Chronologie de l'altermondialisme

Cet article établit une chronologie de l'altermondialisme, de ses origines à aujourd'hui.

Chronologie succincte des mouvements altermondialistes

Les oppositions à la mondialisation telle qu'elle se présente aujourd'hui semblent démarrer dans les années 1980 dans les pays du Sud avec la lutte contre la dette du Tiers monde, et dans les pays du Nord, avec la recherche d'alternatives à la croissance et à la consommation énergivores.

Dans les années 1990, commencent à se faire jour des mobilisations internationales, qui ne commenceront à être connues et médiatisées qu'à partir de la mobilisation contre l'OMC à Seattle. Pour les mouvements sociaux, il y a vraiment un avant et un après Seattle. Le mouvement se reconnaît et est reconnu comme altermondialiste. Il existe une fraction antimondialiste.

Ensuite dans les années 2000, avec notamment les forums sociaux mondiaux, l'altermondialisme entre dans une phase d'organisation de rencontres permettant aux associations altermondialistes de constituer des réseaux, de débattre, de penser à des propositions alternatives. Des représentants d'ONG sont invités en 2000 et 2001 au Forum économique mondial (Davos). Les mobilisations continuent avec une revendication supplémentaire, l'opposition à la guerre en Irak.

Cette phase montre une certaine tendance à l'institutionnalisation de structures telles les forums sociaux, conjointement à la création de réseaux de mouvements locaux, et aussi un désintérêt croissant de l'opinion publique pour ces thèses, notamment en France qui fut l'un de leurs berceaux.

Rappelons que l'altermondialisme prend des racines dans l'opposition à la mondialisation néo-libérale et est encore nommée antiglobalisation (et ses militants les antimondialistes renommés pour la majorité des mouvements à la fin des années 1990 : altermondialistes), par exemple dans le monde anglophone bien que ce terme y soit également contesté[Note 1].

Les années 1980 (prémices)

Émergence des protestations dans certains pays du Tiers Monde contre la Banque mondiale et les mesures du FMI (Ajustement structurel) et des rencontres internationales d'ONG[Note 2] pour des sommets parallèles ou des alternatives économiques. Croissance du mouvement écologiste[Note 3] amorcé dans les années 1970 et fondation aux États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne de l'Ouest, etc. de groupes écologistes radicaux.

  • 1972 : Sommet de Stockholm sur l'Environnement Humain et Forum associatif, sur un terrain d'aviation abandonné laissé à disposition par la mairie[1].
  • 1982 : Début de la crise de la dette pour les pays du Tiers monde (notamment la crise mexicaine)
  • 1983 : Mexique constitution de l'armée zapatiste de libération nationale (EZLN) et du mouvement urbain populaire (MUP).
  • 1984 : Londres G7 organisation parallèle de L'autre sommet économique, (The Other Economic Summit - TOES)[2]
  • 1985 : Inde manifestations massives contre des projets de grands barrages de la BM
  • 1988 : Berlin-Ouest contre-sommet BM/FMI[3]
  • 1989 : Paris G7: Sommet alternatif, the other economic summit, TOES 89[4] et manifestation, concert de protestation « ça suffit comme ça »

Les années 1990

  • Émergence de campagnes internationales par ex « campagne vêtements propres » (clean clothes) promues par des ONG internationales, et à la fin des années 1990, campagnes pour l'abolition de la dette du Tiers monde ; l'affaire McLibel, long procès opposant des militants écologistes et McDonald's, création de coordinations internationales d'associations de terrain : Via Campesina[5], Action Mondiale des Peuples, etc., fondation d'ATTAC.

Au niveau européen : Marches européennes contre le chômage (1996), au niveau des pays : grands mouvements nationaux de grève (Corée ; France en 1995), etc. Mouvement des sans-terre (Brésil), actions de mouvements écologistes radicaux au R-Uetc.

  • En Amérique du Sud, des organisations indigènes commémorent les "500 ans de résistance à la colonisation" : la CONAIE en Équateur. première journée sans achat qui sera reprise plus tard internationalement par Adbusters, invitant à une réflexion sur la surconsommation.
  • Juin : Rio de Janeiro, Brésil Forum mondial de 1992, 17 000 personnes, y compris 7 150 ONG de 165 pays pour deux semaines de manifestations, conférences et expositions parallèlement au deuxième Sommet de la Terre de Rio[6].
  • Octobre : Bangalore en Inde : manifestations de plus de 500 000 personnes pour protester contre le cycle de négociations de l'OMC (Uruguay round)[7]
  • La BM accepte de mettre en place un Conseil d'Inspection indépendant qui pourra enquêter sur les plaintes des communautés affectées par des projets de la BM suspectés de n'avoir pas respecté les procédures légales.
  • Création de Via Campesina
  • Sortie de l'ouvrage de Pierre Bourdieu, La Misère du monde

En Inde, dans la vallée de Narmada, après des années de protestations locales, relayées internationalement par notamment Vandana Shiva et Arundhati Roy, la BM abandonne un projet de barrage à la demande de l'Inde[8].

  • Janvier
  • Octobre Madrid : forum alternatif « Les autres voix de la planète », avec notamment pour les pays les moins avancés, une remise en question du modèle économique de développement
  • Création de la coalition d'associations Les autres voix de la planète (continuation de 50 ans, c'est assez)[9].

Lancement de l’initiative pays pauvres très endettés par la BM/FMI

Développement du concept de « souveraineté alimentaire » par Via Campesina

Les négociations de l'Accord multilatéral sur l'investissement (AMI) ont commencé à L'OCDE en 1995. L'AMI est révélé au public en 1997, d'abord au Canada par l'organisation de Maude Barlow et Tony Clarke : Council of canadians The Council of Canadians - Le Conseil des canadiens, puis aux États-Unis, enfin en France par l'association Ecoropa et l'Observatoire de la mondialisation. C'est le début d'une mobilisation qui réunit d'abord quelques environnementaliste et syndicalistes. Très vite celle-ci va prendre de l'ampleur et s'étendre à l'Inde, à plusieurs pays européens, à la Nouvelle-Zélande... (voir avril 98)
Crise de l'Asie du Sud-est

  • Dates Manifestations contre la Banque mondiale et le FMI en Afrique du Sud.
  • Juillet : ( au ) : Espagne seconde Rencontre intercontinentale des peuples contre le néolibéralisme : idée d'une coordination de groupes de base (qui donnera naissance à l'AMP)
  • Décembre : Parution du numéro de décembre 1997 du journal Le Monde diplomatique, dans lequel son directeur, Ignacio Ramonet, publie un éditorial intitulé Désarmer les marchés[11] et appelant à créer la dite « Association pour une taxe Tobin d'aide aux citoyens ». Cet appel reçut des milliers de réponses et fut ainsi à l'origine de la création de ATTAC, la première organisation faisant la promotion de l'idée d'une taxe sur les transactions financires et qui se dénomma plus tard « altermondialiste » parce que proclamant qu'« un autre monde est possible ».

Le , premier meeting contre l'AMI en France au Théâtre de l'Odéon à Paris ; la réunion est organisée par les premières ONG mobilisées et avec le soutien du Syndicat Français des Artistes. S'y retrouvent de nombreuses personnalités, intellectuels, chercheurs, économistes, animateurs de mouvements sociaux, artistes dont Jeanne Moreau, Bertrand Tavernier, Cédrick Klapisch...

  • 27 et  : réunion ministérielle à l'OCDE pour finaliser les négogations sur l'AMI. Sous la pression des mobilisations, notamment une mobilisation exemplaire sous les fenêtres de l'OCDE, la France se retire - annonce faite à l'Assemblée nationale par Lionel Jospin, alors premier ministre, et entraînant la suspension des négociations[Note 4].
  • Mai
    • Angleterre sommet du G8 sur l'allègement de la dette : 70 000 manifestants à Birmingham. Le sommet doit être déplacé.
    • deuxième conférence ministérielle de l'OMC à Genève, pour les 50 ans du GATT : manifestations dans 17 villes dans le monde, dont Genève. 200 000 personnes à Hyderabad Inde
  • Juin : création de l'association ATTAC en France
  • Septembre : BM New Delhi Inde 100 000 personnes
  • Décembre : sommet européen, appel de Vienne, (propositions alternatives économiques) lancé par les Marches européennes[Note 5]

Campagne internationale pour l'annulation de la dette du Tiers-Monde (Jubilé Sud)

  • Création d'Indymedia
  • Juin
    • Cologne Sommet du G8, manifestation et remise d'une pétition (20 millions de signatures) pour l'annulation de la dette
    • J18 -  : une journée internationale de manifestations festives - à Londres 10 000 personnes pénètrent dans la City (cf. Reclaim the streets)
    • Caravane intercontinentale : 500 personnes dont 400 paysans indiens traversent les continents
  • Date ? Manifestations contre la Banque mondiale et le FMI - Roumanie (19 mai 1999 à Bucarest), Mexique, Argentine
  • Août : Millau France démontage d'une sandwicherie McDonald's en chantier à Millau par des membres du syndicat agricole français Confédération paysanne, affaire qui deviendra célèbre dans la lutte contre la « malbouffe ».
  • -décembre : Seattle, EU, sommet de l'OMC : des manifestations (50 000 personnes) réussissent à bloquer l'événement. présence massive de l'AFL-CIO. de nombreuses manifestations se déroulent dans diverses villes partout dans le monde. Début médiatisé des « groupes d'affinité » (exemple : DAN direct action network).

Les années 2000

L'après Seattle, les forums sociaux, etc.

  • Janvier : parution de No Logo, la tyrannie des marques de Naomi Klein
  • Avril
    • Washington, DC : semaine de mobilisation, manifestation (10 à 15 000 personnes) contre la réunion de l'OMC, 1 300 personnes arrêtées[12].
    • Kenya manifestation contre la dette,
    • Bolivie, des manifestations de masse pour l'eau, bien public
  • Mai
    • 1er mai : 10 000 manifestants convergent vers Londres, Reclaim the streets, qui incite à la réappropriation des espaces publics,
    • Argentine près de 80 000 manifestants contre le FMI
  • Juin
    • Argentine, plus de 7 millions de grévistes contre la loi du travail dictée par le FMI.
    •  : Millau, France, rassemblement de 100 000 personnes pour soutenir la Conf dans le "procès Macdo"
  • Juillet
    • Okinawa Japon 5 000 manifestants contre la BM
    • Juillet-Août : aux EU, manifestations durant les conventions des partis : républicain (juillet), démocrate (août),
  • Septembre
    • Melbourne, Australie : Forum économique mondial 10 000 à 30 000 manifestants lors de la journée nommée S11
    • Prague (Tchéquie) : rencontre de la BM et du FMI : protestations dans 44 pays et plus d'une centaine de villes. à Prague, 20 000 manifestants. 500 arrestations. réunion écourtée de son dernier jour à cause des manifestations[10].
  • Octobre
    • 17 octobre : conclusion de la Marche mondiale des Femmes contre la pauvreté et la violence envers les femmes : manifestations dans de nombreux pays (dont 300 000 manifestantes en Inde); manifestations finales à Washington et à New York : remise de pétitions au siège de l'ONU ainsi qu'une série de propositions pour éradiquer la pauvreté et la violence.
    • Séoul Corée du Sud ASEAN traité, manifestation de 20 000 travailleurs et étudiants
  • Novembre : Montréal, Québec, rencontre du G20 protestation
  • Décembre : Nice, France, contre le sommet européen, manifestations durant plusieurs jours, 90 000 à 100 000 participants, dont les syndicats. présentation d'une charte sociale en contrepoint au traité de Nice

« Ces jours là ont été bafoués et niés tous les droits que notre Constitution garantit aux personnes arrêtées et aux prisonniers. Aucun d’entre eux, italiens ou étrangers, n’a pu contacter un avocat, des parents, le consulat. Il ne fut communiqué à aucun d’entre eux le motif de leur arrestation, où ils se trouvaient, où ils seraient emmenés ensuite. Bien que nombre d’entre eux étaient blessés (68 d’entre eux venaient de l’Ecole Diaz), ils n’ont pas été soignés, ils ont dû signer de fausses déclarations sous la contrainte et déclarer qu’ils ne voulaient pas contacter d’avocats ou leur consulat. Aucun d’entre eux n’a eu le droit de manger, boire, dormir, ils furent obligés de rester debout contre le mur, bras levés, pendant de nombreuses heures. »

— Enrica Bartesaghi, 2002, [13],[14]

  • Septembre
    • Réunion de la BM à Washington annulée (à cause des attentats du )
    • à Washington, DC, manifestations anticapitalistes et contre la guerre, (dcS29)
    • Cochabamba, Bolivie : troisième réunion de Action mondiale des peuples
  • Novembre : Doha Qatar réunion de l'OMC - actions organisées dans près d'une centaine de villes dans le monde, dont New Delhi (25 000 manifestants)
  • Décembre : Bruxelles Belgique sommet UE journée D13 : 80 000 à 100 000 personnes dans la marche pour une autre Europe, le lendemain, journée D14 : 25 000 personnes
  • Janvier
    • Belém (Brésil) Forum des régions amazoniennes, avec les peuples indigènes, débat sur la conservation de la forêt amazonienne
    • Bamako (Mali) premier Forum Social Africain (FSA)
    • Beyrouth (Liban) Forum du Moyen-Orient (date ou )
  • Février
    • Le FEM se réunit à New-York au lieu du traditionnel Davos tandis qu'à Porto Alegre se tient le deuxième Forum social mondial (du au )
    • Porto Alegre Tribunal des Peuples contre la Dette
  • Mars : Barcelone, (Espagne), sommet de l'UE : 200 000 manifestants pour une autre Europe, alors que les frontières avaient été bloquées
  • Avril : Washington, DC (War on Terrorism) manifestation pour la paix
  • Juin
  • Juillet : Siby (Mali), rencontre pour une nouvelle stratégie de coopération pour le développement africain (NEPAD)[Note 8] - premier Forum des peuples
  • Août : Johannesbourg (Afrique du Sud), troisième Sommet de la Terre, pour le développement durable, présence chaque jour de manifestations pour appuyer un programme de développement durable[15] de 15 000 à 40 000 personnes
  • Septembre : Washington, DC, BM/FMI
  • Novembre : le premier Forum social européen à Florence, Italie
Loin de parvenir à une normalisation pour le pouvoir mexicain, les zones insurgées du Chiapas se dotent en 2003 d'assemblées locales nommées junta de buen gobierno : de l'autodétermination en 1994, on parvient quasiment à une situation d'autonomie localement.

Démarrage d'initiatives de communes, municipalités ou régions « hors-AGCS »

  • Janvier
    • Bombay (Mumbai, Inde) : quatrième Forum social mondial : entre 80 000 et 100 000 participants
    • 1re journée internationale d'action "Europe sans frontières" pour la régularisation des sans-papiers, l'ouverture des frontières : dans 50 villes de 11 pays d'Europe, organisé par le réseau No Border[17]
  • Mai : forum mondial des autorités locales (Barcelone ?)
  • Juillet
    • Quito Équateur premier Forum social des Amériques 400 conférences, tables rondes, etc. et la tenue d'un forum des autorités locales des Amériques[Note 9]
    • Mali troisième Forum des peuples
  • Octobre : Londres troisième Forum social européen
  • Décembre : Lusaka, Zambie troisième Forum Social Africain
  • Europe, le projet de traité de constitution provoque de larges débats, spécialement en France dans le mouvement altermondialiste
  • Forum social à Belém (Brésil)
  • Avril : premier Sommet de peuples à Cochabamba (Bolivie).
  • Forum social à Dakar (Sénégal.
  • Juin : deuxième Sommet des peuples à Rio de Janeiro (Brésil) en marge du sommet officiel Rio+20[20].

Notes et références

Notes

  1. 1999 semble être la date d'apparition du terme altermondialisme.
  2. Quoique les premières rencontres internationales d'ONG eurent lieu dans les années 1970 : 1972, en parallèle au sommet des Nations unies pour le développement humain, de même en 1975 pour la première conférence des femmes (ONU) à Mexico
  3. Voir la chronologie de l'écologisme.
  4. remplacé par des APPI accords bilatéraux
  5. ne pas confondre avec l'appel de Vienne de novembre des ONG
  6. échec d'une visioconférence entre les deux Forums
  7. Les audiences préliminaires commencées le 28 janvier 2005 de 47 carabinieri, policiers, gardiens, médecins et infirmiers pour les sévices et tortures infligés aux militants et personnes raflées dans la caserne Bolzaneto (mais le délit de torture n’existe pas en Italie). Le procès en avril 2005 de 28 des policiers qui sont intervenus à l’école Diaz accusés d’intrusion, destructions, violents tabassages, falsifications, montage de « preuves » après coup contre les 93 hôtes de l’école. Procès suite au G8 de Gênes (juillet 2001) - AC ! - Agir ensemble contre le chômage
  8. organisée par Jubilé 2000, CAD Mali et d'autres associations du Mali et site du NEPAD
  9. Forum des autorités locales en faveur de l'intégration sociale, réunissant des élus locaux

Références

  1. Claude-Marie Vadrot, Déclaration des Droits de la Nature, Stock, 1972.
  2. Plus d'une centaine d'experts venant de 16 pays différents. source : site de James Robertson voir aussi James Robertson
  3. Hugues Jallon, Mouvements, N° 25, 2003.
  4. Le contre-sommet de l'Arche TOES qui s'ouvre à des délégués d'ONG
  5. Geoffrey Pleyers, « Brève histoire du mouvement altermondialiste », La Vie des idées,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. compte rendu de l'ONU
  7. voir chrono de l'altermondialisme ! incluant aussi le 11 septembre 2001
  8. La bourse ou la vie de Éric Toussaint
  9. a et b dossier univ. de Lyon Le contre-sommet de l'Arche
  10. a et b (en) fac. de socio. de Warwick
  11. Ignacio Ramonet, « Désarmer les marchés » - Le Monde diplomatique, décembre 1997
  12. communiqué des Amis de la terre
  13. Les Violences policières du G8 à Gênes - Attac France
  14. Consulter l'observatoire international sur les procès de Gênes, en français.
  15. (en) site de Global Issues
  16. (en) Sacramento 2003 : action report/fieldnotes - Amory Starr, Trabal.org
  17. voir noborder network
  18. Fighting "Jurassic Park" capitalism - Russian Social Forum Success
  19. « Atlanta accueille le premier Forum social étasunien », dans Courrier international du 26 juin 2007, [lire en ligne]
  20. Nicolas Bourcier, "Rio+20. Un Sommet des peuples sous pression", Le Monde, 19 juin 2012.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes