthèse passive du temps, fuyant irréversiblement le présent et la re-présentation opposée au « vieillissement »[3].
Peut-on parler de terreur hors du cadre étatique ? Existe-il un concept de la paix[4] ? Habermas présente une trilogie : l'action violente et aveugle des kamikazes palestiniens, la guérilla paramilitaire et le terrorisme mondial, provoquant une surréaction. Derrida s'interroge sur l'imprévisible, la datation, la répétition du , son processus d'auto-immunité, de suicide (dont Lévinas qualifie l'essence d'éternelle imminence) ou d'autodestruction de ses propres protections : la guerre froide, la guerre au terrorisme telle une guerre contre soi. Michel Wieviorka dans son ouvrage sur la violence invente de nouveaux concepts de rapport du sujet au sens dans la violence, par exemple en créant les concepts d' hypersujet ou de sujet flottant[5].
En , le site Nonfiction puis Slate, à la suite de Derrida, utilisent le concept d’Ereignis de Martin Heidegger, l'évènement dont l’impression qu’il fait au public provient de la réaction auto-immune d’une société, « suicide spontané du mécanisme de défense […] censé protéger un organisme des agressions extérieures »[7].
En , Les Inrockuptibles font un parallèle entre les attentats du 13 novembre 2015 en France et le livre pour qui « la techno-science brouille la distinction entre guerre et terrorisme, qui change le rapport entre terreur et territoire. Le terrorisme n'a aucune géographie »[8].
En , dans Les Échos, Roger-Pol Droit critique la cécité des philosophes : « le devait être nécessairement considéré comme une énigme, qu’« on ne sait pas, on ne pense pas, on ne comprend pas, on ne veut pas comprendre ce qui s’est passé à ce moment-là », ne parler ni d’acte de guerre, ni de haine de l’Occident, ni de volonté de détruire les libertés fondamentales, en s’attardant sur la notion d’Ereignis, « événement », ou « avenance ». Jean Baudrillard, attribue aux rêves suicidaires de l’Occident l’effondrement des tours et la fascination des images des attentats., mettant en lumière « l'esprit du terrorisme » et préparant ainsi les théories du complot consécutives »[9].
Pour Le Temps, la pensée d'Habermas et Derrida fait écho à celle d'Hannah Arendt, où « la responsabilité politique de la philosophie n'est pas, selon eux, une question de choix personnel » et où « le terrorisme du type 11 septembre ne constitue pas le premier symptôme de ce processus mais sa manifestation la plus récente »[10].
En , L'Humanité affirme que le livre « illustre la nécessité pour Derrida de dire à la fois les choses en termes de non-événement et d’événement »[11].
Pauline Blistène, « Derrida, le et le », dans François Blanc (dir.) et Pierre Bourdon (dir.), L'État et le terrorisme (colloque éponyme à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en , organisé par le CERAP (Centre d'études et de recherches sur l'administration publique) en partenariat avec l'IRJS (Institut de la recherche juridique de la Sorbonne), publié avec le concours de la Commission de la recherche de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et de l'Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne), Paris, Éditions de la Sorbonne, coll. « De Republica » (no 13), , 297 p. (ISBN979-10-351-0064-3 et 979-10-351-0706-2, DOI10.4000/books.psorbonne.90640, lire en ligne), p. 123–146.
(ro) Maria Gyemant, « J. Derrida, J. Habermas, Le “concept” de , Dialogues à New York ( – ) avec Giovanna Borradori, Paris: Galilée, », Journal for the Study of Religions and Ideologies, vol. 4, no 11, , p. 71–75 (lire en ligne).