La revue MELUS écrit que l’histoire de la vie d’Etel Adnan est faite de déplacement et d’aliénation (« a study in displacement and alienation »).
Née à Beyrouth[4] d’une mère grecque chrétienne et d’un père syrien musulman, elle a grandi en parlant le grec et le turc dans une société primordialement arabophone[5]. Elle fut élevée dans l’école d’un couvent français, et c’est ainsi que le français devient la langue d’écriture de ses premiers travaux littéraires. Elle étudie l’anglais dès sa jeunesse et la plupart de ses derniers écrits ont été rédigés principalement dans cette langue.
Âgée de 24 ans, Adnan voyage à Paris, où elle retrouve son ami artiste de Beyrouth Joseph Terdjan, et où elle finit ses études de philosophie à la Sorbonne. Quelque temps après, elle part aux États-Unis où elle continue ses études supérieures à l’université de Californie à Berkeley et à l’université Harvard.
Elle enseigne la philosophie de l’art à l’Université dominicaine de Californie à San Rafael de 1958 à 1972, et elle donne des conférences dans plusieurs universités des États-Unis. En 2020, le Griffin Poetry Prize[6] est décerné à son livre Time.
Etel Adnan est l’auteure de nombreux ouvrages poétiques, essais, romans, et elle a dirigé les pages culturelles du quotidien francophone libanais As-Safa[7].
Prise entre plusieurs langues dans sa jeunesse, Adnan retrouve sa voix primaire dans la peinture[8] plutôt que dans l’écriture. En 1996, elle se rappelle :
« L’art abstrait c’était l’équivalent à l’expression poétique ; je n’ai pas éprouvé le besoin de me servir des mots, mais plutôt des couleurs et des lignes. Je n’ai pas eu le besoin d’appartenir à une culture orientée vers le langage mais plutôt à une forme ouverte d’expression. »
« Je n’avais plus besoin d’écrire en français, j’allais peindre en arabe »[9], écrit-elle encore sur l’époque où elle commence à peindre en Californie.
Mais ce n’est qu’au début des années 2010 que le monde de l’art la découvre plasticienne. À plus de 80 ans, elle commence subitement à exposer dans des institutions prestigieuses : au Guggenheim de New York, au Mudam à Luxembourg, au Centre Paul-Klee à Berne, à la Fondation Luma à Arles, à documenta 13 à Cassel... Son œuvre figurative et naïve où elle mêle écriture et peinture est sans doute plus dans l’air du temps que dans les années 1970, dans lesquelles cette inspiration pouvait passer pour « réactionnaire ». Sa « découverte » fait aussi partie d’une considération désormais affirmée pour les femmes peintres[7]. Elle meurt alors que l’exposition Écrire, c’est dessiner, qu’elle a en grande partie inspirée, vient à peine de s’ouvrir au Centre Pompidou-Metz (6 novembre 2021 au 21 février 2022). Ses œuvres y voisinent celles de Pierre Alechinsky, Louise Bourgeois ou Jacques Villeglé ainsi que des pages autographes d'Arthur Rimbaud, Victor Hugo ou Antonin Artaud[7],[10].
Revenue en France, Etel Adnan habitait Paris et Erquy. Elle vivait depuis les années 1980 avec l’artiste Simone Fattal[11],[12],[13].
Publications
En français
L'Indien jamais n'a eu de cheval, Galerie Lelong, 2022
La Beauté de la lumière, entretiens avec Laure Adler, Seuil, 2022
Le Destin va ramener les étés sombres, Seuil, 2022
Déplacer le silence, Éditions de l'Attente, 2022
Le Maître venu de l'Ouest, L'Échoppe, 2021
Fil du temps, Galerie Lelong, 2021
Je suis un volcan, Galerie Lelong, 2021
L'Express Beyrouth-Enfer, Galerie Lelong, 2021
L'Apocalypse arabe, Galerie Lelong, 2021
Voyage, guerre, exil, L'Échoppe, 2020
Un printemps inattendu (entretiens), Galerie Lelong, 2020
Grandir et devenir poète au Liban, L'Échoppe, 2019
الست ماري روز as-Sitt Mari Ruz (Sitt Marie Rose), avec Jirum Shahin et Firyal Jabburi Ghazul. Al-Qahirah: al-Hayah al-Ammah li-Qusur al-Thaqafah, 2000
n mudun walnisāʼ: rasaʼil ilā Fawwāz (Of Cities and Women : Letters to Fawwaz.) Bayrut: Dar al-Hihar, 1998
كتاب ألبحر كتاب ألليل كتاب ألموت كتاب ألنهايه Kitab al-bahr; kitab al-layal; kitab al-mawt; kitab an-nihayah (Le livre de la mer, le livre de la nuit, le livre de la mort, le livre de la fin), avec Abid Azarih. Bayrut: Dar Amwaj, 1994
as-Sitt Marie Ruz. Bayrut: al-Mu-assasah al-Arabiyah lil-Dirasat wa al-Nashr, 1979
Critique littéraire
Amireh, Amal; "Bearing Witness: The Politics of Form in Etel Adnan's Sitt Marie Rose." Critique: Critical Middle Eastern Studies, 2005 Fall; 14 (3): 251-63 (journal article)
Amyuni, Mona Takieddine. "Etel Adnan & Hoda Barakat: De-Centered Perspectives, Subversive Voices." IN: Poetry's Voice-Society's Norms: Forms of Interaction between Middle Eastern Writers and Their Societies. Ed. Andreas Pflitsch and Barbara Winckler. Wiesbaden, Germany: Reichert; 2006, p. 211–21
Cassidy, Madeline. "'Love Is a Supreme Violence': The Deconstruction of Gendered Space in Etel Atnan's Sitt Marie Rose." IN: Violence, Silence, and Anger: Women's Writing as Transgression. Ed. Deirdre Lashgari. Charlottesville: UP of Virginia; 1995. p. 282–90
Champagne, John G. "Among Good Christian Peoples: Teaching Etel Adnan's Sitt Marie Rose." College Literature, 2000 Fall; 27 (3): 47-70
Fernea, Elizabeth. "The Case of Sitt Marie Rose: An Ethnographic Novel from the Modern Middle East." IN: Literature and Anthropology. Ed. Philip Dennis and Wendell Aycock. Lubbock: Texas Tech UP; 1989. p. 153–164
Foster, Thomas. "Circles of Oppression, Circles of Repression: Etel Adnan's Sitt Marie Rose." PMLA: Publications of the Modern Language Association of America, 1995 Jan; 110 (1): 59-74
Ghandour, Sabah. "Gender, Postcolonial Subject, and the Lebanese Civil War in Sitt Marie Rose." in: The Postcolonial Crescent: Islam's Impact on Contemporary Literature. Ed. John C. Hawley. New York, NY: Peter Lang; 1998, p. 155–65
Hajjar, Jacqueline A. "Death, Gangrene of the Soul, in Sitt Marie Rose by Etel Adnan." Revue Celfan/Celfan Review, 1988 May; 7 (3): 27-33
Hartman, Michelle. "'This Sweet/Sweet Music': Jazz, Sam Cooke, and Reading Arab American Literary Identities." MELUS: The Journal of the Society for the Study of the Multi-Ethnic Literature of the United States, 2006 Winter; 31 (4): 145-65
Karnoub, Elisabeth. "'Une Humanité qui ne cesse de crucifier le Christ': Réécriture du sacrifice christique dans Sitt Marie Rose de Etel Adnan." IN: Victims and Victimization in French and Francophone Literature. Ed. Buford Norman. Amsterdam, Netherlands: Rodopi; 2005. p. 59–71
Kilpatrick, Hilary. "Interview with Etel Adnan (Lebanon)." IN: Unheard Words: Women and Literature in Africa, the Arab World, Asia, the Caribbean and Latin America. Ed. Mineke Schipper. Trans. Barbara Potter Fasting. London: Allison & Busby; 1985. p. 114–120
Layoun, Mary N. "Translation, Cultural Transgression and Tribute, and Leaden Feet." IN: Between Languages and Cultures: Translation and Cross-Cultural Texts. Ed. Anuradha Dingwaney and Carol Maier. Pittsburgh, PA: U of Pittsburgh P; 1995. p. 267–89
Marie, Elisabeth Anne. Sacrifice, sacrifée, sacrificatrice: L'étrange triptyque: Sacrifices au féminin dans trois romans francophones libanais. Dissertation Abstracts International, Section A: The Humanities and Social Sciences, 2003 May; 63 (11): 3961. U of North Carolina, Chapel Hill, 2002.
Mejcher-Atassi, Sonja. "Breaking the Silence: Etel Adnan's Sitt Marie Rose and The Arab Apocalypse." IN: Poetry's Voice-Society's Norms: Forms of Interaction between Middle Eastern Writers and Their Societies. Ed. Andreas Pflitsch and Barbara Winckler. Wiesbaden, Germany: Reichert; 2006. p. 201–10
Shoaib, Mahwash. "Surpassing Borders and 'Folded Maps': Etel Adnan's Location in There." Studies in the Humanities, 2003 June-Dec; 30 (1-2): 21-28
Willis, Mary-Angela. "Francophone Literature of the Middle East by Women: Breaking the Walls of Silence." IN: Francophone Post-Colonial Cultures: Critical Essays. Ed. Kamal Salhi. Lanham, MD: Lexington; 2003, p. 64–74
Willis, Mary-Angela. La Guerre démasquée à travers la voix féminine dans Sitt Marie Rose d'Etel Adnan et Coquelicot du massacre d'Evelyne Accad.Dissertation Abstracts International, Section A: The Humanities and Social Sciences, 2002 Mar; 62 (9): 3061. U of Alabama, 2001
Expositions
2022 Découverte de l’immédiat, Galerie Lelong & Co, Paris et New York
2021 new works, Galerie Sfeir-Semler, Hambourg, Allemagne[15]
2021 Tras la línea del horizonte, Centro de Creación Contemporánea de Andalucía, Cordoba, Espagne
↑« Exposition : Etel Adnan dialogue en couleurs avec sa compagne », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
↑Voir aussi : Il n'y a pas de grenouilles, poème de Ce ciel qui n'est pas traduit en espagnol par Carlos Alvarado-Larroucau, traducteur (à l'espagnol) de l'œuvre poétique d'Etel Adnan.
Jean Frémon, Etel Adnan, être là. Galerie Lelong, 2015.
Nayla Tamraz, On Marginalisation, Activism and Feminism, dialogue with Etel Adnan, Lamia Joreige and Tagreed Darghouth, in Selections, No. 42, September 2017, p. 48-61.