Jusqu'à John F. Kennedy, l'assistance militaire aux latino-américains a été restreinte, se concrétisant surtout dans les traités bilatéraux d'assistance militaire, signés dans le cadre du Mutual Security Act(en) de 1951[2]. À l'exception du Guatemala, où Jacobo Arbenz Guzmán est renversé en 1954 par la CIA, « l'Amérique latine n'est pas », pendant cette période, « une zone à haute priorité défensive »[2]. Avec le tournant Kennedy-Mc Namara de 1962, « la sécurité intérieure et la lutte antisubversive se substituent à la politique commune de défense contre une agression extérieure » (A. Rouquié, 1982[2]). L'aide militaire va alors s'institutionnaliser davantage, mettant l'accent sur l'anticommunisme et l'« action civique », en vue de « convertir des armées de défense hémisphériques en forces de l'ordre intérieur mobilisées contre la subversion communiste »[3].
À Fort Gulick, 20 % du programme des officiers portait ainsi sur le communisme[4]. Les programmes d'assistance militaire (PAM), dont l'École des Amériques n'était qu'un chaînon, étaient coordonnées par le Southern Command, transféré au Panama en 1963[5]. Les stages duraient de 4 à 40 semaines[6].
Autres programmes de collaboration militaire et effets de celle-ci
« À la limite, un stage de contre-guérilla assorti d'un endoctrinement anticommuniste simpliste et épais peut engendrer des réactions anti-américaines, tandis qu'un stage technique de niveau élevé pour arme savante dans une école militaire des États-Unis non spécialisée dans l'entraînement d'officiers étrangers peut au contraire créer des loyautés et une admiration sans bornes pour l’american way of life[7]. »
Rouquié souligne toutefois que la « diplomatie du relais militaire » a pu servir comme « substitut à l'intervention directe des États-Unis »[8], par exemple lors du renversement de Joao Goulart au Brésil (1964) ou d'Allende au Chili (1973)[8]. En poste à Brasilia, l'ambassadeur Lincoln Gordon reconnaissait alors que l'assistance militaire avait été « un élément important pour influencer dans un sens pro-US les militaires brésiliens »[8]. Toutefois, des pays comme l'Argentine ou le Brésil, qui ont bénéficié d'une assistance militaire élevée, n'ont envoyé qu'un faible nombre d'officiers au Panama[9]. L'anticommunisme des militaires brésiliens date ainsi du soulèvement communiste raté de 1935 (l’Intentona Comunista), dont l'écrasement a été célébré tous les ans jusqu'à l'élction de Cardoso; en Argentine, c'est la Semaine tragique de 1919 qui a marqué le début de l'antibolchévisme militaire[6].
Selon Rouquié, l'effet le plus important de l'assistance militaire des États-Unis fut plutôt de « r« enforcer la confiance institutionnelle des officiers et [d']accroître la conscience de leurs capacités techniques et organisationnelles supérieures à celles des civils. Sur ce plan, les stages strictement professionnels ou technologiques ont convergé avec l'apprentissage idéologique contre-révolutionnaire. » »[12] Les cours administratifs ont eu ainsi une place tout aussi importante que les cours de contre-insurrection. En revanche, la réticence de Washington, de 1962 jusqu'à Reagan (avec quelques exceptions sous Nixon et Ford) à fournir davantage que des armes légères aux armées latino-américaines a pu engendrer certaines frustrations, notamment au Pérou, en Argentine ou au Brésil[13].
Celle-ci a été dissoute par le National Defense Authorization Act de 2001 et renommée « Institut de l'hémisphère occidental pour la sécurité et la coopération » (Western Hemisphere Institute for Security Cooperation, WHINSEC)[16]. Selon la nouvelle loi, le but de l'institut est de :
« fournir la formation professionnelle au personnel militaire des nations de l'hémisphère occidental dans le cadre des principes démocratiques énoncés dans la Charte de l'Organisation des États américains, tout en favorisant la connaissance mutuelle, la transparence, la confiance et la coopération entre les pays participants ainsi que la promotion des valeurs démocratiques, le respect des droits de l'homme, et de la connaissance et la compréhension des États-Unis des coutumes et des traditions[réf. nécessaire]. »
Ainsi chaque élève doit recevoir au moins huit heures d'enseignement sur les « droits de l'homme, la primauté du droit, le respect de la légalité, le contrôle civil du militaire, et le rôle de l'armée dans une société démocratique »[réf. nécessaire]. Les cours doivent notamment se concentrer sur le développement du leadership, sur les opérations de lutte contre le trafic de stupéfiants, les opérations de maintien de la paix, les secours en cas de catastrophe, ou toute autre question que le secrétaire à la Défense des États-Unis estime approprié[réf. nécessaire].
En 2001, étant donné sa mise en cause dans la formation de plusieurs militaires et dirigeants de junte militaires accusés de violation de droits de l'homme et d'actes de torture, et bien que les dirigeants de l'école aient fait valoir qu'elle ne devait pas être tenue responsable pour les actions de quelques-uns seulement de ses diplômés, un amendement bipartisan fut déposé à la Chambre des représentants des États-Unis, visant à fermer l'École des Amériques, et à engager une enquête menée par le Congrès[réf. nécessaire]. La Chambre refusa de le ratifier, à dix voix près[réf. nécessaire].
↑Titine Kriesi, « Il faut élaborer des perspectives agissantes contre la ruine menaçante causée par le gros capital» in Horizons et débats, 18 mai 2009, no 19, p. 6.
Annexes
Bibliographie
Alain Rouquié, L'État militaire en Amérique latine, Paris, Seuil, 1982.
Traduction anglaise : The Military and the State in Latin America, Berkeley (Cal.), University of California Press, 1987 (en ligne, voir en particulier ce chapitre : [lire en ligne]).