En Normandie (particulièrement en pays de Caux et dans le Calvados), la valleuse, appelée cran dans les Hauts-de-France[2], est une petite vallée perchée, dont l'existence s'explique par un recul de la falaise plus rapide que le creusement vertical dû à l'érosion fluviatile. Drainées ou le plus souvent sèches et principalement adaptées à la structure (souvent perpendiculaires, voire obliques au rivage), ces vallées forment un accès naturel ou aménagé à la Manche. Sur le reste de la côte, cet accès est généralement empêché par la hauteur des falaises crayeuses.
les valleuses vives : dépressions naturelles (Fécamp, Yport, Étretat...) encore attaquées par l'érosion ;
les valleuses mortes sont dues à une action marine passée. Elles peuvent être fossilisés par endroits par des dépôts de versant périglaciaires, des dunes.
Les valleuses sont en général peu peuplées, sauf à leur embouchure où des villages peuvent s'installer à l'abri du vent[7]. Les versants sont parfois boisés (entrée d'Étretat, valleuse de Vaucottes, Yport, de Parfondval près de Criel-sur-Mer…), car la craie affleure, à cause de l'érosion : il est donc impossible d'y pratiquer l'agriculture.
Fragiles, les à-pics crayeux subissent des éboulis qui les font reculer jusqu'à un mètre par an. L'accès au rivage nécessite généralement un aménagement humain (rampes, escaliers, échelles…).
« Certaines des valleuses se raccordent au niveau de l'estran, mais généralement leur fond est recoupé par la falaise, de telle sorte qu'on parle de « valleuse suspendue ». L'altitude du raccordement est variable. Le ruissellement a souvent surcreusé l'aval de la valleuse en formant une « entaille d'adaptation » qui elle-même a été retravaillée par l'homme pour permettre un accès facile à la mer. C'est le cas de la valleuse d'Antifer[8] ».
Galerie
Carte d'Omaha Beach montrant les valleuses (notées D-1, D-3, E-1 et E-3) qui échancrent la falaise.
La valleuse d'Életot ou Val Ausson est pourvue d'un escalier.
La valleuse de Jambourg se connecte à la « vallée d'Etretat »[9].
Des exsurgences karstiques en cascade peuvent être observées au niveau de la courte valleuse de la Valaine[10].
Le Cran Poulet ou Cran de la Vierge à Audinghen[11].
Notes et références
↑Phénomènes de karstification : la valleuse, les ébauches de niches et grottes à la base de la falaise et, en tête de falaise, les entonnoirs ou puits de dissolution (remplis d'argiles de décalcification ou progressivement vidés) séparant des « bonhommes de craie » très pointus.
↑Georges Chabot, Géographie régionale de la France, Masson, , p. 1969
↑Cet anticlinal est produit par le flambagelithosphérique lié à l'orogenèse alpine qui a favorisé la mise en place de fossés en demi-graben (comme celui de la fosse des Casquets) perpendiculairement au horst Weald-Artois. Cf J.-P. Colbeaux, C. Dupuis, F. Robazynsky, J.-P. Auffret, P. Haesaerts, J. Sommé, « Le détroit du pas de Calais : un élément dans la tectonique de blocs de l'Europe nord-occidentale », Bull. Inf. Geol. Bass. Paris, vol. 17, no 4, , p. 41-54
↑Max Derruau, Précis de géomorphologie, Masson, , p. 384
↑Jean-Jacques Delannoy, Philip Deline, René Lhénaff, Géographie physique. Aspects et dynamique du géosystème terrestre, Vuibert, , p. 666
↑La valleuse du Petit Ailly balayée par un vent de couloir refroidissant, est appelée localement la glacière, en raison d'une installation à vocation marchande en haut de la gorge au début du XXe siècle. On y stockait de la glace (venue notamment de Norvège) nécessaire à la conservation de certains aliments et pour fournir aux bateaux de pêche le moyen de conserver le poisson. Cf Didier Bondue, Alain Dovifat, Varengeville-sur-Mer et Sainte-Marguerite-sur-Mer, éditions des Falaises, , p. 15
↑Camille Tiano, Clara Loïzzo, Le commentaire de carte topographique, Armand Colin, , p. 157
↑L'érosion régressive se poursuit au niveau d'une entaille ouverte à partir de racines du manteau d'altération, formant une pseudo-valleuse. Cf Joël Rodet, « Karst et évolution géomorphologique de la côte crayeuse à falaises de la manche. l’exemple du massif d’aval (Etretat, Normandie, France) », Quaternaire, vol. 24, no 3, , p. 303-314 (lire en ligne).
↑Ces exsurgences proviennent de l'infiltration des eaux de pluie dans la craie. Au contact de formations imperméables sous-jacentes (marnes, argiles à silex) qui les bloquent dans leur trajet souterrain, elles ressortent à l'air libre.
↑Une grotte abrite la statue Notre-Dame de la Mer.
Voir aussi
Bibliographie
Ottavio Coffano, Le Pays de Caux. Falaises et valleuses, éd. des Falaises, , 64 p.