Île-de-France (paquebot)
L’Île-de-France est un paquebot construit en 1927 par les Chantiers de Penhoët de Saint-Nazaire pour la Compagnie générale transatlantique. Il est détruit à Osaka en 1959 après avoir été utilisé pour le tournage du film Panique à bord. HistoireConstructionSa construction est décidée pour remplacer d'anciens paquebots de la Compagnie générale transatlantique : La Touraine et La Lorraine. Stéphanie Łazarska participe aux décorations de la nursery du paquebot[1] où elle utilise la technique du batik sur bois[2]. L’Île-de-France est mis sur cale le samedi . Il est lancé le dimanche aux chantiers de Penhoët de Saint-Nazaire. Début de carrièreLe paquebot est livré le et entame son voyage inaugural entre Le Havre et New York le , devenant pour un temps le plus beau paquebot de l’Atlantique. L’Île-De-France est surnommé aux États-Unis « The longest gangplank » (« la plus grande passerelle ») pendant la Prohibition, car l’alcool coule à profusion à son bord (il est interdit sur les paquebots américains) et permet d’être ainsi immédiatement en France, le pays du « bien vivre », bien avant l’arrivée à destination. À bord du paquebot, il règne l'atmosphère sans souci des années folles et de l’entre-deux-guerres. Le paquebot poursuit sa carrière sans incident jusqu’à la déclaration de guerre le . HydravionLe navire, via la Société transatlantique aérienne, possède un hydravion postal[3], un Lioré et Olivier H-198[4] avec un moteur Gnome-Jupiter de 420 chevaux. Celui-ci est catapulté, depuis une rampe de 20 mètres installée à l'arrière du navire, lorsque le navire se trouve à 500 nautiques des côtes[3]. Le courrier est ainsi acheminé avec une journée d'avance sur le paquebot. Ce service postal est inauguré le , sur la liaison Le Havre - New York[5]. Quelquefois, l'avion embarque également un passager[3]. Mais le catapultage est soumis aux conditions météo et l'hydravion n’est utilisé que quatre fois en 1928, huit fois en 1929 et douze fois en 1930[3]. Si le système fonctionne bien (ce système de catapultage d'hydravion, à air comprimé et poudre, équipera trois bâtiments de ligne, sept croiseurs lourds et dix croiseurs légers de la marine nationale[3]), il est finalement abandonné car la force des catapultages fatigue la structure du paquebot[3]. Pendant la guerreLe 2 septembre 1939 il part vers New-York. À la déclaration de guerre, il est rejoint par le paquebot Normandie au pier 88 de la Transat à New York. Au moment de l'invasion allemande de , le paquebot est en route pour l’Indochine et il se réfugie à Singapour où il est bloqué. Obéissant à Vichy, le commandant Fontaine et 172 membres de l'équipage sont, pendant l'été 40, rapatriés vers la France, seuls 41 autres membres de l'équipage, dont le second Jean Arnold[6] et le chef-mécanicien René Trény[7], restent à bord, se rallient aux Alliés et à la France Libre tout en maintenant le paquebot en état de naviguer. Le paquebot, réquisitionné par les Britanniques, le 8 novembre 1940, est converti en transport de troupes[8]. Pour son premier voyage comme transport de troupes, le navire quitte Singapour le pour aller embarquer des soldats australiens à Sydney qu'il transporte jusqu'à Suez[3]. Il fait ensuite plusieurs transports entre Suez, l’Afrique et les Indes. En , il part pour San Francisco puis retourne dans l’océan Indien. Il part ensuite pour l’Angleterre et passe sous la gérance de la Cunard Line qui y affecte un équipage en partie britannique[3]. Il repart pour New York pour une refonte importante et va alors servir jusqu'à la fin de la guerre pour acheminer des troupes canadiennes et américaines en Grande-Bretagne[3] en vue du débarquement allié. Pendant 4 ans, il transporte ainsi près d'un demi million de soldats et de personnels militaires. En février 1945, il convoie par exemple 855 Afro-Américaines du 6888th Central Postal Directory Battalion[9]. Cela lui vaut de recevoir la croix de guerre et d'être nommé chevalier du Mérite maritime. Il est remis à disposition de la France à Southampton, le . Reprise du service civilÀ la fin de son service de guerre, il prend la direction des chantiers qui l’ont vu naître. Il y arrive le et y subit une profonde refonte qui le modernise. Sa silhouette est entièrement transformée. Il perd ses trois « tuyaux » hauts et fins au profit de deux cheminées plus larges au dessin elliptique, le trait de coque avant est affiné en montrant une courbe pour séparer la peinture noire de la blanche. Ces modifications sont inspirées du dessin et des formes du paquebot Normandie. De plus, le mobilier de ce dernier est en partie récupéré par l’Île-De-France. Il reçoit également l’air conditionné, une nouvelle piscine au pont C et la capacité est réduite pour un meilleur confort, passant de 1 794 passagers à 1 345. Il est rejoint à Saint-Nazaire par le paquebot Liberté. L’Île-De-France démarre son second voyage inaugural vers New York le . Le « Saint-Bernard des mers »C’est une carrière exceptionnelle qui est marquée par de nombreux sauvetages dont celui particulièrement périlleux du cargo Greenville le et celui du paquebot italien Andrea Doria, éperonné par le paquebot Stockholm dans la nuit du 25 au . À l'issue du sauvetage de 753 des 1 706 passagers de l’Andrea Doria (contre 46 décédés), l’Île-de-France effectue une troisième remontée triomphale de l’Hudson accompagné par les remorqueurs, le moindre des bateaux présents ce jour-là, ainsi que de nombreux avions dans le ciel new-yorkais. Il était alors commandé par le capitaine au long cours Raoul de Beaudéan. Ce paquebot est le seul à avoir connu un tel privilège. Les nombreux et spectaculaires sauvetages réalisés par l’Île-de-France valent au navire le surnom de « Saint-Bernard des mers », en référence à cette race de chiens spécialistes du sauvetage, et de recevoir la croix de Chevalier du Mérite maritime et se voir décerner le Merchant Marine Gallant Ship Award, jusque-là attribué aux navires américains pendant la Seconde Guerre mondiale[10]. Le paquebot France commandé le par la Compagnie générale transatlantique est en cours de construction depuis le à Saint-Nazaire et met en évidence l'âge du paquebot Île-de-France tout comme celui du Liberté. Finalement, après de nombreuses traversées de l’océan Atlantique, l’Île-de-France effectue son dernier voyage transatlantique le .
Fin de vie et démantèlementL’Île-de-France est vendu par la Compagnie générale transatlantique à Yamamoto & Co d'Osaka le ; et c'est le qu'il quitte le port du Havre sous le nom de Furanzu Maru. Il arrive à Osaka le . La fin du paquebot provoque un scandale comparable à celui de la fin du paquebot France, car malgré une cérémonie Shinto tenue le pour célébrer l'âme du vaillant paquebot, il sert de cadre à un film hollywoodien Panique à bord (The Last Voyage). Pour les besoins du film, il est partiellement coulé en mer du Japon et pour des prises de vues saccagé à l'intérieur à l'explosif sous le nom de Claridon. À la fin du tournage, le navire est détruit. Design
Décoration intérieureL'Île-de-France innove en apportant pour sa décoration la première grande expression de l’art déco (on parle même d’« art déco paquebot »)[11]. Ce style sera repris sur L’Atlantique et sur le Normandie. L'artiste peintre Yvonne Jean-Haffen participa notamment à la décoration de ce navire, en compagnie de son ami et professeur, le peintre Mathurin Méheut qui y réalisa la décoration des appartements du commissaire principal de bord, ainsi que celle de la suite Fontainebleau. Le décorateur et créateur de mobilier Jacques-Émile Ruhlmann intervient dans plusieurs espaces du navire, particulièrement dans ceux dévolus aux Première classe. Dans l'une des grandes salles des premières classes, il livre un ensemble de sept grands vases de Sèvres en porcelaine blanche, placés le long des murs. Aujourd'hui détruits, ces vases ne sont connus que par une réplique, offerte par Ruhlmann à la Chambre de commerce et d'Industrie de Paris (hôtel Potocki), et toujours conservée in situ. Parties communes de première classeSalle à manger : La salle à manger des première classe, reproduite au dernier étage de l’ancien magasin Eaton à Montréal, a longtemps été considérée comme l'un des endroits les plus chics de cette ville. La décoration a été confiée à l'architecte-décorateur Louis Süe et au peintre Gustave Louis Jaulmes qui ont réalisé là leur dernière collaboration[12]. Les peintres Edy Legrand et Léon Voguet ornent le grand ovale du mur en fond de salle d'une vaste composition évoquant une Scène de chasse à courre en Ile-de-France. Grand salon : L'estrade de l'orchestre du grand salon est ornée de Danseuses au bord d'un fleuve peintes par Gustave Louis Jaulmes. Quatre sculptures ornent la salle sur le thème des fleuves et rivières d'Ile-de-France : Pierre-Marie Poisson exécute La Seine et L'Aisne, tandis qu'Albert Pommier représente L'Oise et La Marne. Après la Seconde Guerre mondiale, le décor est mis au goût du jour, avec notamment une composition peinte par Robert Poughéon représentant la Chasse à courre à Fontainebleau. Salon fumoir : Au mur du salon fumoir, le peintre Léon Carré réalise une composition sur le thème de L'Afrique du Nord. Salle de théâtre : Le tableau de scène de la salle de théâtre est signé Jean Dupas. Salon de thé : Le mur du salon de thé est orné par Jean Dupas d'une composition représentant le Tir aux pigeons. Un grand groupe en bois doré d'Alfred Janniot représentant La Nymphe de Fontainebleau, inspiré du maniérisme bellifontain, est placé au centre de la salle. Chapelle : Dans la chapelle, l'autel est orné de scènes en verre coulé d'Henri Navarre (Le Christ en Croix, Marthe ou la Vie active, Marie ou la Vie contemplative). Suites de première classeL'appartement de grand luxe est orné sur ses murs de Danseuses de Paul Vera. Parties communes de seconde classeIconographie
Notes et références
AnnexesBibliographie
Articles connexes
Liens externes |