Une force d'inertie, ou inertielle, ou force fictive[1], ou pseudo-force est une force apparente qui agit sur les masses lorsqu'elles sont observées à partir d'un référentiel non inertiel, autrement dit depuis un point de vue en mouvement accéléré (en translation ou en rotation). La force d'inertie est donc une résistance opposée au mouvement par un corps, grâce à sa masse.
L'équation fondamentale de la dynamique, dans la formulation initiale donnée par Newton, est valable uniquement dans des référentiels inertiels (dits aussi galiléens). La notion de force d'inertie permet de généraliser cette équation aux référentiels non inertiels, et donc de décrire la dynamique dans ces référentiels. Les forces d'inertie sont dites fictives car elles ne découlent pas d'interactions entre objets, mais sont seulement la conséquence d'un choix de référentiel. Les forces d'inertie n'existent pas dans les référentiels galiléens.
La figure ci-contre illustre le cas d'une voiture qui accélère en ligne droite. On peut comparer le point de vue d'un piéton, supposé galiléen, qui observe depuis le trottoir, à celui de l'automobiliste :
du point de vue du piéton (figure d'en haut), le frottement statique des roues sur la chaussée imprime au véhicule une accélération a. La force en question vaut (m+M)a, où M et m sont les masses respectives de la voiture et de son conducteur ;
la figure du milieu représente le même point de vue, mais en considérant séparément la voiture, le siège (supposé de masse négligeable) et le conducteur. Ce dernier est accéléré par une force ma en provenance du siège, alors que la voiture reçoit une force (m+M)a de la chaussée et −ma du siège ;
la figure du bas représente le point de vue non galiléen du conducteur. Celui-ci ressent une force d'inertie −ma qui le plaque vers l'arrière, ainsi que la réaction +ma de son siège qui le retient. La résultante est nulle et le conducteur est au repos dans son propre référentiel. La voiture subit la force d'inertie −Ma, l'action du siège −ma et l'action de la chaussée (m+M)a : la résultante est encore nulle et elle reste au repos.
Dans les deux cas, les forces d'interaction chaussée/voiture, voiture/siège et siège/conducteur sont les mêmes : ce sont les « vraies » forces, indépendantes du référentiel. On peut remarquer que les forces d'inertie servent ici à équilibrer ces forces afin de maintenir l'automobiliste et sa voiture au repos dans leur propre référentiel.
Définition simple
La force d'inertie, pour la plupart des dictionnaires, est la résistance des corps au mouvement, résistance proportionnelle à leur masse.
Formalisation
Soit (R) un référentiel galiléen centré en 0, et (R') un référentiel non galiléen centré en A, dont la rotation (instantanée) autour de (R) est donnée par le vecteur . Soit un point M mobile de masse m subissant des forces de résultante . Soit la vitesse relative de M dans (R').
La force est appelée force d'inertie de Coriolis, et son expression développée est :
Quelques cas d'application simples
Référentiel en accélération constante dans un référentiel galiléen
Supposons que (R') subisse une accélération constante dans (R).
(R') est donc animé d'un mouvement linéaire uniformément accéléré dans (R).
Dans (R'), il faut ajouter la force d'inertie d'entrainement qui vaut alors simplement :
C'est ce qui se passe par exemple dans une voiture en ligne droite : la force d'inertie s'oppose à l'accélération de la voiture.
Référentiel en rotation uniforme
Dans un manège tournant à la vitesse angulaire , nous avons tendance à nous éloigner du centre de rotation noté A ; cela est dû à la force d'inertie d'entrainement qui vaut alors :
Cette force est encore appelée force centrifuge (ou axifuge) car elle a tendance à éloigner un objet de l'axe de rotation.
Pourquoi ces forces sont-elles parfois considérées comme fictives ?
Dans une première approche de la mécanique newtonienne, on peut définir le mot force de la manière suivante. Une force :
Comme une force d'inertie ne respecte ni l'une ni l'autre de ces conditions, elles peuvent parfois être considérées comme des forces fictives ou pseudo-forces. Il faut toutefois noter les éléments suivants :
les interactions électromagnétiques ne respectent pas le principe des actions réciproques dès que l'on ne se place plus dans le cadre de la statique ;
la force de gravitation est de même nature que les forces d'inertie. Il n'est donc pas possible de distinguer expérimentalement dans le poids d'un objet la composante due à la gravitation (considérée comme une force réelle) et la composante due à la rotation de la Terre (considérée comme une force fictive).
La notion de force d'inertie apparaît en relativité générale[5],[6]. Les forces d'inertie sont toujours proportionnelles à la masse de l'objet sur lequel elles agissent, ce qui est aussi le cas de la gravité. Ceci a conduit Albert Einstein à se demander si la gravitation était aussi une force d'inertie. Il remarque qu'un observateur en chute libre dans une pièce fermée ne ressent pas la gravité, et peut se croire dans un référentiel inertiel (c'est le principe d'équivalence). Ceci a conduit Einstein à formuler une théorie où la gravitation est une pseudo-force due à la courbure de l'espace-temps. Cette idée est le fondement de la relativité générale.
Notes et références
↑ a et bDictionnaire de physique. Richard Taillet, Loïc Villain, Pascal Febvre. 2e édition. De Boeck, 2009, page 235.
↑(en) Hans Stephani, Relativity : An Introduction to Special and General Relativity, Cambridge UK, Cambridge University Press, , 396 p. (ISBN0-521-01069-1, lire en ligne), p. 105