Emmanuela PotockaEmmanuela Potocka Portrait d'Emmanuela Potocka par Nadar.
Emmanuela Potocka, née Emmanuela Maria Carolina Pignatelli di Cerchiara à Naples (Deux-Siciles) le et morte à Boulogne-Billancourt (France) le , est une salonnière française d'origine italienne. BiographieSon père, le prince Fabrizio Pignatelli di Cerchiara[1] et sa mère, Rosa Capomazza[2] se marient à Naples le 2 janvier 1850. Emmanuela a une sœur aînée, la princesse Gaetana Pignatelli di Cerchiara[3] Sa mère se remarie à Naples le 5 octobre 1856 à son oncle, le duc Capece Galeota della Regina[4] qui était à Saint-Pétersbourg le jour de son propre mariage[5]. La jeune Emmanuela épouse à Londres, le , le comte polonais Félix-Nicolas Potocki[6] qui possède une grande fortune, et se fait naturaliser français en 1905. Selon le comte de Vaux, ami de Maupassant, Nicolas Potocki « est un des sportsmen les plus distingués de la colonie étrangère de Paris. On le rencontre partout où se montre le monde élégant : c'est un des étrangers le plus parisien de Paris. Homme d'une grande distinction, d'une fortune considérable, le comte Potocki appartient aux traditions de la haute vie »[7]. Guy de Maupassant est présenté à la comtesse Potocka en 1882 par son ami Georges Legrand. Il entre alors dans le monde aristocratique[7]. La comtesse recevait alors dans son hôtel du 35, avenue de Friedland une cour de jeunes gens et prétendants qui se livraient pour elle à diverses démonstrations d’allégeance. Au rang des privilégiés de cette fraternité (ou morts d'amour pour elle) connue sous le nom de « Macchabées », se trouvaient Jacques-Émile Blanche, Jean Béraud, Paul Bourget, Albert Cahen, Elme-Marie Caro, Charles Ephrussi, Jean-Louis Forain, Henri Gervex, le duc de Luynes, Frédéric Mistral, Guy de Maupassant, Robert de Montesquiou, Samuel Pozzi, Gustave Schlumberger et Charles-Marie Widor. La comtesse était en effet, l'instigatrice d'un dîner scandaleux qui avait lieu tous les vendredis (avec vaisselle de vermeil, verres de cristal, buissons de roses et domestiques en livrée)[7] culte particulier de l'Amour, le « dîner des Macchabées »[8] Chaque convive devait y jouer le rôle d'un mort d'amour, c'est-à-dire mort d'épuisement pour s'être trop adonné aux ébats amoureux[9],[10]. Les lauréats recevaient une « breloque » bijou emblématique qui portait la devise « Qui m'aime, me suive » qui impliquait un engagement des « pourceaux »[7]. Parfois, cela se terminait en bacchanale[11]. La comtesse fit tant souffrir Maupassant par ses sarcasmes, qu'il la quitta pour aller chez Marie Kann, qui tenait salon aussi[12]. Les époux Potocki vivaient chacun leur vie de leur côté, le comte allant à la chasse et Emmanuela tenant son salon. La comtesse abandonna le domicile conjugal en décembre 1887, pour vivre chez sa mère, la duchesse Rosa, 14 bis rue de Chateaubriand. Les époux Potocki ne divorcèrent jamais, mais il y eut bien une séparation de corps et de biens qui fut prononcée le 17 juillet 1901[13]. La comtesse déménagea alors au 41 rue Théophile Gautier, dans le 16e. Elle décéda à Boulogne-Billancourt le 18 décembre 1930 et fut enterrée au cimetière du Père-Lachaise[14]. Elme Caro a laissé de la comtesse ce portrait :
Jacques-Émile Blanche a laissé également cette description : « Le regard d'Emmanuela était tout, dans un visage poli comme une pomme. Sans fard, sans poudre, en bandeaux lisses, elle laissait derrière elle un sillage de Shaws Caprice, parfum inventé pour elle par Guerlain. Une cravate de gaze nouée sous le menton et un rang de perles étaient sa seule parure. On ne l'avait vue décolletée. Le soir, ni tiare, ni croissant de diamants. Poitrine plate, sur une taille épaisse, le corps court et hommasse, main aux doigts carrés au bout. [...] Sa mise modeste quoique d'une élégance unique, tranchait singulièrement sur les falbalas à la mode. »[15],[16]. Jacques-Émile Blanche la peindra sous les traits de la princesse Lucia Pegloso, dans son roman Aymeris[17]. Elle est aussi la Duchesse Bleue de Paul Bourget[18]. Marcel Proust dans « Le Salon de la comtesse Potocka », texte publié sous le pseudonyme d'Horatio dans le Figaro du [19] décrit la comtesse dans son salon à Auteuil, où elle s'est installée en 1901 depuis sa séparation d'avec le comte Potocki. Proust dessine un portrait flatteur de la maîtresse de maison, « bien séduisante avec sa beauté antique, sa majesté romaine, sa grâce florentine, sa politesse française et son esprit parisien ». La comtesse dans son « exil affectif » est « entourée des pauvres chiens boiteux qu'elle recueille », lesquels « faisaient trop de bruit à Paris et gênaient les voisins »[20],[21]Marcel Proust aurait trouvé en elle les traits de la duchesse de Guermantes. Jean Béraud auteur de « tableaux familiers de la vie parisienne, exécutés avec beaucoup de verve et d'imagination »[22] primé aux Salons de 1882 et 1887 a peint en 1887, le salon de la comtesse. Le tableau la représente dans son hôtel de l'avenue de Friedland, seule femme entourée de figures masculines. Jean Béraud s'est représenté parmi Gervex, Detaille. Au centre de la composition trône un chien[23]. Maupassant a composé un poème sur un éventail[24], qu'il lui offrit : À Madame la comtesse Potocka — Guy de Maupassant Maupassant et la comtesse entretinrent des liens étroits, et jusqu'au bout, l'écrivain lui adressa des lettres où il contait ses heurs et malheurs[7]. Emmanuela Potocka dans la littératureLa comtesse apparait sous les traits de Christiane Andermatt dans Mont-Oriol, et dans Notre cœur sous les traits de la baronne de Frémines. La nouvelle Miss Harriet est dédiée « à Madame… », mais sur le manuscrit qui servit à l’impression initiale de la nouvelle il est écrit « À madame la comtesse Potocka / hommage d’un ami dévoué / Guy de Maupassant »[25]. Bibliographie
Notes et références
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