Sujet automate (marxisme)Le sujet automate (ou sujet automatique) est une expression de Karl Marx dans son ouvrage Le Capital. Ce concept va être grandement développé et utilisé par d'autres auteurs marxiens tels que Moishe Postone ou les auteurs de la Critique de la valeur (Robert Kurz, Anselm Jappe, etc.). Définition de MarxDans le livre 1 du Capital, Karl Marx utilise ce concept de sujet automate lorsqu'il explique que l’accélération du cycle de rotation du capital rendue possible par le développement technologique est nécessaire afin, d’une part, d’obtenir des gains de productivité et d’accumuler de la survaleur relative et, d’autre part, afin de raccourcir le temps de circulation, lequel ne produit pas de valeur. C’est au moment où le procès de valorisation repose sur la survaleur relative que la catégorie du capital prend tout son sens puisque le capital devient le véritable sujet (non humain) d’une dynamique hors de tout contrôle social[1] :
Le sujet automate se matérialise dans le système des machines, selon Marx, qui affirme dans une veine aristotélicienne que :
(Re)interprétation marxienne et enrichissement du conceptPour Marx et également l'historien Moishe Postone, le capital peut être décrit comme « sujet automate », et les capitalistes comme la simple personnification du capital, comme de simples « masques de caractère ». Par conséquent, si, pour le marxisme orthodoxe, la domination est concrète (le travail est soumis à l’exploitation, à une domination de classe), selon Moishe Postone, la domination capitaliste est abstraite. Le marxisme traditionnel souhaite dépasser le capitalisme en libérant le travail de l’exploitation, alors que pour des marxiens hétérodoxes comme Moishe Postone, dépasser le capitalisme rend nécessaire le fait de libérer les hommes du travail. Le marxisme traditionnel voit le travail et la richesse qu’il produit, la valeur, comme des réalités universelles, indépassables, et la domination comme exploitation, comme domination d'une classe sociale, alors que Moishe Postone montre en quoi le travail et la richesse actuelles sont spécifiquement capitalistes et en quoi ils sont des mécanismes automatiques qui dominent les hommes[2]. Le capital est ainsi un « sujet automate » et le travail est « automédiatisant », fin en soi. Ce sont dans ces automatismes sociaux – et non dans une quelconque domination de classe – que s’enracine la domination sociale contemporaine[3].
Une explication du sujet automate est également donnée par Anselm Jappe, un auteur du courant marxien de la Critique de la valeur, montrant ainsi que le capitalisme ne saurait être un système uniquement définissable comme un simple mode de production économique basé sur la lutte de classes et la propriété privée des moyens de production. La Critique de la valeur montre que le capitalisme est également une totalité sociale et civilisationnelle où le fétichisme de la marchandise mais également d'autres fétiches que sont le travail, l'argent et la valeur, dominent la société (donc dominent aussi les classes dominantes). La société est entièrement dominée par des abstraction réelles et anonymes[5],[6]. Le capitalisme est donc aussi une « domination sans sujet » et impersonnelle selon Robert Kurz[7]. Dans l'ouvrage Raison sanglante, pour Robert Kurz le sujet automate concerne le cœur du problème de capitalisme, c'est la "forme-sujet bourgeoise moderne, structurellement masculine"[8] :
Cette réflexion de Kurz vis-à-vis du sujet automate l'amène également à analyser ce concept sur le rapport entre les sexes, "mais aussi au-delà de celui-ci". Le racisme, l'antisémitisme, la concurrence marchande et l'universalisme occidental passe aussi sous la critique de Kurz, dans le cadre d'une analyse de ce qu'est le sujet automate. L'universalisme occidental engendré par le capitalisme ne se "réfère qu'au monde intérieur de la forme-valeur" et constitue "à maints égards un système et des mécanismes d'exclusions"[9]. Le sujet automate est "masculin", mais aussi "blanc", patriarcal et raciste :
Notes et références
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