Harmonica diatonique simple
L'harmonica diatonique à lame simple, ou harmonica diatonique simple, est le plus ancien et le plus populaire modèle d'harmonica. Inventé dans les années 1820, il est issu de l'évolution d'un instrument chinois très ancien : le sheng. Son industrialisation prend réellement son essor en 1896 avec la commercialisation du « Marine Band » en Amérique par Hohner. D'abord conçu comme un jouet aux possibilités limitées, l'harmonica s'émancipe progressivement de ses limitations pour devenir un instrument à part entière. L'appellation diatonique est liée au fait que cet instrument était initialement conçu pour produire les notes de la gamme majeure diatonique (gamme de sept notes) sur une tessiture de trois octaves (une octave grave, médium et une aigüe). Ainsi, par exemple, sur un harmonica diatonique 10 trous en do en soufflant et en aspirant du grave à l'aigu, on produira les sept notes de la gamme majeure de do : do, ré, mi, fa, sol, la, si et ce sur les trois octaves de l'instrument, à l'exception de certaines notes absentes dans le grave et l'aigu (tessiture d'un harmonica en do : do4 à do7). Pour compenser les limitations tonales de l'instrument, l'harmonica diatonique a été décliné dans les 12 tonalités majeures. Si contraignant soit le changement d'harmonica, il a aussi un avantage majeur : celui de permettre au joueur de transposer directement un morceau, voire une phrase, de la tonalité d'origine vers celle du nouvel harmonica, sans avoir à les réapprendre. Dès les années 1920-30, l'absence de certaines notes chromatiques a conduit les joueurs de blues afro-américains à inventer de nouvelles techniques pour produire, par altération, les notes bémolisées du blues. Univers du diatonique et spécificitéL'harmonica diatonique est un instrument très compact (d'une douzaine de centimètres de longueur), très populaire en raison de la modicité de son coût (entre 30 et 40 euros pour un modèle courant convenable) et de sa mobilité (on peut l'emporter avec soi dans la poche et en jouer en tout lieu). L'harmonica diatonique simple s'inscrit dans une tradition autodidacte plus ou moins orale et reste d'essence plutôt populaire, tandis que l'harmonica chromatique, autrefois très populaire, poursuit désormais l'héritage des musiques savantes ou écrites, impliquant un apprentissage a priori plus académique. Malgré une appellation commune qui les identifie à une même famille instrumentale, ces deux instruments sont éminemment différents (répartition des notes et des intervalles, sonorité, "typage" stylistique). L'harmonica diatonique souffre lui-même d'un déficit de considération lié aux stéréotypes qu'il véhicule (allure de petit jouet, association à l'amateurisme ou à l'amusement, instrument d'accompagnement folk ou cantonné à des effets expressifs : wha-wha, trémolo…). Son statut d'instrument véritable et d'instrument soliste n'est pas toujours partagé par le grand public. Aujourd'hui, il tend via des évolutions de l'instrument à lui-même (des modèles de série un peu plus fiables, des harmonicas de luthiers soignés et performants (Raymond Brodur, Christophe Dortel...)) et de nouvelles techniques de jeu (overblow, altérations valvées ou rendues possibles grâce à de nouveaux mécanismes) à investir des univers musicaux plus variés et à pousser plus en avant son potentiel instrumental. Caractéristiques généralesComposants et montage de l'harmonicaL'harmonica diatonique, initialement fixé par de petites pointes, est aujourd'hui entièrement démontable à l'aide d'un simple tournevis. Cela répond à des nécessités d'entretien ou de réglages car il n'est pas rare qu'une anche se bloque accidentellement. Par ailleurs, cela permet le changement des plaques d'anches qui évite le rachat complet de l'instrument, même si en pratique, sur les modèles courants, cette opération n'a qu'un faible intérêt économique. Lors du démontage, on remarquera que les anches de la plaque supérieure sont fixées côté sommier, rivets vers l'embouchure et extrémités libres des anches orientées sur le fond du sommier. Elles suivent le flux d'air soufflé du joueur. Dissymétrie des octavesL'harmonica diatonique à 10 trous a une tessiture de 3 octaves équivalente à celle d'un harmonica chromatique 12 trous.
Cette spécificité de l'instrument accordé façon Richter, fait qu'une même mélodie va se jouer selon un schéma de déplacement différent dans chaque octave. En revanche, l'instrument étant décliné dans chaque tonalité, un joueur peut transposer automatiquement un morceau appris sur les trois octaves dans les onze autres tonalités en changeant simplement d'instrument (puisque chacun des harmonicas, en accordage standard, a strictement la même disposition d'intervalles quelle que soit la tonalité). Tout ceci n'est plus forcément vrai pour d'autres options d'accordages, comme l'accordage diminué par exemple. Cet accordage diminué (basée sur la gamme octa-tonique diminuée) est beaucoup plus symétrique et ne nécessite pas de techniques ardues pour obtenir un chromatisme complet. Par contre, il est très peu intuitif (à la différence de l'accordage Richter, par exemple) et demande un gros travail de "ré-apprentissage" pour quiconque serait séduit par sa symétrie... AccordageL'accordage courant "Richter" et l'accordage diminuéL'accordage Richter (du nom du concepteur de l'accordage) est le plus répandu pour les harmonicas diatoniques, ceux-ci comportant en général 10 trous (des modèles de 12 et 14 trous, avec une tessiture étendue dans les graves existent, mais sont moins répandus). L'accordage Richter est un accordage majeur (fondé sur une gamme diatonique majeure, voir plus bas caractéristiques harmoniques) mais comme on le verra, un harmonica diatonique permet un jeu selon plusieurs "positions" qui autorisent des passages dans des modes mineurs. Sur chacun de ces trous, il est possible de souffler, ou d'aspirer, et donc de produire 2 notes par trou en faisant réagir l'une ou l'autre des anches. C'est ainsi qu'un harmonica diatonique 10 trous peut jouer 20 notes différentes de base (19 en réalité car la note de quinte est redoublée dans la première octave pour pouvoir jouer l'accord de quinte aspiré). Il existe plusieurs tonalités d'accordage Richter qui correspondent aux demi-tons dans la musique occidentale en occident. En termes de modèles et de tonalités d'harmonica, cela donne du modèle le plus grave au plus aigu : Sol, La, La, Si, Si, Do, Ré, Ré, Mi, Mi, Fa, Fa. Un joueur qui voudrait jouer dans toutes les tonalités doit donc se munir d'un jeu de 12 harmonicas qu'il utilisera à tour de rôle en fonction des tonalités des morceaux abordés (même si en réalité, certaines tonalités sont plus utilisées et d'autres très rarement). Nous décrirons donc la disposition des notes de l'accordage Richter plus abstraitement en termes de degré selon les intervalles toujours constants qui séparent les notes, quelle que soit la tonalité. Ainsi la tonalité de l'harmonica sera notée I dans notre exemple. L'accordage diminué, lui, se fonde sur une gamme octa-tonique dite diminuée, qui permet d'obtenir une disposition des notes très symétrique (voir disposition plus loin). Notes d'un harmonica diatonique (accordage Richter) indiquées en degré (sans les altérations)
Notes d'un harmonica diatonique (accordage diminué) indiquées en degré (sans les altérations)
Exemples d'accordages réél Richter & diminué
Concrètement, prenons l'exemple d'un harmonica en tonalité de do (accordé en do majeur Richter), la répartition des notes est alors la suivante:
Pour les autres tonalités, il suffit de transposer l'accordage, c’est-à-dire de changer les notes en gardant les mêmes rapports d'intervalles entre les notes.
Caractéristiques harmoniques de l'accordage RichterCette disposition permet d'obtenir les caractéristiques harmoniques suivantes :
Sur notre harmonica en do par exemple, on a ainsi une succession de « do-mi-sol ». Ainsi, le joueur, s'il prend au moins trois trous en bouche, soufflera toujours cet accord majeur (avec renversement ou non) quelle que soit sa position sur les octaves.
Nous retrouvons ainsi sur notre harmonica en do : le sol (qui devient alors la tonique de l'accord), le si qui est sa tierce, et le ré qui est sa quinte. Nous avons d'ailleurs accès à un ré plus grave que notre sol et un ré plus aigu, nous permettant ainsi un second renversement.
Enfin sur le cinquième trou aspiré se trouve un fa, qui est la septième mineure de l'accord de sol. Avec ce Fa, ajouté au reste des notes, nous obtenons désormais l'accord septième, qui étend l'accord parfait.
Pour notre harmonica do, ce seront le ré (qui est notre tonique d'accord ici), le fa (sa tierce mineure) et le la (sa quinte), ce qui donne un accord de ré mineur.
Nous avons ainsi accès à 2 accords majeurs et un accord mineur (ainsi que quelques variantes) aisément sur un harmonica diatonique, simplement en soufflant ou aspirant plusieurs trous en même temps. Les autres accords (potentiellement tous selon la maîtrise de l'instrument) sont jouables en arpèges uniquement. Ces quelques accords permettent cependant déjà une bonne aide pour le jeu rythmique ou d'accompagnement. Caractéristiques harmoniques de l'accordage diminuéEn termes de jeu simultané, les accords mineurs diminués tel que Do Mib fa# sont facilités. Cette caractéristique explique le "penchant" qu'a cet accordage à s'exprimer dans les musiques mineures... JouerLes bases préliminairesLa posture du corps, la mise en bouche et la tenue de l'harmonica, la façon de respirer, sont considérées à tort comme des généralités évidentes. Peu parlantes pour le débutant, elles sont pourtant une garantie pour pouvoir progresser et développer tant la technique de jeu qu'une bonne sonorité. La respirationLa particularité de l'harmonica, contrairement aux autres instruments à vent, réside dans le fait qu'il met en jeu un souffle expiré et inspiré. Une mauvaise inspiration des notes aspirées surtout quand elles sont enchaînées sans notes soufflées intermédiaires pour pouvoir expirer l'air, entraîne rapidement un effet de suffocation. La posture du corpsIl faut veiller à se tenir bien droit pour bien exploiter sa "colonne" d'air en ayant un bon aplomb entre la gorge et le ventre. De la même manière, il faut éviter de jouer trop voûté ou incliné, car d'une part l'inclinaison de l'harmonica est propice à l'accumulation de salive et parce qu'en outre, le son ne se projette pas bien en direction des auditeurs potentiels. La tenue de l'harmonicaLa norme la plus courante est de tenir l'harmonica horizontalement, bien droit, avec les notes les plus graves à gauche (trou 1 à gauche). L'harmonica diatonique étant un instrument en grande partie autodidacte, il existe nombre de tenues non orthodoxes, parfois équivalentes (tenue instrument renversé avec les aigus à gauche au lieu des graves), ou ayant juste des fins de démonstration dans des contextes de divertissement (la « tenue en cigare »). Néanmoins, elles demeurent anecdotiques et ne sauraient faire valeur d'exemple. La tenue préconisée la plupart du temps, est une tenue de "bon sens" destinée à faciliter l'apprentissage même si des aménagements personnels sont toujours envisageables en fonction du confort de jeu. L'embouchureOn désigne par ce terme la façon de prendre l'harmonica "en bouche". L'objectif d'une bonne embouchure est de produire la meilleure sonorité possible sans affecter ni la justesse des notes produites ni la qualité du timbre et en tirant parti au maximum de son souffle sans efforts superflus. Dans certains cas, on préconise d'incliner l'harmonica légèrement de manière à établir une continuité plus directe avec le débit d'air provenant de la gorge. D'autres joueurs recommandent au contraire une tenue très droite afin de faciliter les déplacements latéraux sur l'instrument et pour ne pas prendre de mauvaises habitudes de jeu (inclinaison excessive durant les altérations, etc.) Les deux techniques de jeu principalesL'harmonica repose sur deux techniques de jeu principales. Chaque joueur opte pour l'une ou l'autre, avec des combinaisons possibles de l'une avec l'autre quand le jeu le requiert. Il s'agit d'une part du jeu en "Pucker" ou "cul de poule" et d'autre part, du jeu plus traditionnellement blues dit en "tongue blocking" (littéralement : en servant de la langue pour bloquer des trous). Le Pucker dit aussi le jeu en cul de pouleIl s'agit de former un « O » avec ses lèvres comme si vous vouliez siffler. Cette technique a l'avantage d'être potentiellement plus précise puisque le souffle y est mieux canalisé et que le contrôle de l'embouchure, par les lèvres évite les fuites d'air. Un autre avantage est de rendre les altérations plus aisées à obtenir, et par extension les overblows. Cela est notamment dû, au fait que ce type de jeu permet à la langue de se mouvoir plus librement et de moduler plus finement le son, y compris à bas volume. Le jeu en pucker occasionne souvent un défaut chez nombre d'harmonicistes qui pincent trop la pointe de l'embouchure avec les lèvres et n'ouvrent pas assez leur gorge. Ces mauvaises habitudes de jeu engendrent un son assez pointu avec des notes qui manquent d'ampleur ou de timbre. Pour y remédier, il faut prendre l'harmonica plus profondément en bouche en écartant bien la mâchoire inférieure de manière à rapprocher la gorge pour ne pas étouffer la vibration de l'air. Le Tongue BlockingL'autre technique majeure, le tongue blocking est l'une des plus utilisées chez les harmonicistes Blues. Elle découle du jeu en accompagnement à base d'accords (en soufflant ou en aspirant dans 3 ou 4 trous à la fois) dont elle est une variante mélodique. En prenant l'harmonica à pleine bouche et en occultant certains des trous avec la langue, le joueur aura le choix de faire ressortir telle ou telle note de l'accord. Souvent la langue bloque latéralement les trous de manière à isoler un seul trou pour faire résonner une note, soit du côté gauche dans la partie grave, soit du côté droit en direction de l'aigu. Il est donc courant de prendre 4 trous "en bouche" de manière à faire sonner les notes extrêmes, soit simultanément (la langue bloquant les 2 trous centraux), soit alternativement (en faisant glisser la langue de gauche à droite sur trois trous). De cette manière, on peut jouer la même note à l'octave ou faire résonner les deux notes à l'unisson (sur un harmonica en Do, le premier trou soufflé est un Do, et le 4e également un Do mais une octave plus haut). C'est une technique historique, car c'est souvent de cette manière que les harmonicistes apprenaient à jouer traditionnellement, pour pouvoir passer rapidement du jeu en accompagnement au jeu mélodique. Nombre de joueurs contemporains, notamment parmi les joueurs très avancés, utilisent davantage le jeu en "pucker" pour la précision, les nuances et la vélocité qu'il permet. Ils l'associent à des passages en accords ou en octave recourant ponctuellement au tongue blocking. Autres techniquesJeu d'accords, d'intervalles, rythmiqueEn "Pucker" comme en "Tongue blocking", on a la possibilité, soit en élargissant ponctuellement son embouchure pour le premier, soit en faisant varier le nombre de trous bloqués par la langue pour le second, de faire sonner deux notes à la fois (tonique et tierce, tierce et quinte…). De la même manière, en élargissant la bouche ou en décollant la langue, on peut faire sonner des accords entiers, soit en les intercalant individuellement, soit en les enchaînant rythmiquement pour produire un accompagnement. Les possibilités de jeu en accords restent toutefois limitées à quelques accords principaux (voir accordages. Cependant, en élargissant la bouche pour englober plus ou moins de notes, on peut enrichir l'accord de quinte aspiré avec la septième et la neuvième, ou jouer les accords parfaits en renversement… En dernier lieu, dans le jeu mélodique note à note, il est fréquent de "jouer sale" ou de "salir" en élargissant la bouche de manière à faire sonner une note voisine, qu'elle soit dissonante ou consonante. Le bruit produit par cet appel ou arrivée d'air dans le trou voisin est semblable, dans une certaine mesure, à un léger effet de saturation qui brouille sensiblement le timbre de la note d'origine. Ce jeu "large" est notamment très usité dans le blues. Les altérationsEn plus des 19 notes disponibles sur l'harmonica diatonique 10 trous (la note de quinte en 2 aspiré est identique au 3 soufflé), les joueurs peuvent jouer d'autres notes en ajustant leur embouchure et en forçant les anches à vibrer à une hauteur différente. Ils y arrivent principalement en déplaçant la langue dans la bouche de manière à modifier la pression de l'air et partant, la hauteur de la note. Cette technique est appelée « altérations » (bending en anglais). Grâce aux altérations, on peut atteindre des notes absentes dans la gamme majeure qui ont une couleur mineure. Sur un harmonica en Do, les notes soufflées et aspirées naturelles sont celles de la gamme diatonique de Do majeur. En revanche, en altérant, on peut jouer la pentatonique mineure blues en partant du sol en rajoutant : le Sib (tierce mineure du sol), le Réb (la quinte diminué) en plus du Fa. Sur un harmonica diatonique, un joueur peut altérer les notes les plus aigües de chaque trou et les faire descendre en direction de la note la plus grave. En d'autres termes, dans les trous 1 à 6, les notes aspirées peuvent être altérées, et dans les trous 7 à 10, les notes soufflées peuvent être altérées. Le trou 3 permet le plus grand écart : l'altération s'étend sur un ton et demi ; sur un harmonica en do par exemple, il est ainsi possible de descendre continument la note aspirée d'un si jusqu’à un la. Contrairement à ce qui est perçu par le joueur ou l'auditeur, lors d'une altération, c'est l'anche opposée qui se met à réagir (la plus grave des deux), pour se rapprocher de la note aigüe. Ainsi dans une altération aspirée exercée sur le 1, si la note de départ est le Ré aspiré, c'est le Do de l'anche soufflée qui se met à réagir à la pression de l'air et qui devient plus aigu à mesure que la pression s'accroît. La note monte donc jusqu'au Ré/Do. Le phénomène s'explique par le fait que les lamelles se relaient mutuellement : dès que l'on relâche son effort, la lamelle soufflée altérée est relayée par l'anche aspirée qui se met à nouveau à vibrer normalement. Contrairement à ce que l'on croit, produire une altération (ou une overnote) n'exige pas du joueur un énorme effort musculaire (langue, gorge, lèvres) ni une attaque plus forte. Au lieu de cela, le joueur doit décontracter son visage, sa gorge, et produire un son homogène dans ses altérations, pour que celles-ci ne soient pas plus fortes que les notes naturelles qu'il souffle ou qu'il aspire. La justesse de hauteur et de timbre des notes altérées est certainement l'une des grandes difficultés techniques de l'harmonica diatonique d'autant plus que le geste à produire (un mouvement intérieur) est difficile à montrer à un tiers. Voici les notes que peut produire un harmonica diatonique accordé en do avec les bendings : Quelques points à noter au sujet des altérations :
Les tonalités jouables sur un diatoniqueLe problème basique de l'harmonica diatonique est l'absence de certaines notes. Il est a priori limité à jouer la gamme des accords présents : la gamme majeure de l'accord de tonique soufflé ou celle de l'accord de quinte aspiré. C'est la caractéristique des instruments diatoniques par opposition aux instruments entièrement chromatiques. Néanmoins, un même harmonica diatonique permet de jouer dans des tonalités "voisines" de la tonalité de l'instrument. Ces tonalités sont appelées ainsi car, éloignées d'une quinte ou deux quintes par rapport à la tonalité de départ, elles n'ont qu'une ou deux notes de différence, "diésées" ou "bémolisées". C'est le principe des positions. Quand les gammes ou tonalités recherchées sont trop différentes (trop grand nombre de notes de différence) le joueur doit changer de tonalité d'harmonica. Les "positions" de jeuPour un harmoniciste, le terme de position définit le fait de jouer dans une tonalité donnée en partant de l'une des notes présente sur l'instrument. Les positions, du fait des intervalles existant entre les notes rejoignent partiellement les modes. Chaque position a donc une couleur, mineure ou majeure, en fonction de la note de départ. Dans la pratique, seules quelques positions sont fréquemment utilisées :
Les autres positions que l'on utilise sont souvent des gammes mineures relatives issues des gammes majeures, qui ne sont que des variantes mineures des autres positions : le La mineur (4e position découlant de la 1re en Do majeur), le Mi mineur (5e découlant du Sol)… Pour les joueurs de diatoniques orientés jazz, qui "chromatisent" entièrement l'instrument avec les overnotes, la notion de jeu en position (jeu positionnel) est trop limitative. Elle perd sa pertinence quand les changements de tonalités sont fréquents dans un morceau ou que la grille d'accord implique des improvisations harmoniques plus complexes. Les joueurs préfèrent alors penser davantage en termes de tonalités ou de modes que de positions. Les effets expressifsAttaque et articulationL'une des difficultés de l'harmonica, que l'on joue en "pucker" ou en "tongue blocking" demeure souvent la liaison entre les notes, le "legato". Naturellement, un joueur va avoir tendance à égrener mécaniquement les notes sans les lier dans un même souffle, soit parce que son embouchure est mauvaise, soit parce qu'il force trop ses attaques en dissociant trop fortement le soufflé de l'aspiré, en articulant involontairement avec la langue, ou par un mouvement réflexe de la glotte. Un autre point important du jeu à l'harmonica est l'articulation des notes. Wah-WahLe wah-wah est l'une des techniques de main les plus connues et populaires de l'harmonica. TrilleEffet rythmique par excellence, le trille est un motif caractéristique très courant dans la pratique de l'harmonica blues. Il consiste en un jeu alterné très rapidement de deux notes adjacentes, sur un même souffle soit en secouant très rapidement la tête de gauche à droite, soit en faisant glisser l'harmonica de la même manière avec la main. Un autre technique consiste à produire les trilles avec la langue. ChorusL'effet Chorus qui consiste à déplacer rapidement sa main de manière latérale face à l'instrument permet de produire une autre sorte de trémolo quand il est joué de façon très rapide. Vibrato et trémoloIl s'agit de techniques expressives qui consistent à faire « vibrer » la note, en jouant sur son intensité, sa hauteur, parfois les deux à la fois. Plusieurs techniques existent et ne procurent pas le même rendu sonore. Quand c'est l'intensité qui varie plus que la hauteur (mains, gorge et langue dans certains cas), il s'agit d'un trémolo. Nombre de techniques utilisées dans le blues sont davantage des trémolos que des vibratos. Quand la hauteur de la note est sensiblement altérée dans un mouvement rapide de va-et-vient, il s'agit alors d'un vibrato (diaphragme, langue, lèvres et mâchoire inférieure dans certains cas…). Dans les aigus, certains "vibratos" de gorge très amples couvrent un demi-ton et s'apparentent davantage à des trilles "de gorge" qu'à des vibratos stricto sensu. Ces techniques demandent beaucoup d'entraînement pour obtenir un son agréable et fluide dans les tempos rapides comme dans les lents, où la difficulté, contrairement à ce que l'on pourrait penser, n'est pas moindre.
Les développements contemporains de l’harmonica diatoniqueLe jeu chromatiqueMalgré la difficulté relative des techniques mentionnées, certains musiciens professionnels sont capables d'obtenir toutes les notes, diatoniques et chromatiques, sur l'instrument. L'arrivée de l'overblow en particulier a "chamboulé" le monde de l'harmonica. Cette technique a engendré une nouvelle vague d'harmonicistes ayant beaucoup plus recours à l'harmonie, contrairement à "l'école blues" traditionnelle, bien plus empirique et intuitive. On peut également mentionner la technique alternative des altérations valvées qui permet d'obtenir également une "chromaticité" complète sur un harmonica diatonique. Cependant, beaucoup d'harmonicistes de haut niveau, parmi lesquels certains maîtrisent très bien les overnotes, continuent à jouer sur une grande variété d'harmonicas de tonalités différentes. On peut l'expliquer par une recherche de facilité, même si les overnotes sont maîtrisées, mais ce sont le plus souvent des recherches de son, de timbre, de tessiture ou de phrasé, qui guident ce choix. Certaines tonalités d'harmonica sont plus graves ou plus aiguës et n'ont pas par conséquent les mêmes tessitures. Certains phrasés dans une tonalité donnés sonneront mieux sur telle ou telle tonalité d'harmonica car ils impliqueront moins de changement de flux d'air, soufflé ou aspiré, pour produire les notes, et sonneront par conséquent plus "homogènes". Quelles que soient les polémiques que soulève cette évolution de la technique instrumentale chez les harmonicistes, la nécessité de jouer de façon chromatique s'est imposée à certains joueurs qui souhaitaient sortir le diatonique de son carcan stylistique et des clichés attachés à l'instrument. Jusqu'alors, il était cantonné à des styles impliquant peu d'accords et des gammes pentatoniques, majeures ou mineures. La possibilité de produire toutes les notes ouvre la palette stylistique du diatonique. Désormais, il est possible de jouer du jazz ou des musiques populaires plus contemporaines, où les changements d'accords, les modulations, les "bascules" de tonalités, peuvent être fréquents dans un même morceau. La technique de l'OverblowGrâce aux altérations, on est parvenu à jouer partiellement chromatique sur un harmonica mais l'absence de certaines notes cantonnent les harmonicistes à jouer dans les parties de l'instrument où les chromatismes sont présents. C'est dans ce contexte que Howard Levy, dans les années 1980, utilisa intensément une technique[1] déjà existante : la technique de l'overbending qui - combinée avec les altérations - permet de jouer la gamme chromatique entière sur chaque octave. Une note issue de cette technique se retrouve sur un enregistrement de Mean Low Blues par Blues Birdhead datant des années 1927 ou 1929, puis sur d'autres enregistrements par la suite. Des doutes ont parfois émis sur cet antécédent d' overblow : étaient-il intentionnel? le joueur n'avait-il pas simplement changé d'harmonica pour le produire? la qualité de l'enregistrement était-elle fiable (problème récurrent des déviations de fréquence ou des mauvaises vitesses d'enregistrement)? Il existe de toute façons de nombreux enregistrements antérieurs qui montrent l'utilisation plus ou moins ponctuelle de cette technique avant les années 80. Quoi qu'il en soit, Howard Levy peut être considéré comme l'initiateur de cette technique, même si de nombreux autres joueurs ont pu, seuls de leur côté, et bien avant lui, en développer l'usage. PrincipeL'overbending, comme son nom l'indique, est un bending "vers le haut", qui monte au lieu de descendre à la différence des "bendings" ou altérations "classiques". Dans les 6 premiers trous, l'overbending se fait en soufflant, c'est un overblow. Dans les 4 derniers, il se fait en aspirant : c'est un overdraw. On utilise le terme overblowing de manière générique pour désigner cette technique que l'on souffle ou que l'on aspire. Overnotes d'un harmonica diatonique en C (do)
Les overnotes des trous 2, 3 et 8 sont des doublons du 3 altéré 2x, du 4 soufflé et du 9 aspiré L'overblowing est souvent considéré à tort comme l'une des techniques les plus difficiles à maîtriser dans la pratique de l'harmonica diatonique. En réalité, une bonne technique d'altération standard permet de déclencher les overnotes et l'overblowing n'est jamais qu'une extension de celle-ci. On la considère à tort comme une technique étrangère nécessitant un apprentissage en soi. Cela dit, les overbendings sont, dans la pratique, un peu plus capricieux que les altérations et ils nécessitent une technique assez fine et précise. Réglage pour les overblowsBien que l'on puisse tout à fait produire certaines overnotes sans y recourir, un réglage dit "de confort" s'avère souvent indispensable pour l'overbending. Par ailleurs, celui-ci peut contribuer à améliorer significativement le rendu des autres notes et à optimiser la réponse des anches d'un trou à l'autre de l'harmonica. De manière générale, le réglage d'un harmonica diatonique acheté en magasin est une étape conseillée même pour un joueur qui ne souhaite pas pratiquer les overblows car il résout nombre de problèmes, que le joueur impute à sa technique alors qu'ils proviennent de certaines anches (désaxées, écartées…). La difficulté à produire des overnotes provient des réglages d'usine souvent aléatoires des instruments et principalement de l'écartement trop prononcé des anches censé convenir à un jeu de débutant (c'est du moins l'argument invoqué par les constructeurs). En réalité, ce préréglage « générique » accentue les pertes d'air au risque de modifier le timbre des notes et de rendre difficile la production de certaines altérations. Par extension, il rend la production des overnotes quasi impossible dans certains cas. Pour y remédier, le joueur devra donc ouvrir les capots de son harmonica et régler l'écartement de ses anches au plus près des plaques en veillant à ne pas bloquer la production des notes soufflées et aspirées standard. Dans le registre plus aigu de l'instrument, les overnotes ont souvent tendance à crisser et un apport ponctuel de matière à la base de l'anche opposée (soufflée pour les overblows ou aspirée pour les overdraws), des gouttes de vernis ou de la cire, peut s'avérer nécessaire pour stabiliser la lamelle et éliminer son bruit. Pour faciliter l'overblowing, de nombreux joueurs utilisent également des harmonicas au réglage affiné, qu'il s’agisse d'harmonicas de luthiers spécialement réglés ou de modèles fabriqués en série avec un préréglage censé améliorer la production des overnotes. Polémique et apportsCertains joueurs traditionalistes réfutent l'utilité des overblows (ou celle des altérations valvées) en arguant la préexistence de l'harmonica chromatique pour cet usage (le modèle à valves et à tirette). Néanmoins la "chromatisation" du diatonique n'est pas qu'une reproduction de l'harmonica chromatique car elle conserve une possibilité de bendings multiples que l'harmonica chromatique ne permet pas et sa sonorité est sensiblement différente (en raison des valves et du mode d'accordage). En outre, l'overblowing ouvre de vastes possibilités musicales en termes de jeu et de phrasé. Une nouvelle école d'harmonicistesAu XXIe siècle, de plus en plus d'harmonicistes autrefois cantonnés à un panel restreint de genres musicaux, tentent de s'orienter vers cette technique. Certains, de par une virtuosité et musicalité rares sur leur instrument devenu complètement chromatique, réussissent à exploiter le langage bebop ; citons pour exemple les français Sébastien Charlier et David Herzhaft, le Brésilien Otavio Castro etc. Les overblowers font partie de cette "nouvelle" école d'harmonicistes désireux d'aller plus loin et d'exprimer des mélodies sophistiquées sur l'harmonica, le débarrassant ainsi de certains stéréotypes country, blues et folkloriques ou des limitations de certains "plans" musicaux répétés à l'envi faute de nouvelles possibilités musicales. Annexes divers : techniques, accordages et modèles alternatifsLe U-blockIl s'agit là d'une technique assez marginale ou rare indiquée à titre informatif et complémentaire. Parmi les accordages alternatifs proposés par les fabricants, on trouve des harmonicas en mineur (harmonique, mélodique) mais aussi l'accordage "country". L'accordage countryCet accordage a fait le choix de remplacer les notes aspirées des 5e et 9e trous par une quarte augmentée à la place de la quarte de l'accordage Richter. Sur un harmonica en do, cela revient donc à remplacer le fa par le fa. Caractéristiques harmoniquesLa conséquence la plus notable est que l'on perd l'accordage mineur de notre seconde, mais on y gagne l'accordage majeur. Ainsi le ré mineur par exemple sur l'harmonica en do Richter devient un ré majeur sur l'harmonica en do country. Une seconde conséquence est qu'il n'est plus nécessaire de jouer un overblow sur le 5e trou pour obtenir fa et fa devient désormais accessible par altération du trou; par contre il faut désormais faire un overdraw sur le 8e trou pour obtenir le fa aigu alors qu'il n'est plus nécessaire d'altérer le 9e trou pour obtenir un fa. Il y a donc toujours des gains pour des pertes. Cependant, la plupart des harmonicistes jouent davantage dans les graves ou les médiums que dans les aigus. Or les altérations étant maîtrisées par la plupart des harmonicistes, ce n'est pas le cas des overblow et donc - pour certains musiciens - le gain sur le 5e trou vaut bien la perte sur le 9e trou, moins souvent joué. Certains harmonicistes jouent quasiment essentiellement avec cet accordage. C'est le cas par exemple de l'harmoniciste français de jazz Sébastien Charlier, qui joue sur un accordage lydien (ou tritonal) : seul le 5 est surélevé d'1/2 ton, le 9 est inchangé. Les accordages personnalisésD'autres accordages sont possibles, mais ils se trouvent plus rarement dans le commerce. Les harmonicas customs ou personnalisés sont en général accordés par les harmonicistes eux-mêmes, ou par des harmonicistes professionnels qui en ont fait une part de leur activité professionnelle. Le but peut être multiple :
Cela est particulièrement utilisé pour certains styles musicaux qui demandent rapidité de jeu. Le joueur préfère avoir à simplement glisser sur l'harmonica sans se poser trop de questions sur les altérations quand on veut jouer très vite. Il utilisera alors un accordage adapté à la gamme utilisée. Le diatonique semi-valvé ou l'utilisation de nouveaux modèles d'harmonicas tel le Suzuki X30: une alternative aux overblowsIl existe une autre méthode pour obtenir toutes les notes manquantes avec les altérations en équipant l'harmonica de petites valves en plastique ou en utilisant un nouveau type d'harmonica, diatonique comme le Suzuki X30 qui permet la production d'altérations aspirées comme soufflées, dans tous les trous de l'harmonica. Pour le cas du diatonique semi-valvé, les valves posées ne perturbent pas les bends classiques évoqués auparavant. Les valves ne sont placées que sur une anche par trou. On en colle 6 sur la plaque inférieure (trou no 1 à no 6, notes aspirées) et 4 sur la plaque supérieure (trou no 7 à no 10, notes soufflées) pour obtenir un harmonica diatonique qui est par conséquent "semi-valvé". Voici les notes qu'on peut obtenir spécifiquement avec les bends valvés, sur un harmonica diatonique semi-valvé accordé en do : Notes altérées valvées sur un harmonica diatonique valvé en C (do) Les altérations valvées des trous 3, 4 et 9 sont des doublons du 2 altéré 1x, du 3 aspiré et du 8 soufflé La réunion de ce tableau avec celui des altérations (voir plus haut) donne l'ensemble de toutes les notes jouables sur un harmonica diatonique semi-valvé, en do. Les partisans des bends valvés par rapport à l'overblowing justifient leur préférence pour cette technique par :
Le premier argument est subjectif puisqu'il ne dépend, en fait, que de la maîtrise technique des overblows. Le second est plus objectif puisqu'un harmonica de ce type permet des altérations, soufflées et aspirées, sur toutes les notes et sur la totalité des 3 octaves, assez similaires à la technique des altérations "ordinaires". Néanmoins, comme pour l'overblow, l'altération valvée oblige à replacer les nouvelles notes dans les habitudes de jeu déjà acquises, et donc de remettre sensiblement à plat la répartition des notes sur l'instrument en apprenant de nouveaux déplacements. Elle n'est donc pas forcément plus naturelle et dépend donc, encore, de préférences individuelles ou justes techniques. Notes et références
Voir aussiArticles connexesLiens externes
|
Portal di Ensiklopedia Dunia