ChibotteUne chibotte est, dans la littérature touristique de la Haute-Loire, une cabane en pierre sèche, le terme vernaculaire, employé par les vignerons constructeurs et utilisateurs de ces édifices, étant tsabana, en français local tsabone (c'est-à-dire « cabane »). Ces cabanes sont liées à un vaste mouvement de création de parcelles viticoles, principalement au XIXe siècle. Origines du termeLe terme a été répandu dans la première moitié du XXe siècle par l'érudit Albert Boudon-Lashermes (1882-1967), qui l'avait emprunté au toponyme chabotta rencontré dans des textes médiévaux et désignant une habitation permanente rudimentaire, une masure[1],[2]. Le terme vernaculaire authentique, employé par les vignerons constructeurs et utilisateurs de ces édifices, était tsabana, en français local tsabone (cabane)[3]. Cette substitution était le corollaire d'une mythification des cabanes, promues au rang de « ligures » par ce savant. « Un auteur du pays à l’imagination vive leur attribue une origine ligure », écrit en 1928 le rédacteur de la revue Vie à la campagne (numéro extraordinaire du , p. 15). FonctionsLes chibottes ou tsabones étaient, au XIXe siècle, des habitations temporaires ou saisonnières dans les champs et les vignes. Ainsi des habitants du Puy-en-Velay qui possédaient une vigne à Vals-près-le-Puy, y avaient généralement une chibotte qu'ils occupaient le dimanche et pendant l'été, selon un schéma rencontré dans de nombreuses régions du Midi[4],[5]. Dans les années 1920-1930, ces cabanes, d'un emploi malcommode, commencèrent à être abandonnées pour de petits pavillons carrés, maçonnés et à toit de tuile plate, plus confortables[4],[5]. MatériauxÉtant donné la nature géologique des plateaux volcaniques du Velay, les matériaux employés à la construction des chibottes sont des matériaux d'origine volcanique[6]. À Vals-près-le-Puy, il s'agit de dalles et de blocs de basalte, extraits sur place lors du dérochement[7] nécessaire à l'établissement des parcelles de vigne. On peut penser que, comme ce fut le cas dans d'autres régions, la poudre et des outils en acier furent employés pour mener à bien ce travail, produisant d'énormes quantités de matériaux lithiques[8],[6]. On distingue deux morphologies de matériau, à la place et à la fonction bien distinctes dans un même édifice :
Si les lauses de la « peau » intérieure ne sont jamais taillées, par contre elles sont souvent fracturées, sans doute pour en réduire les dimensions et obtenir un meilleur jointoyage. Les pierres du parement extérieur sont, quant à elles, quelconques. On note l'emploi de très gros blocs à la base, puis de pierres de moins en moins grosses à mesure que l'on se rapproche du sommet[9]. Quant à l'encadrement de l'entrée, il est souvent en blocs de brèche basaltique, plus rarement en blocs de ponce volcanique. Deux faces sont alors taillées : celle en façade et celle de l'embrasure [9]. Procédés de constructionL'originalité architecturale des chibottes vient de l'emploi de la technique dite « des deux peaux ». Prenons une construction circulaire. Intérieurement, on a une voûte de plaquettes encorbelées et inclinées, c'est-à-dire une succession verticale d'anneaux, à diamètre dégressif, dont les éléments sont inclinés vers l'extérieur (selon un angle de l'ordre de 15°). Du fait de cette inclinaison, chaque assise est témoin d'un phénomène de contrebutement entre ses éléments, ces derniers agissant comme autant de claveaux. Ce phénomène entraîne la fermeture d'un polygone des forces : chaque assise est alors clavée horizontalement[9]. Extérieurement, on a, épousant la forme de la voûte, un parement de moellons disposés avec une inclinaison vers l'intérieur, le rôle de ces moellons étant de caler les lauses en les empêchant de glisser et de se disjoindre[9]. La construction de ce type de voûtement qui associe de façon complémentaire voûte intérieure et revêtement extérieur, se fait assise par assise, et non point en érigeant d'abord la voûte et ensuite le revêtement extérieur[9]. Caractéristiques architecturalesSi l'on fait abstraction des guérites, les cabanes visibles actuellement relèvent d'un type morphologique et constructif bien caractéristique, dont les grands traits peuvent se définir comme suit :
Enseignements des cadastresLa comparaison des cadastres du lieudit Crousas à Vals semble indiquer que les cabanes qui s'y trouvent sont liées au morcellement d'une vaste propriété détenue par une seule personne[11] et à l'établissement de parcelles viticoles en ces lieux entre le milieu du XVIIIe siècle et le début du XIXe[12]. Enseignements des millésimesQuelques rares millésimes ont été observés sur le linteau en brèche basaltique de quelques cabanes de Vals-près-le-Puy : 1786, 1761 et 1808. Cette rareté est sans doute imputable à la dureté des dalles de basalte employées comme linteau dans les autres cas. La fourchette chronologique concernée permet de cerner à quelle période se situe le mouvement de construction des cabanes[13]. ClassementLa chibotte du bois de Lirate, propriété de la commune, a été inscrite au titre des monuments historiques le [14]. Parcours des chibottesUn projet de restauration et de mise en valeur touristique de ces édifices, échafaudé dès 1976, a débouché, le 5 novembre 2011, sur l'inauguration d'un « parcours des chibottes »[15]. Le 8 mars 2016, les gorges du Dolaison et la « vallée des chibottes » sur les communes de Saint-Christophe-sur-Dolaison et de Vals-près-le-Puy devinrent site classé[16]. Notes et références
Voir aussiBibliographie(Ouvrages non cités en note)
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