Colonne serpentineLa Colonne serpentine (grec moderne : Τρικάρηνος Όφις; turc : Yılanlı Sütun) est la partie subsistante de l'une des plus célèbres offrandes de l'Antiquité, le trépied de Platées (ou trépied de Delphes) offert par les Grecs coalisés au dieu Apollon à Delphes à la suite de leur victoire sur les Perses à Platées en 479 av. J.-C. Façonné à partir d'une portion de l'immense butin saisi par les vainqueurs dans le camp de Mardonios après la bataille, ce monument se présentait à l'origine comme une colonne de bronze formée des corps entrelacés de trois serpents dont les têtes portaient un trépied en or. L'or du trépied fut confisqué et fondu par les Phocidiens au cours de la troisième guerre sacrée au milieu du IVe siècle av. J.-C. La colonne aux serpents resta en place à Delphes jusqu'au règne de l'empereur Constantin (306-337), qui ordonna son transfert à Constantinople pour orner l'hippodrome de sa nouvelle capitale. Au fil des siècles, la colonne de bronze subit divers dommages. L'une des têtes de serpent eut sa mâchoire fracassée au XVIe siècle. En l'an 1700, ce sont les trois têtes qui tombent et sont perdues dans la même nuit au cours de circonstances mal connues. La partie supérieure de l'une de ces têtes, retrouvée en 1848, est maintenant exposée au Musée archéologique d'Istanbul. La Colonne serpentine se dresse encore aujourd'hui sur la place du Sultan-Ahmet à Istanbul (en turc, « Sultanahmet Meydanı », également appelée « At Meydanı », place aux chevaux), à l'endroit où elle fut installée au IVe siècle après son déménagement depuis le sanctuaire delphique. Elle est ainsi l'une des très rares œuvres artistiques qui ornaient autrefois l'antique Constantinople à avoir survécu in situ. HistoriqueSelon Hérodote[1], après la victoire de Platées en -479, les vainqueurs grecs coalisés utilisèrent la dîme (c'est-à-dire le dixième) du butin trouvé dans le camp perse du général Mardonios pour offrir trois monuments à leurs dieux : une statue de Poséidon en bronze, haute de sept coudées, pour le sanctuaire du dieu des mers près de l'isthme de Corinthe ; un Zeus en bronze, haut de dix coudées, pour le temple de ce dieu à Olympie ; ainsi qu'un trépied d'or, soutenu par une colonne de bronze formée de serpents enroulés, pour le sanctuaire d'Apollon à Delphes. De ces trois monuments, le plus mal connu est le Poséidon en bronze de l'Isthme, qu'on ne connaît que par Hérodote[2]. On en sait un peu plus sur le second, la statue de Zeus d'Olympie, grâce à Pausanias le Périégète qui a visité la cité au IIe siècle de notre ère. Selon lui, la statue se dressait près du bouleutérion et était tournée vers l'est. Sur sa base, du côté droit, étaient inscrites le nom des cités ayant participé à la bataille de Platées. Pausanias précise que la statue était l'œuvre d'un sculpteur nommé Anaxagore d'Égine (en)[3]. Le monument pour Apollon, quant à lui, se dressait dans le sanctuaire de Delphes, en face de l'autel du dieu. Sur une base en forme de cloche, se dressait une colonne de bronze représentant trois serpents enlacés dont les têtes portaient un trépied en or. Le trépied fut fondu par les Phocidiens durant la troisième guerre sacrée (356 à 346 av. J.-C.), pour payer leurs mercenaires. Lorsque Constantin fonda sa nouvelle capitale, Constantinople, au début du IVe siècle, il l'orna avec de nombreuses œuvres d'art provenant des sanctuaires païens, dont la colonne aux serpents. La colonne était située parmi d'autres ornements sur la spina de l'hippodrome de Constantinople, espace central autour duquel se déroulaient les courses de chars. L'érection d'un monument tel que celui-ci dans l'hippodrome peut avoir servi à rappeler aux spectateurs que Delphes était considéré comme l'omphalos (le centre) du monde, et que l'endroit où on avait réédifié le monument était devenu le nouveau centre du monde[4]. En 1700, les têtes des serpents furent brisées, mais l'une d'entre elles fut retrouvée par l'architecte Gaspare Fossati lors de fouilles faites autour de Sainte-Sophie en 1848. Elle est exposée au musée archéologique d'Istanbul[5]. InscriptionAu bas de la Colonne serpentine, dégagée complètement par Charles Thomas Newton en 1855, se trouve gravée une célèbre inscription qui énumère 31 cités grecques ayant participé aux batailles de Platées ou de Salamine dans le camp des Grecs. Cette inscription a été rédigée dans un dialecte du grec ancien, au moyen d'une variante locale archaïque de l'alphabet grec. Selon les spécialistes, ce dialecte et cet alphabet sont soit laconiens[6], soit phocidiens[7] (l'alphabet peut alors aussi être dit delphique[8] ou delphien[9]). L'inscription se trouve sur les anneaux formés par les corps enroulés des trois serpents, plus particulièrement entre le troisième et le treizième anneau (comptés à partir du sol). En voici la traduction française :
Réplique à DelphesLe , le Conseil archéologique central de la Grèce a annoncé l'érection prochaine dans le sanctuaire de Delphes d'une réplique de la Colonne serpentine qui serait réalisée en bronze à partir d'un moulage en plâtre de l'original, moulage conservé depuis 1980 au musée archéologique de Delphes[11]. Cette réplique, placée sur un socle campaniforme en pierre reconstituée, a été inaugurée le . Voir aussiBibliographie
Liens externes
Notes
|