Sœurs AmadouSœurs Amadou
Pierre-Cénon Trigo, Les sœurs Amadou, aquarelle, Musée d'histoire de Nantes
Les sœurs Amadou, ou demoiselles Amadou, de leurs vrais noms Marie-Madeleine et Clotilde-Joséphine Chéreau, respectivement nées à Nantes vers et le , mortes à Nantes en 1875 et 1880[1], sont des musiciennes de rue de Nantes connues sous les noms de Coquette et Papillon. Spécialistes de la chanson d'amour et seulement accompagnées d’une guitare, elles ont la particularité d'être vêtues de robes de style Louis-Philippe. BiographieOrigines et enfanceMarie-Madeleine et Clotilde-Joséphine sont nées d'un vendeur de pierres à fusil, d'amadou et d'allumettes de chanvre, surnommé Père Amadou à force de crier « bon'madou » dans les rues pour attirer les clients, mais dont le commerce s'est effondré avec l'invention des allumettes chimiques[2]. Selon un article, il semblerait que seule l'aînée s'avère être la fille du Père Amadou et que Clotilde-Joséphine, quant à elle, aurait été adoptée sans que l'on ne sache rien de ses origines[3]. Leur père n'ayant pas de boutique, Marie-Madeleine et Clotilde-Joséphine ne sont pas envoyées au couvent, mais, sont mises en apprentissage une fois en âge de travailler. En fonction des sources, elles sont tantôt dites comme étant giletières chez M. Velasque (tailleur, rue d'Orléans) et chez M. Retz-Jardin (tailleurs, rue Crébillon), tantôt comme étant lingères. Selon la version où elles sont giletières, elles sont dépeintes comme non assidues et négligeant la couture pour les lectures de romans de chevalerie, si bien qu'elles se retrouvent remerciées des deux employeurs[4]. Carrière d'artistes ambulantesLes diverses versions sont d'accord sur le fait que Marie-Madeleine et Clotilde-Joséphine deviennent tôt artistes de rue, bien que l'on ne sache pas quand exactement. Certaines parlent même d'elles comme anciennement riches[2],[4]. Les descriptions et anecdotes concernant les sœurs Amadou les représentent toujours comme de vieilles filles fantaisistes et excentriques, vêtues de robes style Louis-Philippe, ayant perdu l'esprit dans les romans de chevalerie, suscitant la pitié et vivant de la charité des gens, chantant accompagnées d'une guitare dans les rues de Nantes. Du temps où elles sont artistes de rue, elles habitent rue Saint-Similien, dans ce qui est décrit comme un taudis dans lequel personne n'est autorisé à entrer. Leur surnom de "sœurs Amadou" ou "demoiselles Amadou" est parfois dit comme issu d'une chanson qu'elles chantent très souvent. Leur accoutrement est source de moqueries et sont décrites comme « composé de nippes étranges : soie vieillie, velours râpé, indienne aux tons pâlis, dentelles fanées allant du vert pomme au jaune serin ! »[4]; ou encore « haillons et de rubans prétentieux ramassés au hasard dans le ruisseau »[5]. Leurs prestations en tant que musiciennes et chanteuses sont aussi pointées du doigts. Il est dit qu'elles bêlent plus qu'elles ne chantent et qu'elles font un vilain tintamarre[6]. Elles sont source de railleries, tant dans la rue, dans des poèmes, des chansons des articles et leurs surnoms de Coquettes et Papillon sont d'ailleurs dits comme ironiques[7],[8]. Elles ont semble-t-il été quelques années sur Cholet, avant de retourner sur Nantes, sans que l'on en sache plus à ce sujet[4]. Toutefois, certaines descriptions tendent plus vers la pitié que vers la moquerie. Enfin, selon les dires d'un médecin ayant connu Clotilde-Joséphine à l'hôpital Saint Jacques, il semble qu'elle écrivait de la poésie. Malheureusement, nous ne savons pas ce que sont devenus ces manuscrits[3]. Les illustrations des demoiselles AmadouImage d'une Nantes passéeBien que n'en ayant jamais tiré de bénéfices, de nombreuses cartes postales et illustrations de Nantes ayant longtemps inondé les vitrines nantaises les représentent comme figures incontournables de Nantes, même longtemps après leurs décès[2],[9],[6],[10],[11]. Il est souvent dit qu'elles sont « suivies d'une bande de gamins, acharnés après elles et qui, méchamment tiraient leurs châles » et se moquaient d'elles[4]. Sur l'une de ces cartes postales, on peut lire : « Dans la ville de Nantes, vous avez remarqué deux vieilles filles assez comiques, traversant les rues, parcourant les quartiers, jouant de la musique, elles font un vilain tintamarre, s'accompagnant de leur guitare et par pitié on donne un sou, pour les demoiselles Amadou. »[6] Procès autour des illustrationsLe 8 août 1864 a lieu le procès devant le tribunal correctionnel, à la suite d'une plainte pour contrefaçon déposée par M. Constantin de Girennerie (lithographe et dessinateur) contre M. Alfred Bourrigaud (photographe), à propos des représentations commercialisées des demoiselles Amadou. Pour avoir utilisé sans autorisation une œuvre lui appartenant, le procès aboutira a une amende de 1.000 fr d’indemnisation et une confiscation de l'ensemble des photos représentant deux femmes dont l'une pince une guitare et l'autre tient un parapluie[12]. Notons que la représentation de ces artistes de rue a été jugée comme appartenant à M. Constantin de Girennerie, pour les avoir croquées et exposées à la vitrine de la maison Pottin. M. Alfred Bourrigaud est donc accusé d'avoir reproduit les mêmes personnes. En effet, dans un tel cas de figure, pour clore le débat, il aurait été nécessaire que les modèles dont l'image est disputée se manifestent pour affirmer que lesdites images ont été prises à leur insu et qu'elles s'opposent à leur exploitation. Or, on ne sait même pas si les demoiselles Amadou avaient connaissance de ce procès et de leurs droits[12]. Fin de vie et mortCoquette s'étant faite renverser par une voiture, la forçant à rester alitée pendant de longs mois et prendre un très important embonpoint, sa sœur la transporte avec elle, dans ses déplacements à travers Nantes, dans une petite caisse à savon sur roulettes[4],[13]. Concernant leur décès, les versions divergent selon les sources : soit elles auraient disparu du jour au lendemain et la découverte de leurs morts est faite plusieurs mois après, dans une quasi indifférence ; soit, la sœur ayant survécu continuait de donner des représentations bien qu'effondrée par la perte de sa sœur et devenue muette. Nous n'avons malheureusement pas d'information concernant leur décès en 1878 et 1880[4]. Toutefois, certains articles, ainsi que les dates de morts donnent plus de crédit à la deuxième version[14]. C'est en 1875 à 1880 que l'une des demoiselles Amadou est dite dévastée par la perte de sa sœur. Les articles publiés au fil de ces dernières années témoignent de la déchéance de la sœur survivante. Il y a même des sources disant que leur vie asociale atteignit son paroxysme quand l'une d'entre elles cacha le corps de sa sœur décédée pendant des semaines dans un placard[15]. À la suite de leurs décès, nous savons que Émile Boissier a rédigé une épigraphe en leur mémoire : « en mémoire des demoiselles amadou, célébrités nantaises, virtuoses séniles et jansénistes ferventes ». RéférencesPeintures et illustrations
Œuvres littéraires
Œuvres lyriques et théâtrales
A Nantes il y a dix ans, on pouvait rencontrer
Dans la ville de Nantes avez vous remarqué
Vous étiez chères demoiselles, des rues de Nantes les deux pinsons.
Ô dureté des temps ! ô têtes condamnées !
Notes et références
AnnexesBibliographieOuvrages
Articles
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