Cellule d'urgence médico-psychologiqueLes cellules d’urgence médico-psychologique (CUMP) constituent, en France, un dispositif sanitaire spécifique de prise en charge précoce des blessés psychiques (ou « impliqués ») dans les situations d'urgence collective : accidents catastrophiques, catastrophes, ou encore attentats. Les CUMP interviennent dans le cadre du SAMU et sont placées sous la responsabilité des Agences Régionales de Santé (ARS). Les CUMP sont départementales et organisées en un réseau national de l'urgence médico-psychologique[1]. Mise en placeLes CUMP ont été créées par Xavier Emmanuelli, secrétaire d'État à l'action humanitaire d'urgence, en collaboration avec le Médecin Général Psychiatre des Armées Louis Crocq, sur instruction du président de la République Jacques Chirac à la suite de l'attentat du RER B à Saint-Michel à Paris, le [2]. Leur composition et leur modalité d'intervention ont été définies dans deux circulaires, en 1997[3] et en 2003[4], à la suite de la demande des médecins réanimateurs confrontés au traumatisme psychique des sauveteurs (notamment lors des catastrophes comme l'accident ferroviaire de la gare de Lyon en 1988 et la catastrophe de Furiani en 1992). Organisation et fonctionnementLa CUMP est déclenchée à l'initiative du SAMU et sur accord du médecin psychiatre coordonnateur CUMP. Celui-ci met alors en place un dispositif d'intervention adapté. Il peut s'agir d'une intervention immédiate, l'équipe de la CUMP pouvant alors se rendre sur les lieux de la catastrophe avec le SAMU, ou bien de l'organisation d'une intervention différée. Le but est de prendre en charge les « blessés psychique, en état de stress dépassé, choqués, prostrés » lors de catastrophes collectives[2]. La CUMP doit notamment repérer et traiter les personnes qui deviennent un danger pour elles-mêmes, par exemple sous le coup de la panique[2]. La CUMP n'a pas vocation à assurer le suivi prolongé des personnes pour lesquelles cela est nécessaire. Celles-ci sont alors orientées vers des professionnels susceptibles de les prendre en charge. Les CUMP travaillent étroitement avec les autres forces de secours comme les sauveteurs sociopsychologique de la Protection Civile et de Croix rouge française). Les CUMP ont une organisation en différents niveaux géographiques (du local au national) assurant une coordination entre les différents niveaux qui permet d'assurer la mobilisations d'un nombre suffisant de volontaires en fonction de l'importance de la catastrophe. CUMP DépartementaleC'est le maillon de base. Les CUMP sont composées de volontaires, spécialistes du soin psychique (psychiatres, psychologues, aides-soignants et infirmiers ayant une expérience en psychiatrie) spécialement formés à ce type d'urgence. CUMP RégionaleChaque région est dotée d'une CUMP permanente gérée par un psychiatre coordonnateur qui est nommé par l'ARS. Elle basée dans le département abritant le chef-lieu de région. Ce qui signifie que tous les chefs-lieux de région disposent d'une CUMP permanente CUMP zonaleLe psychiatre coordonnateur de la région servant de siège à une Zone de défense et de sécurité assure également la coordination des CUMP au niveau zonal. En conséquence de quoi, le psychiatre coordonnateur d'un siège de zone de défense a forcément 3 « casquettes » : coordonnateur départemental, régional et zonal. Coordonnateur NationalUn coordonnateur national est nommé par décret du Ministre de la Santé. Il peut s'agir de n'importe quel psychiatre référent de CUMP. Pas forcément celui d'Ile-de-France, bien que soit actuellement le cas depuis 2013. Coordination avec d'autres plansDans le cadre d'événements catastrophiques, la CUMP est normalement mise en œuvre en parallèle à un plan d'urgence gérant la catastrophe en elle-même : plan blanc, plan Novi (pour NOmbreuses VIctimes), plan particulier d'intervention, plan Piratox... Les victimes sont envoyées vers la CUMP après triage médical : seules les victimes valides, parfois appelées « les impliqués », sont prises en charge par cette structure, les victimes blessées étant prise en charge par la chaîne médicale. Lors du tri, les victimes valides sont parfois étiquetées UMP pour « urgence médico-psychologique ». ÉvaluationCes interventions étant proposées de manière systématique, on pourrait après une période de recul, demander aux victimes si la présence des psychologues et psychiatres leur a paru souhaitable et utile. Cela a été fait dans un travail de thèse[5] mené de manière rétrospective auprès de rescapés pris en charge à Roissy lors de la crise du séisme du 26 décembre 2004 dans l'océan Indien. Selon ce travail auprès des rescapés revus à 6 mois, l'entretien initial avait eu un effet de soulagement important (15 %) ou partiel (59 %), 97 % avaient jugé l'écoute attentive et disponible, et 65 % le moment adapté. Selon un groupe de travail présidé par le Pr Didier Cremniter[6], une catastrophe de moyenne importance provoque 20 à 30 % de symptômes gravement dissociatifs. Les attentats du 13 novembre 2015 ont présenté entre 70 et 80 % de manifestations psychotraumatiques aiguës. Cinq à six mille personnes ont été prises en charge dans les trois semaines qui ont suivi les attentats, et six cents étaient encore suivie un an après. Du 1er juin au 30 octobre 2015, l'ARS de l'Île-de-France et l'InVS mettent en place une enquête épidémiologique nommée IMPACT (investigation des manifestations traumatiques post attentats et de la prise en charge thérapeutique et de soutien) pour mesurer les conséquences des attentats de janvier 2015 auprès des personnes impliquées et d’appréhender leurs parcours de soins et d’accompagnement[7]. Les conséquences psychologiques des attentats se révèlent lourdes : augmentation de la consommation des substances psychoactives (alcool, tabac, cannabis) dans 20 % des cas, 32 % des personnes ont dû arrêter de travailler et 11 % n'ont pas repris leurs activités professionnelles après six mois, 20 % souffrent de syndrome post-traumatique, 20 % de dépression et 30 % de troubles anxieux[8]. Les personnes prises en charge précocement (durant la semaine qui a suivi les attentats) montrent deux fois moins de troubles que les autres[9]. À la suite des attentats de novembre 2015, un programme d'étude baptisé « 13-Novembre » est lancé par le CNRS, de l’Inserm et HeSam Université pour suivre 1 000 personnes touchées directement ou indirectement par les attentats du 13 novembre 2015 pendant 10 ans[10]. L'un des volets du programme « 13-Novembre » est l'étude épidémiologique « ESPA 13 novembre » menée par Santé Publique France en partenariat avec l'Université Paris 13 qui vise à examiner de manière longitudinale les conséquences en matière de santé et les parcours de soin des personnes directement confrontées aux attentats, qu'elles soient civiles ou intervenants[11], [12] Critiques de l'évolution des CUMPDans un livre publié en 2015, Hélène Romano, ancienne coordinatrice de la CUMP du Val-de Marne, et le psychiatre Boris Cyrulnik dénoncent la sur-utilisation qui est faite des cellules d'urgence médico-psychologique. Leurs griefs sont que les CUMP sont parfois utilisées pour des « non-drames » (ils donnent comme exemples des voyageurs de retour d'un pays étranger où sévit une épidémie de grippe A, des automobilistes bloqués par la neige sur l'autoroute[2]...) Ils s'inquiètent aussi du risque qu'il y a à « psychiatriser la tristesse » : lors d'une mort brutale, le fait de rendre systématique le contact avec un psychologue risque de faire oublier qu'il est naturel d'être triste et que « le deuil n'est pas une maladie[2]. » Autres approchesDans les autres pays d'Europe (Belgique, Espagne) le soutien aux victimes n'est ni médical ni psychologique mais communautaire. Il est réalisé par des volontaires formés au soutien psychosocial[2]. Exemples d'interventions2001
2004
2005
2006
2015
— Louise, rescapée de l'attaque du Bataclan, « Bien sûr que je vais te vomir toute ma version dessus, tu vas pas comprendre, meuf »[13] Bibliographie & Filmographie
Notes et références
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