À ne pas confondre avec son homonyme la jouxtant, la « rue de Messine », l'avenue de Messine fut tracée en 1826 entre la rue de Plaisance (aujourd'hui rue de Téhéran) et les rues de Valois-du-Roule (aujourd'hui rue de Monceau) et de Lisbonne, sur les terrains appartenant à Jonas Hagerman et Sylvain Mignon, spéculateurs associés dans la création du quartier de l'Europe. Elle fut prolongée en 1862 jusqu'au boulevard Haussmann sur les terrains de l'ancien abattoir du Roule (voir « Rue de Miromesnil »).
L'avenue de Messine « était naguère patricienne, voire un peu austère, avec ses hôtels sans sourire et ses grands immeubles solennels, guindés, et qui paraissaient tellement soucieux de respectabilité. Il n'y avait pas un seul boutiquier, cela va de soi. Sur la façade d'une des maisons de l'avenue reste visible (en 1954) une plaque d'émail portant une inscription qui nous paraît assez naïve : ASCENSEUR. Je pense que le propriétaire, ayant eu quelque difficulté dans ses locations, entendait que nul n'ignorât le confort exceptionnel dont bénéficiait son immeuble[1] ».
Au carrefour entre l'avenue de Messine et le boulevard Haussmann (place du Pérou), une statue en bronze de William Shakespeare[2], « au chef mélancoliquement incliné et qui laissait traîner son manteau sur le socle[1] », due au sculpteur Paul Fournier, fut érigée en 1888 aux frais de William Knighton, ressortissant britannique qui habitait l'immeuble d'angle situé au 134, boulevard Haussmann. Elle fut fondue pendant la mobilisation des métaux non ferreux de la Seconde Guerre mondiale et ne fut pas remplacée[3]. Le souvenir en a été conservé par la papeterie À Shakespeare, située au 109, boulevard Haussmann, à l'angle de la rue d'Argenson.
Bâtiments remarquables et lieux de mémoire
de No 1 : galerie spécialisée dans la reproduction de tableaux fondée par le cycliste, skieur et pilote automobile Igor Troubetzkoy (1912-2008), reprise ensuite par son fils[4].
No 10 : habité par Henri Beraldi (1849-1931), historien d'art et grand collectionneur de livres et d'estampes romantiques[5], et par Ambroise Tardieu, agent de change[6]. Louis Carré (1897-1977) y a fondé en 1937 une célèbre galerie d'art spécialisée dans l'art moderne. C'est ici que Marcel Valtat avait installé les bureaux du CPA, Comité Permanent Amiante, ainsi que ses éditions et Communications économiques et sociales.
No 16 : hôtel du prince Jacques de Broglie (1878-1974), fils du prince Henri-Amédée de Broglie et de la princesse, née Marie Say, héritière des sucreries Say[5]. Le 19 octobre 1921, un attentat à la grenade y est perpétré contre l’ambassadeur des États-Unis Myron Timothy Herrick, alors domicilié à cette adresse ; cet attentat, qui ne fait qu’un blessé léger, s’inscrit dans le cadre de la campagne contre la condamnation à mort des anarchistes italiens Sacco et Vanzetti[8].
No 20 : le marchand d'art Paul Guillaume (1891-1934) y vécut avec son épouse Domenica (1898-1977) au début des années 1920[9],[10].
No 21 : fondation CIGREF.
No 22 (angle de la rue de la Bienfaisance) : hôtel de la sopranoitalienneLina Cavalieri (1874-1944), renommée pour sa beauté (en 1910)[11],[12]. Domicile de l’acteur Alain Delon de 1961 à 1968 (et de Romy Schneider jusqu'à leur séparation en 1963 puis Nathalie Delon, sa compagne et femme entre 1964 et 1969). L'escalier fut réalisé par Georges Geffroy. L’homme à tout faire de l’acteur, Stefan Markovitch, y habite un deux-pièces. C’est d’ailleurs sur le trottoir de l’avenue de Messine qu’il est aperçu vivant pour la dernière fois, le 22 septembre 1968 : on retrouve son corps quelques jours plus tard dans une décharge[13]. En 1967, le bâtiment sert de lieu de tournage au film Le Samouraï. Par la suite, espace culturel de l'ambassade d'Ukraine[14].
No 23 (angle de la rue de Messine) : au début du XXe siècle, c'était l'emplacement d'une maison de retraite avec une chapelle.
En 1906, l'édifice précédent est démoli et un hôtel particulier et une maison de rapport construits par l'architecte Jules Lavirotte, ornés de grès flammés d'Alexandre Bigot, sculpture décorative par Léon Binet, ferronnerie de Dondelinger, le remplace. En 1907, l'immeuble, qui ne compte alors que deux étages (le musée Carnavalet en conserve une photo), est primé au concours de façades de la ville de Paris.
No 23 bis : immeuble Art nouveau de 1906 construit par Léon Chesnay[15] ; banque d'affaires Rothschild et Cie.
No 25 : adresse supposée, dans un immeuble d'appartements à plusieurs étages, du personnage de l'amant dans la pièce de Sacha GuitryFaisons un rêve (1916) et le film que le même en a tiré.
No 30 : les bas-reliefs d’esprit maniériste encadrant la fenêtre centrale du premier étage, les Fleurs et les Fruits, sont l’œuvre du sculpteur Louis-Ernest Barrias et ont été sculptées en 1883[17].
L'AS Messine Paris, club sportif ayant existé de 1937 à 2012, tire son nom du Groupe Messine, compagnie d'électricité qui tirait elle-même son nom de la rue ou avenue de Messine, où elle avait son siège.