Rallye d'Argentine 1981
Le Rallye d'Argentine 1981 (3e Rallye Codasur), disputé du 18 au [1], est la quatre-vingt-quatorzième manche du championnat du monde des rallyes (WRC) courue depuis 1973, et la septième manche du championnat du monde des rallyes 1981. Contexte avant la courseLe championnat du mondeAyant succédé en 1973 au championnat international des marques (en vigueur de 1970 à 1972), le championnat du monde des rallyes se dispute sur une douzaine de manches, dont les plus célèbres épreuves routières internationales, telles le Rallye Monte-Carlo, le Safari ou le RAC Rally. Parallèlement au championnat des constructeurs, la Commission Sportive Internationale (CSI) a depuis 1979 créé un véritable championnat des pilotes qui fait suite à la controversée Coupe des conducteurs instaurée en 1977, dont le calendrier incluait des épreuves de second plan. Pour la saison 1981, la CSI a une nouvelle fois exclu la manche suédoise du championnat constructeurs, cette épreuve comptant uniquement pour le classement des pilotes, tout comme le Rallye du Brésil promu cette année au rang mondial. Huit des douze manches du calendrier se disputent en Europe, deux en Afrique et deux en Amérique du Sud. Elles sont réservées aux voitures des catégories suivantes :
Bien que n'ayant remporté aucune épreuve, Talbot occupe la tête du championnat du monde à la mi-saison, la version groupe 2 de sa Sunbeam Lotus ayant accumulé les places d'honneur et les victoires dans sa catégorie. La marque franco-britannique possède sept points d'avance sur Datsun, vainqueur du dernier Safari avec Shekhar Mehta. La lutte pour le titre des constructeurs reste très ouverte, Ford, bien que non représenté officiellement, pouvant également tirer son épingle du jeu grâce à l'équipe Rothmans qui engage régulièrement Ari Vatanen, qui se montre souvent à la pointe du combat au volant de son Escort RS et qui s'est brillamment imposé au Rallye de l'Acropole. Malgré le niveau de performance très élevé de sa nouvelle Quattro, première voiture de grand tourisme à transmission intégrale, Audi n'est pas parvenu à se montrer menaçant pour sa première saison complète au niveau mondial, la voiture manquant encore de fiabilité ; Hannu Mikkola a néanmoins réussi à remporter le Rallye de Suède à son volant, l'épreuve ne comptant que pour le championnat pilotes. Pour le titre des conducteurs, c'est Guy Fréquelin, le plus régulier de l'équipe Talbot, qui tient la corde, le pilote français ayant pour principaux rivaux Markku Alén (vainqueur au Portugal sur sa Fiat) et Ari Vatanen. Champion du monde en 1980 sur Fiat, Walter Röhrl est privé de volant cette saison, ayant signé un contrat avec Mercedes-Benz quelques semaines avant que le constructeur de Stuttgart n'annonce brutalement son retrait de la compétition ! L'épreuveLe Rallye Codasur (pour Confederación Deportiva Automovilística Sudamericana) fut créé en 1979 dans le cadre du championnat d’Amérique du Sud. L’épreuve inaugurale, disputée presque exclusivement sur terre, fut remportée par Jean Guichet au volant d’une Peugeot 504, à l’issue d’une course très difficile (seulement sept équipages à l’arrivée, dont deux hors délais, sur soixante-et-onze engagés[2]). Dès 1980, pour sa deuxième édition, le rallye fut intégré au championnat du monde, une promotion justifiée par une organisation exemplaire et un parcours très sélectif. Le rallye perd cette année son parcours de concentration, qui offrait aux équipages le choix entre quatre villes de départ (dont trois dans des pays voisins), l'épreuve se disputant désormais sur le seul territoire argentin. Dernier vainqueur en date, le champion du monde Walter Röhrl ne pourra défendre ses chances cette année, le pilote allemand (sous contrat Mercedes) n'ayant pas eu l'aval de son employeur pour offrir ses services à une marque concurrente[3]. Le parcours
Première étape
Deuxième étape
Troisième étape
Quatrième étape
Les forces en présence
Le constructeur japonais a préparé quatre voitures pour cette épreuve : deux Violet GT groupe 4 (1030 kg, moteur deux litres à seize soupapes, 225 chevaux) pour Timo Salonen et Shekhar Mehta, ainsi que deux 160J groupe 2 (1000 kg, moteur deux litres à huit soupapes, 195 chevaux) pour les Argentins Jorge Recalde et Ricardo Zunino, le pilote de Formule 1 effectuant sa première apparition en rallye[5]. Les quatre équipages utilisent des pneus Dunlop.
Rothmans n'a engagé qu'une seule voiture, Ari Vatanen disposant de son habituelle Escort RS1800 groupe 4 préparée chez David Sutton. Elle est équipée d'un moteur deux litres seize soupapes alimenté par carburateurs développant 265 chevaux à 8500 tr/min[6]. Elle pèse 1040 kg en configuration terre et utilise des pneus Pirelli. L'équipe a prêté un modèle identique au pilote uruguayen Domingo de Vitta, sous les couleurs de Castrol. La marque est également représentée en groupe 2, avec notamment les Escort RS2000 de Federico West et de Luís Etchegoyen, des modèles de série surclassés en catégorie «tourisme spécial» à cause de l'absence de banquette arrière[5].
Les épreuves sud-américaines du championnat n'étaient initialement pas inscrites au programme de la marque franco-britannique, mais les chances de décrocher un titre mondial l'ont incitée à engager une voiture pour Guy Fréquelin, alors en tête du classement provisoire. Le pilote français dispose de son habituelle Sunbeam Lotus groupe 2. Grâce à son moteur quatre cylindres seize soupapes de 2200 cm3 alimenté par deux carburateurs double-corps développant environ 250 chevaux, c'est le modèle le plus puissant dans cette catégorie. Pesant environ une tonne, la Sunbeam Lotus est chaussée de pneus Michelin[6].
Les concessionnaires argentins de la marque française ont engagé deux 504 groupe 2 (moteur deux litres à injection, 175 chevaux, 1 400 kg) pour Carlos Garro et Francisco Alcuaz[5]. Plusieurs pilotes privés s'alignent sur des modèles identiques, notamment Ricardo Albertengo et Horacio Maglione.
L'importateur local a engagé deux Renault 12 TS groupe 1 pour Ernesto Soto et Luís Romero. Ces voitures sont des tractions. Elles sont équipées d'un moteur quatre cylindres de 1400 cm3, d'une puissance de l'ordre de 80 chevaux.
De nombreuses Fiat 147 ont été engagées par des pilotes indépendants, dans les groupes 1 et 2, la plus en vue étant celle de l'Argentin Gabriel Raies. Déroulement de la coursePremière étapeLes quatre-vingts concurrents s'élancent de Buenos Aires le dimanche matin, en direction du nord du pays. Le temps est froid et sec, mais des inondations récentes ont nécessité une modification du parcours, entraînant l'annulation de la première épreuve spéciale[7]. Sur sa Ford Escort, Ari Vatanen se montre le plus rapide entre Tapso et El Alto, prenant la tête du rallye avec trente secondes d'avance sur la Datsun de Timo Salonen, la Talbot de Guy Fréquelin étant une vingtaine de secondes plus loin. Salonen revient à moins de dix secondes de son compatriote dans l'épreuve suivante, avant de prendre le commandement à l'issue de la dernière spéciale de la journée, la seule disputée sur asphalte[5]. Il rallie San Miguel de Tucumán avec une mince avance de six secondes sur Vatanen. Fréquelin, troisième, est une minute derrière, avec une bonne marge sur les Datsun de Shekhar Mehta et de Jorge Recalde. Septième derrière l'Escort de Domingo de Vitta, le pilote F1 Ricardo Zunino ne s'est pas montré très à l'aise sur la terre et accuse déjà plus de sept minutes de retard. En tourisme de série, c'est la Peugeot 504 d'Ibanez, dixième au classement général, qui mène la danse. Soixante-cinq équipages sont encore en course.
Deuxième étapeSan Miguel de Tucumán - SaltaLes équipages repartent de San Miguel de Tucumán le lundi matin, en direction de Salta. Vatanen se présente en retard, ayant dû faire réparer ses freins, et écope de dix minutes de pénalisation, plongeant à la huitième place du classement général. Le pilote Ford va dès lors attaquer dans chacun des secteurs chronométrés et, s'imposant à trois reprises consécutives, remonte à la troisième place du classement général, ayant ramené son retard sur Salonen à trois minutes. Fréquelin, toujours second, est revenu à seulement vingt secondes de la Datsun de tête, ralentie par des problèmes de freins. Zunino a abandonné, étant sorti de la route sur le parcours de liaison, peu après Tafí del Valle, tout comme son compatriote Gabriel Raies (Fiat 147). Domingo de Vitta a également abandonné, peu avant San Carlos, sur rupture de pont ; le coéquipier de Vatanen occupait alors la sixième place. En fin de matinée, Recalde se fait surprendre dans une zone de travaux sur le parcours routier, et grimpe sur un tas de sable. L'équipage perd beaucoup de temps à dégager la Datsun et écope de vingt-cinq minutes de pénalisation. Dans la dernière épreuve spéciale avant Salta, une déviation a été mise en place une dizaine de kilomètres après le départ. À l'abord d'une cuvette non empruntée durant les reconnaissances, Fréquelin arrive beaucoup trop vite ; à environ 180 km/h, la Talbot effectue un vol plané de plus de 80 mètres et atterrit brutalement. Dans le choc, un amortisseur se brise et le pilote se démet une vertèbre[4]. Il continue néanmoins et réalise le meilleur temps de ce secteur, prenant le commandement de la course à Salonen, toujours handicapé un freinage défectueux, qui va perdre six minutes à les faire réparer. La remontée de Vatanen a été stoppée par un bris de la poulie supportant la courroie d'alternateur, en début de spéciale. Il perd plus d'une heure et quart à faire effectuer une réparation de fortune dans un garage local et retombe à la huitième place du classement général. Malgré son problème de vertèbre, Fréquelin est en tête au regroupement de Salta, avec plus de six minutes d'avance sur les Datsun de Salonen et Mehta, séparées d'une seconde. Les nombreux incidents de courses ont propulsé le pilote argentin Francisco Alcuaz, sur Peugeot 504, à la quatrième place, loin devant Recalde. C'est désormais Ernesto Soto, septième au classement général, qui domine le groupe 1 au volant de sa Renault 12.
Salta - San Miguel de TucumánLe retour vers San Miguel de Tucumán ne comporte qu’une seule épreuve spéciale. Mehta y tombe en panne d'alternateur. Heureusement pour lui, son coéquipier Recalde, le rejoignant peu après, lui porte assistance, lui donnant sa batterie pleine ; Mehta redémarre et remorque Recalde pour qu’il puisse repartir avec sa batterie à plat, les deux équipages perdant chacun un quart d'heure dans l'opération. Pénalisé de cinq-sept minutes supplémentaires pour la remise en état de l'entraînement des accessoires (avec une nouvelle poulie forgée sur place !), Vatanen est reparti derrière des équipages beaucoup plus lents. Au moment de doubler l'un d'entre eux, il est aveuglé par la poussière et sort de la route, détruisant le train avant de son Escort. Ayant dû prendre des médicaments anti-douleur pour reprendre le volant, Fréquelin a perdu un peu de temps sur Salonen ; il termine néanmoins l'étape en conservant près de cinq minutes sur le Finlandais.Malgré son problème d'alternateur, Mehta a conservé la troisième place, amis accuse désormais plus de vingt minutes de retard sur la Talbot de tête. Les autres, emmenés par Alcuaz et Recalde, sont très loin derrière. Il ne reste plus que trente-cinq voitures en course.
Troisième étapeLes équipages repartent le mercredi matin pour effectuer une boucle passant par Belén. Au départ, Salonen perd huit minutes supplémentaires pour le remplacement de l'échappement. Il en reprend près de quatre à Fréquelin dans la première épreuve spéciale, le pilote français, qui pilote désormais avec une minerve autour du cou, ayant crevé à deux reprises. Dans le secteur suivant, Salonen attaque très fort, parcourant les soixante-quinze kilomètres à plus de 143 km/h de moyenne, et reprend le commandement du rallye. Le Finlandais réalise à nouveau le meilleur temps dans les deux épreuves suivantes et termine l'étape avec près de trois minutes d'avance sur Fréquelin. Toujours troisième, Mehta est maintenant à plus d'une demi-heure. Alcuaz ayant abandonné en début de journée (moteur cassé), Recalde a pris la quatrième place devant Soto, toujours nettement en tête du groupe 1. Trente-et-un équipages restent encore en course.
Quatrième étapeLa dernière étape, passant par Frías, se déroule le jeudi. Les deux premiers du classement ont quelques ennuis au départ, Salonen faisant remplacer la boîte de vitesses et l'embrayage, tandis que Fréquelin ne parvient pas à démarrer et doit faire remplacer batterie, démarreur et distributeur. Tous deux parviennent toutefois à pointer dans les délais au premier point de contrôle. Dans le premier secteur chronométré, Salonen est de loin le plus rapide et porte son avance à plus de six minutes. Mais dans la longue spéciale de Portuezuelo, il casse son moteur au tiers de la distance, ses mécaniciens ayant omis de remettre de l'huile au dernier point d'assistance ! Fréquelin a désormais course gagnée et, malgré ses douleurs, conduisant à une main, il remporte sa première épreuve de championnat du monde avec près de quarante minutes d'avance sur Mehta, qui termine loin devant son coéquipier Recalde. Soto obtient une belle quatrième place au volant de sa Renault 12 de série, ayant dominé sa catégorie dès le début de la deuxième étape. Sur quatre-vingts équipages au départ, seuls vingt-six ont terminé. Classements intermédiairesClassements intermédiaires des pilotes après chaque épreuve spéciale[5]
Classement général
Équipages de tête
Vainqueurs d'épreuves spéciales
Résultats des principaux engagés
Classements des championnats à l'issue de la courseConstructeurs
Pilotes
Notes et références
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