Jacques LaudyJacques Laudy
Jacques Laudy, né le à Schaerbeek (Bruxelles) et mort le à Woluwe-Saint-Lambert (dans la même région), est un peintre et dessinateur belge de bande dessinée, auteur des séries Hassan et Kaddour et d'adaptations en bande dessinée d'œuvres littéraires comme Les Quatre fils Aymon, Rob Roy ou David Balfour. Ce dessinateur classique, perpétuant un genre de graphisme illustratif inspiré par Arthur Rackham ou Anton Pieck, est un des fondateurs du journal Tintin en 1946 avec Hergé, Jacques Van Melkebeke, Edgar P. Jacobs et Paul Cuvelier. Son physique inspire à Edgar P. Jacobs le personnage de Francis Blake dans la série de bande dessinée Blake et Mortimer. BiographieJeunesseJacques Laudy naît le à Schaerbeek, une commune bruxelloise[1]. Il est issu d'une famille de peintres, son père Jean Laudy, originaire des Pays-Bas, est un dessinateur et un peintre reconnu, l’un des portraitistes officiels d’Albert Ier et de la famille royale belge, et sa mère Hélène Demoulin est également peintre et aquarelliste[2]. La famille vit dans une maison du Tomberg[3] à Woluwe-Saint-Lambert, où Hergé a également passé une grande partie de sa vie[4]. Alors qu'il étudie à l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles — où l'un de ses professeurs est le peintre et sculpteur Constant Montald — dès l'âge de 14 ans, il se lie d'amitié avec Jacques van Melkebeke et Edgar Pierre Jacobs, deux artistes dont la carrière se lie à celle de Laudy dans les décennies à venir. Les trois amis partagent une passion pour les armes anciennes et réalisent des portraits l'un de l'autre[4],[5]. Parmi ses principales influences graphiques figurent des illustrateurs classiques comme Arthur Rackham et les peintres Louis Buisseret, Alfred Moitroux et Anton Pieck[4]. Intérêt pour l'ÉcosseLaudy marque un vif intérêt pour l'Écosse à la fin des années 1920 et en particulier pour la fabrication de cornemuses. Il passe ses vacances chaque année en Écosse d'où il ramène un magnifique costume d’Highlander rehaussé d’argent et de pierreries[6]. Il se rend régulièrement à Édimbourg chez le facteur d'instruments de cornemuse Andrew Ross et il fabrique et restaure personnellement plus de 200 instruments au cours de sa vie[4]. Il s'en inspire régulièrement ainsi que de Sir Walter Scott pour les histoires humoristiques qu'il produira ultérieurement. Il était prévu de rassembler les nombreux croquis et aquarelles qu'il a réalisés d'Édimbourg dans un livre intitulé Les Rues d'Édimbourg en 1984, mais ce projet n'a pas abouti en raison de l'incendie ayant ravagé les films chez l'imprimeur[1]. Les débutsLaudy commence sa carrière dans la bande dessinée et l'illustration à l'âge de 33 ans. Ses premières illustrations paraissent en 1940 dans Pro Juventute, la fondation pour le bien commun de la jeunesse, créée en 1938 par le baron et philanthrope Louis Empain[4]. Bravo !Laudy n’ayant plus de ressources à cause de l’occupation, il est introduit par Jean Dratz — un ami de son père, surnommé le Dubout belge[2] — dans Bravo !, il y retrouve son ami James Thiriar, dont la mère est écossaise, et comme lui grand amateur d’uniformes et d’armures[3]. Il illustre la couverture du premier numéro[2], puis il contribue régulièrement à l’hebdomadaire pour la jeunesse de Jean Meuwissen où il livre des couvertures, des illustrations de nouvelles et de contes en 1940. Il présente également Jacobs au directeur artistique de Bravo !, le peintre Jean Dratz[7], et joue ainsi un rôle déterminant dans les débuts de son ami dans la bande dessinée[4]. Jacobs auquel il servit de modèle pour le personnage de Lord Calder dans Le Rayon U[8]. Laudy finit par s'aventurer lui-même dans la bande dessinée, par nécessité, avec les trois récits humoristiques Les Aventures de Bimelabom et Chibiche[9] (1944-1946) et Gust le Flibustier[10] (1946-1948), un coureur des mers vivant des aventures abracadabrantes à rapprocher de celles du Baron de Münchhausen, où il se projette[11]. Après la Libération, Laudy fait des apparitions dans le magazine flamand ABC (Trotsart de moedige ridder en 1944-1945) et dans Le Petit Monde[1]. Laudy crée également la série de bande dessinée Buonamico dans Grand Cœur[1], ainsi que des illustrations et Pietje Bovenkast pour Graphica[4]. Il use du pseudonyme de Al. Jingle pour certains de ses travaux de l'époque[4]. IllustrateurJacques Laudy illustre les nouvelles de l'écrivain russe Ivan Tourgueniev, traduites par Prosper Mérimée : Étrange histoire, Le Chien, Apparitions, Le Juif, Petouchkov reprises en recueil publié aux éditions La Boétie en 1944 et Discours de la servitude volontaire d'Étienne de La Boétie publié chez le même éditeur en 1947. Le journal TintinEn 1946, Hergé réunit près de lui les auteurs dont il apprécie le travail[12], Laudy participe ainsi au lancement de l'édition belge du journal Tintin[13]. Pour les premiers numéros de l'hebdomadaire, il fait des adaptations en bande dessinée du conte médiéval Chanson des quatre fils Aymon Les Quatre Fils Aymon[14],[3], une œuvre de plus de 60 planches[6] (1946-1947) et du livre de Walter Scott sur le hors-la-loi écossais Robert Roy MacGregor (1947-1948). Hassan et KadourSon œuvre la plus connue est cependant Hassan et Kadour, une œuvre empreinte de fantastique et de merveilleux. Il met en vedette deux jeunes chenapans arabes. Le premier album Le Voleur de Bagdad qui se déroule dans l'ancienne Arabie, un décor comparable à celui des Mille et Une Nuits. Dans les histoires suivantes, les deux garçons se sont souvent retrouvés à des époques différentes, sans raison particulière autre que celle de la fantaisie de son créateur. Six histoires sont ainsi publiées dans Tintin[15] jusqu'en 1962. Les deux premières ont été écrites par Jacques Van Melkebeke sous le pseudonyme de J. Alexander. Une dernière aventure intitulée Chasseurs de Chimères paraît dans Tremplin en 1960-1961, mais il est possible que cette histoire soit du seul Van Melkebeke[4]. Autres contributionsEn 1952, Laudy interrompt cette série pour réaliser une adaptation en bande dessinée du roman de Robert Louis Stevenson Enlevé ! : David Balfour, son chef-d'œuvre de colorisation[11] pour lequel il utilise l'aquarelle — technique jusque là inusitée[16]—, d'après un scénario d'Yves Duval, technique jusque là inusitée que quelques nouvelles. Pour Tintin, Laudy réalise également des bandes dessinées publicitaires pour des produits comme les stylographes et l'encre Stephens (1947), le chocolat Côte d'Or (Monsieur Cotdor, 1949-1951) et les vélos Ajax (1949-1951)[4] ainsi que des illustrations de romans ou nouvelles d'Alfred de Vigny, Mark Twain, Jerome K. Jerome ou Selma Lagerlöf[13]. Ons VolkskeLaudy est présent également dans le journal flamand Ons Volkske entre 1951 et 1956 avec des pages de bande dessinée repris dans l'album Silhoueten publié aux éditions BD Blues en 1981, et dans le journal Le Soir de manière sporadique avec des histoires historiques de 1956 à 1965[4]. Pour Petits Belges il illustre des épisodes de la vie de l'empereur Charles Quint avec L'Histoire comique de Charles Quint — une fine allusion à l'œuvre de Michel de Ghelderode Histoire comique de Keizer Karel, telle que la perpétuèrent jusqu’à nos jours, les gens de Brabant et de Flandre[17] — (1954-55) et ainsi que des bandes dessinées reprenant des légendes populaires belges (1956-1958). Ces légendes sont reprises dans le journal La Libre Belgique en 1987 sous le titre Légendes de Belgique[4]. Il campe également deux personnages l'un gros et l'autre mince, amis proches ou se querellant dans Silhouetten dans un style frais et particulier selon Danny De Laet[18]. En retraitLe parcours artistique de Laudy a souvent conduit à une approche non conventionnelle de la bande dessinée. Poète, individualiste et artiste peu discipliné[14], il n'eut pas l'heur de plaire au directeur artistique de Tintin. Il rendait ses phylactères rectangulaires plutôt que ronds, par exemple. Hassan et Kaddour n'avait pas non plus de cadre permanent[4]. Les personnages apparaissent dans différents lieux à différentes époques d'une histoire à l'autre, seul Bob et Bobette de Vandersteen fait de même, également sans fournir d'explication appropriée. Cela ne convenait pas à Hergé, toujours dogmatique, qui voulait que toutes les bandes dessinées de Tintin suivent une certaine norme et aient un sens logique[4]. Leurs disputes fréquentes sont probablement l'une des raisons pour lesquelles Laudy quitte le monde de la bande dessinée en 1962 et a consacré le reste de sa carrière à faire de la peinture et des cornemuses[4]. Il est même devenu un portraitiste à succès, entre autres du Shah d'Iran Mohammad Reza Pahlavi et de son épouse l'impératrice Farah Diba d'après photo[11]. Même son ancien patron Hergé a posé pour un portrait[4]. Laudy a quelque peu sombré dans l'oubli au cours des décennies suivantes. Son œuvre se limitant à des publications dans des magazines, dont la plupart n'ont jamais parus en albums pourtant programmés au Lombard comme l'attestent certains 2e plats[14], il est encore souvent négligé. Même lorsque de petits éditeurs ont commencé à publier ses bandes dessinées en album, le tirage en est limité[19]. Laudy reçoit pour l'ensemble de son œuvre le prix du jury des prix Saint-Michel en 1974 (assimilé ultérieurement au Grand Prix Saint-Michel) et le Crayon d'or décerné par le CANAB (Cercle des amis du neuvième art de Bruxelles) en 1993. Il est élevé à la dignité de chevalier de l'ordre de Léopold[20] en 1991, puis élevé au titre de baron par le roi Baudouin[4]. En , Le Centre belge de la bande dessinée lui rend hommage avec une exposition rétrospective[8]. Outre le dessin, Jacques Laudy est un collectionneur d'armes et un joueur de cornemuse[21]. Il se refuse à prendre l'ascenseur[16], d'ailleurs Numa Sadoul[22] dit de lui « C’est un homme du Moyen Âge. ». DécèsJacques Laudy meurt le à Woluwe-Saint-Lambert (Bruxelles), à l'âge de 86 ans[23],[1]. Ève Calingaert lui rend hommage et en dresse le portrait d'un homme modeste refusant les interviews dans un article du journal Le Soir du [21]. Héritage et influenceEn 1993, son dernier ouvrage Le Royaume d'Edgar J qui conte l'amitié qui le lia à Edgar P. Jacobs[11], alias « le rossignol de Maelbeek » dans leur jeunesse, ainsi que les vagabondages et les aventures qu'ils vécurent ensemble dans le Bruxelles des années trente et quarante, est publié de manière posthume aux éditions Loempia. Il comporte ses souvenirs d'Édimbourg et du village côtier flamand Klemskerke, qu'il visitait régulièrement depuis son enfance. Selon Patrick Gaumer[1] : « Son œuvre empreinte de poésie et de fantastique peut pourtant être classée parmi l'une des plus originales du 9e art. » et pour Didier Pasamonik un nom mythique de l'École de Bruxelles[22]. En raison de son travail limité dans la bande dessinée, Laudy n'a influencé que quelques jeunes artistes, parmi lesquels Laurent Parcelier[1]. Vie privéeJacques Laudy vivait à Woluwe-Saint-Lambert[22], il a deux filles prénommées Lucy[24] et Edith[25]. ŒuvresAlbums de bande dessinéeLes huit aventures de Hassan et Kaddour
Autres
Courts récits non publiés en albums
Collectifs
Illustration
Expositions
Catalogue d'exposition
Collections publiques3 œuvres de cet artiste sont conservées au Centre belge de la bande dessinée et font partie du patrimoine mobilier de la région Bruxelles-Capitale[29]. RéceptionPrix et distinctions
PostéritéEn , la poste belge émet pour la philatélie de la jeunesse un timbre Hassan et Kaddour. Le Centre belge de la bande dessinée qui célèbre son dixième anniversaire rend hommage à huit grands auteurs de bande dessinée dont Jacques Laudy dans l'album Hommage - 9 timbres pour le 9e art[32]. Willy Vandersteen lui rend hommage et lui fait un clin d'œil dans son album Bob et Bobette : Le Fantôme espagnol en 1948 où il le fait apparaître en joueur de cornemuse[4]. Avec l'apparition du Capitaine Francis Blake, dès le premier numéro de Tintin en 1946, Edgar P. Jacobs lui rend un hommage et ce pour l’éternité[2] ! Références
AnnexesBibliographieLivres: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Périodiques
Liens externes
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