Affaire Xavier Philippe

Affaire Philippe
Titre Affaire Xavier Philippe
Fait reproché Homicide
Chefs d'accusation Assassinat
Pays Drapeau de la France France
Nombre de victimes 1 : Christophe Belle
Jugement
Statut Affaire jugée

L'affaire Xavier Philippe est une affaire criminelle française dans laquelle Xavier Philippe a tué et est soupçonné d'avoir tenté de tuer ses associés.

Xavier Philippe est accusé d'avoir assassiné son associé, pâtissier dans le Marais, à Paris. La police le soupçonne d'avoir tenté auparavant de se débarrasser d'autres partenaires en affaires.

Biographie

Derrière les apparences d'un homme brun à lunettes en gilet de costume, chemise blanche, cravate, alternant sans relâche formules de courtoisie et tirades interminables sur son innocence, apparaît un quinquagénaire volubile, manipulateur, au passé sulfureux.

Dès son plus jeune âge, il semble jaloux de son frère jumeau Bertrand.

Titulaire d'un certificat d'aptitude professionnelle en carrosserie et fondateur d'un club de karaté de quelques centaines de membres, Philippe entreprendra de se lancer dans le commerce de la fourrure, parallèlement à la gestion d'un restaurant-discothèque, située sur une péniche à Orléans dans le Loiret, ville dans laquelle il a grandi.

Ces affaires sont très semblables à celles de son frère jumeau, ainsi que de Tony Gomez. Ce dernier affirma : « Dès qu'on avait quelque chose, il voulait nous singer ».

En 1982, Xavier Philippe incendie la boîte orléanaise de son frère et de son associé. En 1989, leur mère organise une réconciliation et les trois s'associent pour le Banana Café.

Plus tard, il se retrouve devant la justice à la suite de tirs sur des jeunes d'une autre boîte de nuit de la ville. Xavier effectue un passage en prison.

Amateur d'armes anciennes, il part créer une entreprise de transport à Paris, avant d'être à nouveau incarcéré pour vol de remorque et port d'armes prohibées.

Il devient gérant d'une boulangerie-pâtisserie, s'associant avec Christophe Belle. Ils ouvrent « l'Avion Délices » dans le quartier du Marais, à Paris.

L'histoire de l'Avion Délices intrigue. Outre un passé marqué par de nombreuses violences et malversations, Xavier Philippe acquiert la réputation de tueur en série d'associés[1].

Un profil psychologique particulier

Xavier Philippe a un profil tout à fait particulier difficile à catégoriser. Il a plus l'allure d'un informaticien ou d'un étudiant que d'un homme de 51 ans capable de tuer.

Enfant, il grandit à Orléans. Il illustre, durant son procès, son adolescence ainsi : « Je faisais tout en même temps. J'ai toujours eu la bosse du commerce. Quand j'avais 14 ans, j'achetais des mobylettes, je les remontais et je les revendais. J'ai toujours aimé la transaction et la négociation ».

Adulte, ses choix de carrière atypiques se retrouvent dans son apparence physique dégradée : une voix rauque engendrée par un écrasement du thorax à la suite d'un accident d'avion, un visage inexpressif et de terribles brûlures causées par sa tentative de suicide, où il avait tenté de s'immoler par le feu.

Enfin, l'homme a des passions tout aussi étranges ; il est féru de pilotage mais surtout d'armes « anciennes, napoléoniennes », comme il l'a rappelé durant son procès.

Un homme refusant sa culpabilité

Le procureur général chargé de l'affaire avait qualifié l'accusé « d'homme qui n'a aucune limite, aucun sens moral »

A contrario, Xavier Philippe avait déclaré pendant son procès : « Je me considère honnête. Je ne volerais pas un ami ou un associé ».

Après sa condamnation, Xavier Philippe a confirmé qu'il ne se considérait pas coupable : « C'est pas moi. Vous faites erreur. Vous me condamnez à mort »[2].

Les faits

1998, l'agression de Tony Gomez

Tony Gomez fut le compagnon de Bertrand Philippe, le frère de Xavier Philippe, pendant plus de vingt ans. Comme Xavier Philippe faisait énormément de bêtises, qui le conduisent en prison, sa mère supplia son autre fils et le compagnon de celui-ci de s'en occuper. C'est pour cela qu'ils s'associèrent avec Xavier Philippe pour fonder une boîte de nuit gay, le Banana Café, en 1989, dans le quartier des Halles.

Bertrand Philippe meurt en 1995, son frère est convaincu que sa mort est la faute de Tony Gomez. Il commandite son agression en 1998.

En 1998, le compagnon du gérant du célèbre « Banana café » Tony Gomez, rentre chez eux, un homme l'attend armé d'une carabine, lui tire dans le bras. La victime réussit à s'enfuir. Le tireur est arrêté. L'enquête a révélé que le tireur, un chauffeur-routier d'Orléans, avait discuté six fois au téléphone avec Xavier Philippe la nuit de l'agression[3].Il dit avoir agi sur ordre. Xavier Philippe est, au moment des faits, le directeur financier du « Banana café ».

Tony Gomez, victime de Xavier Philippe

Tony Gomez est auditionné, il est persuadé que Xavier Philippe est l'organisateur de cette agression. Il s'est directement senti visé : il avait vu Xavier Philippe voler dans la caisse du café, il avait découvert l'existence d'un contrat d'assurance-vie souscrit en son nom au profit de la mère de Xavier Philippe[4]. Il l'a soupçonné aussitôt[5].

2005, l'affaire Christophe Belle

Le 29 novembre 2005, Xavier Philippe est accusé d'avoir tué son associé Christophe Belle, 40 ans, avec lequel il tenait une pâtisserie dans le Marais à Paris nommée « L'Avion Délice ». Le lendemain de la disparition de son associé, Xavier Philippe a lancé l'alerte. L'associé de Xavier Philippe a été retrouvé assassiné le 17 mai 2005 dans un bois de Sucy-en-Brie, dans le Val-de-Marne. Après la mort de Christophe Belle, les enquêteurs ont découvert divers contrats d'assurance-vie souscrits par ce dernier au bénéfice de Xavier Philippe. Il est alors surnommé le « tueur en série d'associés »[6].

L'enquête

Le 17 mai 2005, un homme est retrouvé mort dans le sous-bois de la commune de Sucy-en-Brie, la police nationale observe trois orifices à la tête causés par balle.

La police criminelle de Paris est saisie de l'enquête. Sur les lieux du crime, les enquêteurs retrouvent un sachet de poudre blanchâtre près de la victime, qui, après analyse, se révèlera être de la cocaïne. Les premiers indices sur place laissent envisager un règlement de comptes sur fond de trafic de stupéfiants.

Dans la veste du défunt, ses papiers d'identité sont retrouvés : il s'agit de Christophe Belle, pâtissier reconnu de Paris.

En investiguant sur ses habitudes ainsi que sa vie de famille, les enquêteurs éliminent rapidement la piste de trafic de stupéfiants qui aurait mal tourné. Se dessine le portrait d'un homme à la vie simple, ses activités de pâtissier sont amplement suffisantes pour le faire vivre. Des analyses toxicologiques démontrent qu'il n'est pas consommateur de cocaïne, ni d'aucune autre drogue.

Les policiers envisagent une mise en scène du meurtre de Christophe Belle.

Les investigateurs entendent tous ses proches ainsi que le personnel de la boulangerie, dont son associé, Xavier Philippe. Tous font mention de nombreux faits dont était victime Christophe Belle ces derniers temps : des appels menaçants, des dégradations mineures à la boulangerie. Et tous accusent le rival de Christophe, un certain M.F. qui, depuis quelques années, est en conflit commercial avec lui.

Les policiers découvrent qu'il est domicilié dans la commune où le corps a été retrouvé, et proche du sous-bois. Il est arrêté, mais a un alibi : depuis près de quatre ans, il n'habite plus la commune (inexécution du changement d'adresse), et le soir du crime, il était en Normandie.

Les policiers de la section criminelle ont le sentiment d'une manipulation, d'une scène de crime mise en scène.

Le 24 mai 2005, une information judiciaire contre X est ouverte pour assassinat.

Un soupçon

Peu de temps après, l'associé du boulanger, Xavier Philippe, se présente aux investigateurs. Il les informe que la nuit du crime, il a reçu un message de la victime « j'arrive dans 5 ou 10 minutes tard dans la nuit » (proche de l'heure du crime). Il se justifie en  affirmant qu'il s'agissait d'une erreur de manipulation de Christophe Belle. Les policiers analysent le téléphone de la victime, et observent qu'il ne peut y avoir d'erreur de manipulation.

Un mois plus tard, la femme de Belle alerte la police : elle a découvert un contrat d'assurance-vie de son mari dont le bénéficiaire était Xavier Philippe.

Cet associé devient de plus en plus suspect ; d'après le personnel de la boulangerie, il est connu pour « piquer dans la caisse », un écart important sépare les recettes des achats de marchandises, un détournement de milliers d'euros par an est mis en évidence.

L'étau se resserre

L'enquête sur Xavier Philippe remet à jour ses antécédents judiciaires, son profil instable, de nombreux soupçons d'escroquerie d'assurances, et surtout, la tentative d'assassinat de 1998 contre Tony Gomez.

Cette affaire étant toujours en instruction à ce moment et les policiers y observant de nombreux points communs, ils lancent un procès-verbal de rapprochement le 28 novembre 2005.

Le lendemain, Xavier Philippe est arrêté pour l'assassinat de Christophe Belle et mis en examen.

L'affaire de confession nocturne

Le 7 décembre 2005, son ex-femme est entendue. Elle déclare que, quelques années auparavant, en novembre 1988, ce dernier est rentré plus tard qu'à son habitude. Il lui aurait confié avoir tué Pascal Le Roy, dans le but d'éviter la prison. Pascal Le Roy est un ancien associé, porté disparu depuis. Il l'aurait mise en garde contre le fait d'aller voir la police et l'aurait même menacée[1]. Ce qui ajoute un nouvel élément avant le procès de Xavier Philippe[7].

La procédure

En 2008, le procès de Xavier Philippe s'ouvre à la Cour d'Assises du Val de Marne. La Cour a examiné l'affaire et le parcours de l'accusé pendant deux longues semaines. Durant le procès, Tony Gomez, son ex-associé et patron de boîtes de nuit, est auditionné. Il déclare, à propos de l'accusé : « Il n'a jamais eu de règles, il ose tout car il ne fait pas la différence entre ce qui est permis ou non[5]. » Il ne cache pas le mal qu'il pense de lui ; il est persuadé de la culpabilité de son ancien associé dans l'affaire de l'agression de 1998. Tony Gomez est convaincu qu'il était visé. Il décide de porter plainte contre Xavier Philippe.

Lors de sa plaidoirie, Philippe Sarda, l'avocat de Xavier Philippe, déclare : « Nous allons mettre l'accent sur les nombreuses incohérences de cette affaire et essayer de prouver qu'il s'agissait d'une mise en scène qui, in fine, a profité à Tony Gomez[5]. »

Xavier Philippe est condamné à 30 ans de réclusion criminelle.

L'avocat de Xavier Philippe interjette l'appel, mais la peine de 30 ans est confirmée en appel en juin 2010[5].

Une lettre douteuse est venue troubler le procès. D'après les enquêteurs, cette lettre non signée a été envoyée par Xavier Philippe à un témoin de l'assassinat de Christophe Belle. Dans cette lettre, il était écrit : « Tu corriges ta déclaration. Alain Samycia ne connaît pas Xavier, c'est tout. » Alain Samycia était l'un des suspects dans la tentative d'homicide contre Tony Gomez en 1998 ; plus précisément, l'homme qu'aurait payé Xavier Philippe pour tuer Tony Gomez.

Le 23 mars 2011, Xavier Philippe et son avocat ont saisi la 10e chambre du Tribunal correctionnel de Paris d'une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) sur le fondement de l'article 6 de la CEDH : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement, et dans un délai raisonnable »[8]. Son avocat met en avant le fait que les faits reprochés à son client, Xavier Philippe, remontent au 28 avril 1998. De plus, il dénonce « une durée extraordinaire, au regard d'une affaire en fait pas si complexe », et tente de sensibiliser le jury sur la peine des proches de Christophe Belle, la victime. L'avocat général rétorque que le condamné est un individu « machiavélique », « calculateur », « un homme n'ayant aucune limite, aucun sens moral », « d'une avidité et d'un appétit sans fin ».

La QPC est rejetée et Xavier Philippe reste condamné à 30 ans de réclusion criminelle.

En juillet 2012, Xavier Philippe écope de 4 ans de prison supplémentaires pour avoir organisé la tentative de meurtre de Tony Gomez[3].

Le 12 juin 2013, la cour d'appel de Paris relaxe Xavier Philippe des faits de violences aggravées sur la personne de Grégory Colombe dans l'affaire Tony Gomez.

Xavier Philippe se pourvoie en cassation, mais la Cour de cassation rejette sa demande et la peine de 30 ans devient donc définitive[9].

Notes et références

  1. a et b « Ceux qui ont approché Xavier Philippe ont eu leur vie anéantie », Libération,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. Brendan Kemmet, « La vie très mouvementée de Xavier Philippe », Le Parisien,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. a et b « Faites entrer l'accusé : qui est Xavier Philippe, le tueur en série d'associés ? », sur www.terrafemina.com (consulté le )
  4. «Je l'aimais comme un frère», sur Libération.fr, (consulté le )
  5. a b c et d « Les sombres affaires du Banana Café en justice », Le Figaro,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. « Drôle d'associé », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  7. « Faites entrer l'accusé - Xavier Philippe, associé de malheur » (consulté le )
  8. Bénédicte Lutaud, « Le procès de Xavier Philippe à nouveau reporté », sur Le Figaro.fr, (consulté le )
  9. Le Point magazine, « Assassinat d'un pâtissier à Paris : 30 ans de prison confirmés en appel », sur Le Point, (consulté le )

Documentaires télévisés

Émission radiophonique

Article connexe

 

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