En musique, un appel et réponse, parfois désigné sous son nom anglais call and response, est une succession de deux phrases musicales, la deuxième phrase étant un commentaire ou une réponse à la première. L'appel et réponse, qui imite un dialogue, est un élément de base de la musique dans de nombreuses traditions.
L'appel et réponse peut se présenter sous différentes formes : imitation entre deux instruments, question/réponse ou encore des réponses variées à un même appel[1]. Dans les traditions afro-américaines, ce jeu est souvent improvisé[1].
Le procédé d'appel et réponse, bien que souvent rapproché de la musique africaine, est en réalité tout autant utilisé dans la musique européenne, indienne ou juive[2].
Dans la musique classique européenne, l'appel et réponse porte le nom d'antiphonie, soit une « musique dans laquelle un ensemble est divisé en deux groupes distincts, utilisés en opposition, souvent spatiale, et utilisant des contrastes de volume, tonalité, timbre , etc. »[3].
Influence africaine aux États-Unis
Dans les cultures sub-sahariennes, l'appel et réponse implique tout un groupe dans un rassemblement (cérémonie religieuse, enterrement, mariages…)[4]. Au fil des migrations, des colonisations et des transports d'esclaves, les traditions musicales africaines s'installent notamment sur le continent américain[4].
Les populations africaines déportées en Amérique comme esclaves transmettent oralement leurs traditions musicales[5]. Selon l'écrivaine Toni Morrison, l'appel et réponse est « caractéristique de la tradition esthétique africaine-américaine »[6], mettant en jeu « la nature collective de l'art, sa fonctionnalité, son essence improvisationnelle, son relationnel avec la performance de l'auditoire »[6].
Les work-songs sont généralement basées sur ce principe[7],[8]. On trouve cette forme en particulier dans le blues et dans les spirituals[1] ainsi que dans la technique du lining out(en) que l'on trouve dans le gospel, quand le prêtre chante une phrase qui est reprise par l'assemblée[2],[4]. On en trouve également dans le jazz[1], dans le funk ou le hip-hop[4].
Une forme d'appel et réponse a également une origine européenne : lorsque les Européens, familiarisés avec l'antiphonie, se sont installés au Nouveau Monde, ils ont emmené avec eux leur bagage culturel. On en trouve des traces dans les alléluias évangéliques[2],[4].
Quelques exemples
Blues
À l'origine, le blues est un genre vocal, souvent accompagné à la guitare. Chacune des phrases chantées est une question ou un appel (call), auquel répond l'instrument accompagnateur, dans la tradition africaine[9],[10].
Jazz
Le principe de l'appel et réponse est un des fondements du jazz, et on le retrouve dans tous les styles[11],[7]. Les musiciens se répondent les uns les autres, ils répondent aux cris du public, ils répondent aux danseurs[11]… De nombreux thèmes de standards de jazz sont basés sur l'appel et réponse, comme So What ou Moanin'[1],[12]. Dans l'improvisation, des musiciens peuvent se répondre, comme l'ont fait Ella Fitzgerald et Roy Eldridge[13].
Quand des esclaves africains arrivent sur les côtes péruviennes, au XIXe siècle, la tradition musicale africaine se mélange à la musique populaire espagnole pour devenir ce que l'on désigne comme la musique afro-péruvienne[14]. Le huachihualo en particulier se caractérise par des couplets en appel et réponse[14],.
La salsa, la rumba, le cha-cha-cha et le timba sont parfois également construits sur des appels et réponses, où le « coro » (le chœur) répond à un chanteur qui improvise un solo, le « pregón »[4].
(en) Clemens Wöllner, « Call and response: Musical and bodily interactions in jazz improvisation duos », Musicae Scientiae, vol. 2, no 1, , p. 44-59 (DOI10.1177/1029864918772004).
↑ ab et cPhilip Tagg (trad. Marie-Laure Boudreau, Martine Rhéaume et Philip Tagg), « Lettre ouverte sur les musiques « noires », « afro-américaines » et « européennes » », Volume !, vol. 6, nos 1-2, , p. 135-161 (DOI10.4000/volume.295).
↑« Antiphony », New Grove Dictionary of Music, Oxford University Press, 2001.