Paulin Talabot, né le à Limoges et mort le à Paris, est un ingénieur polytechnicien, personnalité du monde ferroviaire, banquier et homme politique français. Il a contribué à l’essor du chemin de fer en France et à l’étranger, dirigeant la Compagnie du PLM de 1862 à 1882. Il participa à la fondation du Crédit lyonnais et de la Société générale. Il fut député et président du conseil général du Gard de 1865 à 1870.
Biographie
Naissance et formation
François, dit Paulin, Talabot est né le à Limoges, il est le quatrième des huit enfants (cinq garçons et trois filles) de François Talabot (1764-1839), avocat au parlement de Limoges, puis président du tribunal civil de Limoges, et Marie Agathe Martin-Lagrave. À la naissance de Paulin, son père est un bourgeois et un notable de la ville : il a été avocat au présidial avant d'occuper, après la Révolution, la fonction de président de son tribunal civil pendant vingt ans, même si les origines familiales sont plus modestes : son grand-père Marcel (1720-1777) était laboureur mais propriétaire et un paysan plutôt aisé.
Constructeur des premières lignes dans le Sud-Est de la France avec notamment pour proche collaborateur Charles Dombre, il étudie la jonction de la Méditerranée à la mer Rouge entre 1845 et 1847, ayant été choisi par la société d'études fondée par Prosper Enfantin (Talabot abandonnera à Ferdinand de Lesseps ce projet qui deviendra le canal de Suez[1]). Talabot s’emploie par des fusions à former la compagnie du chemin de fer Paris-Lyon-Méditerranée[2] (PLM), dont il devient le directeur général (1862-1882). Avec Jules Mirès, il modernise le port et reconstruit les docks de Marseille (vers 1856, en collaboration avec l’ingénieur Gustave Desplaces), ville à laquelle il est particulièrement attaché, au point de s'y faire édifier une somptueuse demeure — le « château Talabot » — par l'architecte Jules Bouchot.
Dans la première partie du XIXe siècle, l'idée de faire table rase des monuments du Moyen Âge, période d'obscurantisme, revenait avec régularité. Talabot, en 1846, dans le cadre de la construction du PLM, proposa de faire passer une voie ferrée sur le rempart nord d'Avignon. Dans son projet, il proposait pour empêcher toute critique que celui-ci soit « doublé d'un côté ou d'un autre suivant les convenances ». D'ailleurs, expliquait-il, le remblai serait maçonné et couronné de créneaux, ce qui permettrait de conserver à la cité des papes « son caractère original, pittoresque et Moyen Âge, mieux que les vieux remparts en mauvais état ». Comme il avait prévu de placer la gare à la porte de l'Oulle, un tunnel percerait le rocher des Doms[3].
Le conseil municipal d'Eugène Poncet se déclara très favorable. Il fut suivi par une partie de l'opinion publique qui pensait que ce remblai serait la meilleure des protections contre les crues du Rhône. Une voix s'éleva pourtant contre ce projet, ce fut celle d'Esprit Requien, immédiatement soutenu par Prosper Mérimée[3]. Il lui écrivit :
« Personne ne déteste autant le pugilat que moi, mais ce que j'ai encore le plus en horreur, c'est de me laisser manger la laine sur le dos. À votre place, je ne me laisserai pas canuler par ces canailles du conseil municipal. Au point où les choses en sont venues, je crois que vous avez plus à perdre à la résignation qu'au regimbement… Vous avez une admirable invention au moyen de laquelle on vient à bout de monstres bien plus durs à cuire que ceux que dompta feu Hercule. C'est la presse. Il n'y a pas de maire, voire de ministre qui n'y laisse des plumes, quand on a surtout le bon droit. Usez-en… Battez-vous, battez-les »
De son côté, Mérimée fit un rapport à son ministre de tutelle, dénonçant cette initiative qu'il qualifiait de « malheur public », en lui demandant de s'opposer à « destruction de la célèbre enceinte et son remplacement par une voie ferrée et une gare inesthétiques ». L'affaire fut réglée lors des élections municipales, Eugène Poncet fut battu, son successeur Hyancinthe Chauffard annula immédiatement le projet de destruction des remparts[3].
En Algérie, il réalise des projets de chemins de fer et de transports maritimes, et d’exploitations minières (compagnie de Mokta el Hadid, mines de fer).
En plus d’être un grand et très fortuné industriel (il fut un temps la personne la plus imposée dans le Gard), Paulin Talabot fut élu plusieurs fois député du gouvernement (soutenant Napoléon III) et conseiller général du Gard (en 1861, après la disparition de Jean Duplan) avant d'échouer à la députation dans les Basses-Alpes (actuel département des Alpes-de-Haute-Provence).
Décès et inhumation
« Monsieur Paulin Talabot, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, directeur honoraire de la Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée, (NDLR : PLM) vient de mourir à Paris à l’âge de 85 ans. Le pays perd en lui l’un de ses hommes les plus éminents, un des ingénieurs qui ont le plus contribué en France au développement de nos voies ferrées et en particulier, au succès de la grande compagnie dont il a été le véritable créateur »
— revue Ingénieurs civils, 1885
Après des obsèques à l'église de la Madeleine le en présence des grands noms de l'industrie et de la politique, il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise. Sa dépouille est plus tard transférée à Condat-sur-Vienne dans la banlieue de Limoges, où il avait des attaches et dont il avait financé la rénovation de l'église et des écoles[4]. Il est inhumé dans un imposant caveau à côté de l'église[4].
Vie personnelle
Il rencontra à Marseille Marie Savy (1822-1889), une jeune femme de l'Aveyron, alors au service d'une famille de notables de la ville. Malgré la différence d'âge (elle en avait 19 et lui 42) et de classe sociale, il l'épousa[5]. Le couple repartit vivre à Paris où Marie Talabot tiendra salon. Elle est inhumée à Saint-Geniez-d'Olt, son village natal dont elle était devenue une bienfaitrice, dans un mausolée dominant la ville : le monument Talabot[5]. Une variété de pêche porte son nom, créée par Gougibus, le jardinier de Paulin Talabot[6].
Décorations
De nombreuses fois décoré, il était notamment :
Chevalier de la Légion d'honneur, puis officier ([7]) et commandeur ([7])
Il existe en France plusieurs voies publiques portant son nom (Arles, Limoges, Nîmes, Saint-Ouen, Toulouse, Yerres).
Un buste de Paulin Talabot se trouve dans le hall de la gare de Nîmes.
Notes et références
↑Planchenault, Gérard., Marseille Saint-Charles : histoire d'une grande gare, 1847-2007, Saint-Cyr-sur-Loire, A. Sutton, , 221 p. (ISBN978-2-84910-880-2 et 2849108804, OCLC308167541)
↑France, Collection complète des lois, décrets d'intérêe général, traités internationaux, arrêtés, circulaires, instructions, etc, , 640 p. (lire en ligne), p. 20.
↑ abc et dJoseph Girard, Évocation du vieil Avignon, p. 345.
↑« Concours ouverts devant la société, en 1885 », Journal de la Société nationale d'horticulture de France, vol. VIII, , p. 380 (lire en ligne, consulté le ).
↑ a et bGustave Vapereau, Dictionnaire universel des contemporains: contenant toutes les personnes notables de la France et des pays étrangers…, volume 2, Hachette, 1870, p. 1722 lire (consulté le 27 juillet 2011).
Voir aussi
Bibliographie
Baron Ernouf, Paulin Talabot, sa vie et son œuvre, éditions Plon, 1886 (intégral).
Bertrand Gille, « Paulin Talabot : recherche pour une biographie », in Revue d'histoire des mines et de la métallurgie, tome I - no 1, 1970, Jarville (diffusion : Librairie Droz - Genève).
Jean Lenoble, Les Frères Talabot, une grande famille d’entrepreneurs au XIXe siècle, éditions CCSTI, Limoges, 1989.
Frédéric Barbier, Jean-Pierre Daviet, École pratique des hautes études (France), section des sciences historiques et philologiques, « Notice biographique no 91 », dans Le patronat du Nord sous le Second Empire : une approche prosopographique, librairie Droz, 1989 (ISBN9782600034081) p. 361-365 (extraits)
Alain Guichardet, « Paulin Talabot (1799-1885) Premier polytechnicien-cheminot », dans Bulletin de la société des amis de la bibliothèque de l'école polytechnique, no 21, SABIX, (extrait).
Joseph Girard, Évocation du vieil Avignon, 1958 - ré-édité Éd. de Minuit, Paris, 2000 (ISBN2-7073-1353-X).
Roland Carty, Éliane Richard et Pierre Échinard, Les patrons du Second Empire : Marseille, Paris, Picard, , 332 p. (ISBN2-7084-0557-8), p. 285-289