Les forges d'Orthe sont d'anciennes forges situées dans la commune de Saint-Martin-de-Connée en Mayenne, à 2 kilomètres au Nord-Ouest du bourg. Initialement, il y avait le Château d'Orthe, qui fut remplacé alors par une forge qui utilisa les ressources du sol en minerais et charbons. Par la suite, un logis, et un moulin, furent remplacés par une pilerie de chanvre et une scierie, les forges étant supprimées[1].
Châtellenie mouvant en arrière-fief de Mayenne, à charge d'un « bézier ou poirier sauvage » à muance de seigneur, et en nuesse de la Baronnie de Sillé, avec obligation de quarante jours de garde au château du suzerain et d'un chevalier de service pour accompagner le baron à la suite du comte du Maine, jusqu'à Pontlieue à ses frais (8 ₶), et défrayé s'il allait plus loin[1].
On mentionne en 1459 « habergement, chastel, terre d'Horthe, ainsi que les dosves et muraille, l'enlièvent,… deux moulins, les estangs Corel, de Barienne et du Chastel, garennes de neuf à dix journaux, pesche depuis l'estang neuf jusqu'à la Belinière »[1].
La mouvance et la juridiction s'étendaient sur quinze fiefs importants, dont les tenanciers devaient le charroi de tous matériaux pour réparation du château, des moulins, des étangs et de la justice, tandis que les « bourgeois d'Orthe », qui devaient corvée pour la récolte des foins et avoines, garde des prisonniers, charroi des blés depuis Couesmes, avaient droit d'usage dans la forêt, « à mort bois tant seulement, sçavoir de boul, de tremble, de bourdaine, de saulé et de charme »[3][1].
Chapelle
La chapelle de Saint-Jean[1], bâtie avant le XVe siècle dans l'enceinte du château, prit aussi, après l'organisation des forges, le vocable de Saint-Éloi[4] En 1780, elle était « dans le cas d'être interdite ». On y disait encore la messe en 1840. M. Buon la fit démolir et plaça la statue de saint Éloi dans le pignon de la martellerie[5].
Moyen-Age
Soit qu'il ait souffert dans la première phase de la Guerre de Cent-Ans, soit qu'on voulût le mettre en état de résister à des attaques imminentes. Brisegaud de Couesmes obligea ses sujets, le (v. s.), à amener « bois, pierre et autres choses nécessaires à la rédification, réparation et renforcement d'Orte. » Ce fut insuffisant[1].
En 1433, « le comte d'Arondel, lit-on dans Jean Chartier, Chroniques de Charles VII, après avoir pris Bon-Moulin, vint mettre le siège devant un château nommé Orte, en pays du Maine, duquel estoit capitaine un escuier breton, Olivier Bouchier. Le chasteau, battu de bombardes, fut rendu par composition. Le général anglais s'en alla ensuite à Sainte-Suzanne. »
Le , les paroissiens de Sainte-Gemmes et autres, « tant de loingtains comme de voisins d'Orte », reçoivent un mandat de justice de Jean de Lancastre. Le comte de Falstaff avait été investi des baronnie et châtellenies de Sillé, Orthe, Cormerant ; il en prend le titre dès le . A la fin de 1436, il fait délivrer copie d'un acte du chartrier d'Orthe aux Chartreux du Parc-en-Charnie. Quand Charles II de Couesmes, sorti des prisons anglaises, rentra dans ses terres, il n'y trouva plus que des ruines[1].
En 1450, « Charles de Coaismes s'en vint du pays de Bretagne où il avoit demeuré du temps des guerres, après qu'il fut délivré des prisons des Anglais, et logea deux ans ou environ au bourg de Connée, parce qu'il n'y avoit aucun logis au chasteau d'Orthe, lequel les Anglois avoient tout abattu et démoly. Et après… fist besoigner au lieu d'Orthe et édiffier une maison en laquelle il s'en alla demourer avant qu'elle fust toute couverte »[6]
S'il fut rétabli après les guerres anglaises, le château, délaissé par ses possesseurs qui habitaient Le Grand-Lucé, vendu à la fin du XVIe siècle, fut remplacé alors par une forge qui utilisa les ressources du sol en minerais et charbons[1].
Il n'y a pas de doute pour l'Abbé Angot que Hebertus de Orto (pour Orta), cité au cartulaire de l'Abbayette, en 1087, comme témoin d'une charte de Guillaume de Sillé en faveur de l'Abbaye du Mont-Saint-Michel, n'appartienne à la famille d'Orthe.
Guérin d'Orthe, vers 1150 ; Macée, sa fille, épousa Jourdain de Courtarvel, sénéchal de Sillé.
Nicolas d'Orthe, témoin d'un accord entre le prieur de Saulges et Adam de Valtrot, 1205.
Hugues d'Orthe et ses deux fils Richard et Foulques, 1231, 1255.
Henri d'Orthe, protestataire contre Charles de Valois, 1301, le même peut-être que celui qui figure avec Robert d'Orthe à l'obituaire de Beaulieu.
Brisegaud de Couesmes, fils de Jeanne de Sourches, époux de Marie des Échelles, 1367, demandait par testament du 9 août 1400, à être inhumé près de son père et de son aïeul à Évron, mais il le fut néanmoins, après 1410, dans la collégiale de Pruillé.
Charles Ier de Couesmes, né à Saint-Martin-de-Connée, avait épousé vers 1391 Marguerite de Maulévrier, † avant 1416.
Charles II de Couesmes, fait prisonnier par les Anglais en 1422, mourut à Orthe en 1466, âgé de 75 ans, et fut enterré dans l'Église de Saint-Martin-de-Connée, peinte d'une litre à ses armes, en présence de l'abbé de Beaulieu, de 25 gentilshommes, parmi lesquels les seigneurs de Courtarvel et de la Dreulinière. Marguerite de Rieux, sa veuve, lui survécut peu de temps.
Nicolas de Couesmes épousa, le 4 novembre 1476, Madeleine de Sourches, mourut après le 8 mai 1508, date de son testament. Des lettres de François Ier (1523) autorisent sa veuve à jouir des acquêts de la communauté dans la châtellenie d'Orthe.
Charles III de Couesmes présent à la publication de la Coutume du Maine, 1508, vendit Orthe à Jacques d'Avaugour, mais en fit le retrait en 1528 et épousa Jeanne, puis Gabrielle d'Harcourt ; la seconde était remariée en 1545 à Marin Le Vayer, sieur de Pescheray.
Louis de Couesmes, mari d'Anne de Pisseleu (fille d'Adrien et nièce d'Anne de Pisseleu), lieutenant-général du Maine et du Perche, mourut lors du Siège d'Orléans en 1563.
François II d’Averton, dit d'Averton, chevalier de l'Ordre du roi, gentilhomme ordinaire de sa chambre, capitaine de 50 hommes d'armes, époux de Catherine de Thomassin, bâtit le château. Il y résidait souvent, se livrant à sa passion pour la chasse, et mourut le au logis de l'Orgerie, au milieu de la Forêt de Pail, où il avait fondé la chapelle de Saint-Hubert. François II d’Averton, père d’Emmanuel, avait acquis sur le comte de Tresmes la châtellenie du Viel-Averton, de sorte que les deux seigneuries rivales du Bourg d’Averton et du Vieil-Averton se trouvèrent réunies entre les mains, non d’Emmanuel, mort avant son père, mais de celui-ci, qui les transmit à son petit-fils, Emmanuel-René d’Averton[7] ; grâce à cette alliance, tous les intérêts se confondirent dans la même famille et les querelles prirent fin.
Emmanuel d'Averton, son fils, par son mariage avec Louise-Henriette Pottier de Gesvres
Emmanuel-René d'Averton, mestre de camp d'un régiment de cavalerie, en 1663, fut blessé mortellement au Siège de Douai, en 1667. Sa cousine germaine, Antoinette de Faudoas-Averton, qu'il avait épousée et dont il n'eut point d'enfants, mourut à son château d'Averton en 1706 « après avoir reçu tous les sacrements dans les sentiments de la plus grande piété », et fut inhumée le dans sa chapelle, attenante à l'église d'Averton.
La vente de la châtellenie d'Orthe par Emmanuel-René d'Averton et Antoinette d'Averton, sa femme, à Henri-François de Vassé et Marie de Luzignan de Saint-Gelais, sa femme, passée le , devant Tanneguy Phelipeaux, notaire à Orgères, et Louis Renard, notaire à Rouessé, comprenait la « terre et chasteau d'Orthes, consistant en un ancien chasteau, fermé de fossés d'un costé et des bouts avec pont-revis, chapelle, jardins, terre et pré, … droit de chastellenie, … de fondation des églises de Saint-Pierre-de-la-Cour et Saint-Martin-de-Connée, patronage de la chapelle de Saint-Jean ; une autre chapelle appelée Nostre-Dame-du-Chesne ; la rivière d'Orthe en descendant ; à la charge par l'acquéreur de conserver les droits à ceux qui y sont fondés ; les forges d'Orthe, avec tous les ustencilles, et le fourneau des dites forges »… appartenant « aux seigneur et dame vendeurs aux droits successifs de messire François d'Averton, leur aïeul. » L'acquéreur était cessionnaire d'une créance de 25.266 ₶ créée au profit de messire Charles Sanguin, maître d'hôtel du roi, et devait sur les 104 733 ₶ qui restaient dûs en verser 75.000 à Louise Pottier, veuve d'Emmanuel d'Averton, père du vendeur, et alors femme du sire de Saulx, comte de Tavanne[8]. Emmanuel-René d'Averton la vendit avec la seigneurie de Bais pour 150 000 ₶ à M. de Vassé.
La terre échut, par la mort de Jacques-Emmanuel de Vassé, 18 juin 1742, à son frère Armand-Mathurin de Vassé.
La terre resta dans la Famille de Vassé, car vendue en 1775 par Armand de Vassé, gouverneur du de Plessis-lèz-Tours, elle eut pour acquéreur Bruno de Vassé sur qui eut lieu la vente nationale du 15 pluviôse et du 6 floréal an VI.
Forges
Les forges fonctionnent, complètement organisées, en 1580 ; mais les renseignements que l'on possède sur l'industrie ne datent que du XVIIIe siècle[1]. En 1749, le fermier pouvait prendre le minerai dans la paroisse d'Assé-le-Bérenger, partout où il en trouverait[9]. Les mines étaient très rares ; on allait jusqu'à la Gaudinière en Forêt de Pail, à quatre lieues de là, chercher le minerai ; la production s'élevait alors à 200 000 livres de fer, de nature cassante, qui s'écoulait au Mans[1].
En 1766, on constate toujours que les mines sont rares[1], mais que la qualité du fer est bonne, qu'il s'écoule dans le Maine et la Normandie au prix de 19 à 20 ₶ le quintal. La production est triplée[10].
Avec deux cent trente-sept ouvriers, on produit en 1840[1] : fer, 280 000 kilogrammes ; fonte, 64 460 kilogrammes ; en 1852, fonte brute, 6 500 .000 kilogrammes ; objets moulés de première fusion, 7 500 000 kilogrammes ; objets moulés de deuxième fusion, 2 200 000 kilogrammes ; fer brut, 900 000 kilogrammes ; fer fendu, 250 000 kilogrammes[11].
La forge, vendue pour moitié par Isaac Grivel, de Paris, à Charles Frin de Cormeré, 1805, le fut en entier pour 220.000 francs par Pierre Delaunay et autres, de Paris[1]. Elles sont acquises en 1825 par Pierre Buon pour 220 000 francs, cédées pour 1 396 000 francs, par contrat du 5 octobre 1838, par Pierre-Marie Buon, mari de Rosine Zathelli, qui avait fait construire le logis actuel, à Charles Dorsan-Aubry et Jules Roussel.
À cause du traité de commerce de 1860, Jules Roussel est obligé de fermer ses forges dans la Mayenne. Il s'installe alors dans le Cher, reprenant en 1869 la grande usine de Rosières[12]sur la commune de Lunery en la faisant considérablement évoluer. Il crée la marque Rosières. Les forges d'Orthe soutinrent encore la concurrence après le Libre-échange et s'éteignirent définitivement en 1877[1].
Mathurin-Jacques Courcelles, 1755, 1764. De son temps les bâtiments s'écroulèrent, tuant plusieurs ouvriers.
Philippe-Nicolas-François Thomas du Taillis, mari de Jeanne Pellier, de Mayenne, 1766.
Charles-Benjamin Riffault du Plessis, de Sablé, mari de Charlotte-Louise Le Moine de Juigné, 1775.
Henri-Pierre Desportes[13], 1783, mari d'Euphrosine-Louise Duhail qui, veuve en 1785, continua le bail avec son commis Michel-Jacques Galpin-Grandchamp, qu'elle épousa en l'an XIII.
↑Sans compter la forêt d'Orthe, qui avait « une grant lieue de long », le domaine comprenait les bois de la Corbinière (30 journaux), de l'Oiselière (15 journaux), des Clerais (35 journaux), de Châtillon (20 journaux), de la Moussaye (800 journaux), de Bercon (200 journaux).
↑Le tenancier de la Royauté, dit le « bourgeois roy », que les valets de la paroisse allaient chercher et couronnaient « de ronces ou autre bois à leur plaisir » le jour de Noël après dîner, livrait une « boulle aux varlets et autres de la paroisse de Connée ». Ceux-ci la conduisaient à un but indiqué, mais avant la bataille, défense était faite « par les officiers, de par Monseigneur, que nully ne blasphémast le nom de Dieu ny des saints, ne frappast, ne boutast l'un l'autre par malice, sous peine de 60 sols d'amende et de prinson. » Un autre, « pour sa part de bourgeoisie de la ville d'Orthe, (devait) deux lés de drap de couverture pour les chevaux malades ».
↑Les revenus comprenaient une dîme de 300 ₶, un bordage de 40 écus, une rente de 16 boisseaux de seigle.
↑Parmi les chapelains : Macé de Lescorcière, augmentateur de la chapelle, 1451 ; Jean de Faudoas, fils de Jean de Faudoa, tonsuré à Condom, 1598, chapelain de Saint-Yves à la Trinité de Laval et curé de Saint-Aubin-Fosse-Louvain, 1617 ; Claude de la Borde, 1664 ; Charles Tallement, curé de Saint-Georges-du-Bois, 1728 ; Cahouet, curé de Chartrettes, près Melun, 1780.
↑Il payait 3 000 ₶ de ferme pour « la forge, le fourneau à fer, le bocambre, la fenderie, le cours d'eau, les halles à charbon, les maisons des forgerons, le pré Doué et 60 arpens de bois de 18 ans. »
↑3 500 quintaux de fonte et 2 500 quintaux de fer, mais, ajoute-t-on, « la possibilité et les moyens d'augmenter la fabrication seroient peu avantageux à cause de la difficulté des débouchés. »
↑Les bois dépendant de la forge en 1825 comprenaient : Courtaliéru, 110 hect. ; Basset, 58 hect. ; la Monnaie, 65 hect. ; Izé, 122 hect. ; Cordouan, 4 hect. ; Clairet, 33 hect. ; Mirebeau et la Lande du Chardonnet (Bais), 54 hect. ; le Grand et le Petit-Bréhon, 30 hect., et 23 hect. dans la forêt de Pail.
Ambroise Ledru, Eugène Vallée, La Maison de Faudoas, Gascogne, Maine et Normandie A. Lemerre (Paris). 1907-1908 Voir en ligne
La métallurgie du Maine : de l'âge du fer au milieu du XXe siècle / ss la dir. scientifique de Jean-François Belhoste et Evelyne Robineau.-Monum : éd. du Patrimoine, 2003