Bois frissonnants, ciel étoilé
Mon bien-aimé s'en est allé
Emportant mon cœur désolé.
Vents, que vos plaintives rumeurs,
Que vos chants, rossignols charmeurs,
Aillent lui dire que je meurs.
Le premier soir qu'il vint ici,
Mon âme fut à sa merci;
De fierté je n'eus plus souci.
Mes regards étaient pleins d'aveux.
Il me prit dans ses bras nerveux
Et me baisa près des cheveux.
J'en eus un grand frémissement.
Et puis je ne sais plus comment
Il est devenu mon amant.
Je lui disais: "Tu m'aimeras
Aussi longtemps que tu pourras."
Je ne dormais bien qu'en ses bras.
Mais lui, sentant son cœur éteint,
S'en est allé l'autre matin
Sans moi, dans un pays lointain.
Puisque je n'ai plus mon ami,
Je mourrai dans l'étang, parmi
Les fleurs sous le flot endormi.
Sur le bord arrivée, au vent
Je dirai son nom, en rêvant
Que là je l'attendis souvent.
Et comme en un linceul doré,
Dans mes cheveux défaits, au gré
Du vent je m'abandonnerai.
Les bonheurs passés verseront
Leur douce lueur sur mon front,
Et les joncs verts m'enlaceront.
Et mon sein croira, frémissant
Sous l'enlacement caressant,
Subir l'étreinte de l'absent.