La quatrième Coupe du monde de football se tient au Brésil du au et est remportée par l'Uruguay. Cette édition, qui voit la première participation de l'équipe d'Angleterre, reste célèbre pour la défaite du Brésil dans son nouvel antre du Maracanã construit pour l'occasion et pouvant accueillir 200 000 spectateurs, dans le match décisif pour le titre face à l'Uruguay, qui remporte sa deuxième victoire en Coupe du monde, et plonge tout un peuple dans le désarroi.
Histoire
Après l’arrêt de la compétition en raison de la Seconde Guerre mondiale, Brésil et Suisse sont les deux seuls pays à proposer l’organisation respective des Coupes du monde 1949 et 1951 et les deux pays sont désignés pour être pays hôte de ces deux tournois le 26 juillet 1946 lors du congrès à Luxembourg[2]. Le 27 juillet 1948, les Coupes du monde 1949 et 1951 sont décalées en 1950 et 1954[2] et retrouvent un rythme quadriennal les années paires où ne se tiennent pas les Jeux olympiques (comme c’était le cas avant la guerre avec les éditions de 1930, 1934 et 1938).
La Coupe du monde 1950 est la seule qui ne comporte pas de finale proprement dite, une poule finale à quatre terminant en effet l'épreuve[3]. Par une heureuse coïncidence, l'affiche de la dernière journée oppose les deux équipes en tête du classement, Brésil et Uruguay, les seules encore en course pour le titre et comptant respectivement 4 et 3 points (contre 1 et 0 points pour les deux plus mal classées). Le choc décisif Brésil-Uruguay au stade Maracanã, a donc fait office de véritable finale, au détail près que le Brésil pouvait se contenter d'un match nul pour devenir champion du monde.
À la surprise générale, c'est l'Uruguay qui gagna le match et empocha sa seconde Coupe Jules Rimet. Le président de la FIFA Jules Rimet remit à cette occasion pour l'avant-dernière fois le trophée à l'équipe championne du monde, mais cette remise de coupe fut assez discrète, car l'abattement et la confusion régnaient après le coup de sifflet final au Maracanã[4]. Le gardien de but brésilien Moacyr Barbosa porta cette défaite toute sa vie durant comme une croix, accusé abusivement d'être responsable de la défaite.
Outre la finale qui n'en était pas vraiment une, la surprise de l'épreuve fut la victoire des États-Unis 1-0[5] sur l'Angleterre. Les Britanniques étaient de retour à la FIFA après pratiquement deux décennies de bouderie, et ils pensaient bien marquer les esprits à l'occasion de cette première Coupe de l'après-guerre en s'y présentant parmi les grands favoris. Les Anglais trouvèrent le poteau à plusieurs reprises et firent preuve de maladresse face aux buts de la modeste équipe des États-Unis. C'est pourtant bien le « petit poucet » qui mit à bas l'« ogre », tant et si bien que de nombreux Anglais crurent à une erreur de typographie quand les journaux britanniques publièrent le résultat. Non content de perdre face aux États-Unis, les Anglais s'inclinèrent également 1-0[6] contre l'Espagne et quittèrent la Coupe du monde par la petite porte. Le match Angleterre-États-Unis entraîna aussi une polémique car l'équipe américaine était suspectée d'avoir illégalement aligné des joueurs étrangers et donc non sélectionnables. Effectivement, trois joueurs[7] étaient bien d'origine étrangère et n'étaient pas ou pas encore citoyens américains. Cependant, aucune infraction au règlement de l'époque[8] n'a finalement été constatée par la FIFA, l'Angleterre ne déposant par ailleurs pas de plainte, et l'affaire fut donc classée sans suite[9].
Cette Coupe du monde se disputa dans des enceintes géantes, au premier rang desquelles le stade Maracanã qui pouvait alors accueillir pas moins de 200 000 spectateurs. Le coût des nouveaux stades était d'environ 290 millions de dollars. Le Maracanã à lui seul a coûté environ 275 millions de dollars[10].
Bien que qualifiée pour la phase finale, l’Inde déclara forfait. Contrairement à la rumeur qui circula à l’époque selon laquelle cela venait de l’obligation de jouer avec des chaussures alors que les footballeurs indiens jouaient pieds nus, ou des coûts du déplacement jusqu’au Brésil, la raison provient du refus de la Fédération indienne de football, souhaitant se concentrer sur les Jeux olympiques et invoquant le manque de temps de préparation et des désaccords internes sur la sélection de l’équipe[11].
Le tirage au sort de la phase finale est effectué le 22 mai 1950 à Rio de Janeiro, seulement un mois et deux jours avant le début de la compétition. Quatre équipes sont désignées « tête de série » et préalablement affectées dans leur groupe respectif : le Brésil, pays hôte est placé dans la poule 1, l'Angleterre dans la poule 2, l'Italie, double championne du monde en titre, dans la poule 3 et l'Uruguay, ancien champion du monde, dans la poule 4. Il reste donc douze équipes à placer, toutes regroupées dans le même chapeau en vue du tirage au sort. À la date du tirage, deux forfaits sont confirmés : celui de l'Écosse et celui de la Turquie. La France, qui dans un premier temps a accepté l'invitation (elle remplace l'Écosse), est à cet instant là concernée : le sort la placera dans le groupe de l'Uruguay. En revanche le remplaçant espéré de la Turquie est incertain : le Portugal décline l'invitation tandis que l'Irlande, tardivement invitée, en fait de même après avoir hésité[14] . La boule n° 12 correspondante ne désigne donc pas d'équipe précise et celle-ci sera également placée dans le groupe de l'Uruguay. La France renonce finalement après le tirage au sort prétextant de trop longues distances à parcourir entre les villes où devaient se dérouler ses matchs, et c'est au tour de l'Inde de déclarer forfait[15]. La répartition des groupes apparait alors déséquilibrée, avec notamment un groupe IV particulièrement incomplet. Prise par le temps, la FIFA ne parvient en effet pas à trouver d'autres candidats pour les places vacantes, notamment celle de la Turquie. Le résultat de ce tirage est cependant maintenu, ce qui évite ainsi de chambouler en dernière minute l'organisation du tournoi.
Poule I
Le Brésil termine premier avec deux victoires contre le Mexique et la Yougoslavie, et réalise un match nul contre la Suisse. Le Mexique termine dernier avec 3 défaites et commence sa série de 5 Coupes du monde d'affilée avec élimination au premier tour. Les nations européennes terminent deuxième et troisième avec 4 points pour la Yougoslavie et 3 points pour la Suisse.
L'Espagne termine première devant les néophytes anglais, les Chiliens et les Américains en faisant le plein de points. Interdite de participation au tour préliminaire de 1938 en raison de la guerre civile, la Roja atteint le dernier carré, ce qui constituera sa meilleure performance pendant 60 ans avant sa victoire en 2010. Les États-Unis réalisent l'exploit de battre l'Angleterre 1-0.
À la suite du forfait de l'Inde, il ne reste que trois pays pour se disputer la première place. L'Italie touchée par le drame de Superga (8 internationaux italiens périrent dans le crash de leur avion), qualifiée d'office, est battue d'entrée par la Suède qui se qualifie malgré le nul concédé face au Paraguay au match suivant. La Squadra Azzurra termine deuxième du groupe et sauve l'honneur lors du dernier match en battant le Paraguay à qui il restait pourtant une petite chance de qualification.
Cette poule ne contient que deux pays, à la suite du forfait des Turcs, des Écossais puis des Français. Ceci en fera un rare exemple de poule contenant exclusivement des équipes du même continent (l’autre cas étant la poule IV de la coupe du Monde de 1954). L'unique match du groupe fait par conséquent figure de quart de finale : l'Uruguay écrase la Bolivie 8-0 et se qualifie pour la poule finale.
L’Uruguay assure l'essentiel avec cette victoire contre la Suède : à une journée de la fin il compte trois points contre quatre pour le Brésil et peut encore prétendre à la couronne mondiale (contrairement aux Suédois et aux Espagnols qui n’ont respectivement que zéro et un point).
La poule finale disputée sur trois journées ne comprenait pas de finale proprement dite, mais le hasard du calendrier et les résultats des journées précédentes ont fait en sorte que la dernière rencontre de la Coupe du monde oppose les deux premières équipes au classement (assurées de terminer aux deux premières places de ce Championnat du monde), donc les deux seules encore en lice pour le titre mondial. Pour toutes ces raisons le match Brésil-Uruguay, joué le dernier jour de la compétition au stade du Maracana peut être considéré comme la finale de la compétition. Cette première finale de fait du Brésil reste la dernière finale sans pays européen.
Uruguay et Brésil s'étaient opposés à trois reprises au mois de mai, deux mois avant la compétition, dans le cadre de la Copa Rio Branco. L'Uruguay l'avait emporté une fois (4-3), le Brésil deux (2-1/1-0), les deux équipes étaient donc équivalentes et contrairement à l'Espagne et à la Suède (largement vaincues par le Brésil), les Uruguayens étaient habitués aux défis des grands stades sud-américains[18]. Un match nul aurait donné le titre au Brésil. L'affaire semblait bien engagée quand le Brésil ouvrit le score, mais, devant une foule effarée, l'Uruguay marqua deux buts et remporta son second titre mondial.
La défaite, surnommée le « Maracanazo », fut considérée comme une tragédie nationale au Brésil[19]. La cérémonie officielle de remise de la coupe fut annulée, le président de la FIFA Jules Rimet remettant discrètement le trophée au bord du terrain au capitaine uruguayen.
À l'origine, les équipes ayant participé à cette Coupe du monde n'étaient pas classées. Cependant, en 1986, la FIFA établit rétroactivement un classement final de chaque Coupe du monde, basé sur la progression lors de la compétition, le nombre de points gagnés, la différence de buts puis enfin sur le nombre de buts marqués[20], le tout parfois en contradiction avec les modalités et règlements des compétitions concernées.
↑Une déclaration signée d'intention de naturalisation suffisait au joueur pour être sélectionné dans l'équipe représentant le pays dont il n'était pas encore citoyen à part entière.
↑Matthias Fett, « The game has changed – a systematic approach to classify FIFA World Cups », International Journal of Sport Policy and Politics, vol. 12, no 3, , p. 455–470 (ISSN1940-6940, DOI10.1080/19406940.2020.1784978, lire en ligne, consulté le )
↑La place est proposée à la France, deuxième du groupe 3 des éliminatoires derrière la Yougoslavie. La Fédération française de football accepte dans un premier temps avant de finalement décliner l'invitation.
↑La place est proposée au Portugal, deuxième du groupe 6 des éliminatoires derrière l'Espagne, qui décline l'invitation. L'Irlande, deuxième du groupe 5 des éliminatoires, reçoit également une invitation pour l'une des places vacantes mais, après un temps d'hésitation, refuse à son tour.
↑ ab et cLe classement précis des trois équipes terminant à égalité de points (Angleterre, Chili, USA) derrière l'Espagne (qualifiée pour la poule finale) sera confirmé ultérieurement par la FIFA. À noter que ce classement ne diffère pas, quel que soit le mode de calcul appliqué : celui de la différence de buts (actuel) ou celui de la moyenne de buts (en vigueur à l'époque).
↑Massimo di Terlizzi, « Viaggio nelle grandi arene che hanno fatto la storia del calcio », Stadi da leggenda (SEM), 2010, en italienne. (lire en ligne)