Protection de l'enfance en FranceLa protection de l'enfance est une politique publique de la France ayant pour objectif de protéger les enfants dont le développement est compromis ou qui sont en danger. La mesure la plus connue par le grand public est le placement d'un enfant dans une famille d'accueil ou dans un foyer. Cependant, la protection de l'enfance consiste aussi à apporter une aide aux familles qui ont des difficultés pour élever leurs enfants. L'aide prendra la forme d'interventions d'un éducateur à domicile, d'une aide ménagère, une aide à la gestion du budget, etc. En 2021, la part des enfants qui bénéficient d'une aide au domicile parental est équivalente à celle des enfants placés hors du domicile parental (c'est-à-dire placés en famille d'accueil ou en foyers)[1]. L’État français est chargé de définir la politique de protection de l'enfance. Cette politique est mise en oeuvre par le conseil départemental[2]. Le conseil départemental peut intervenir soit sur demande des parents soit sur décision du juge des enfants. Le bénéfice de cette politique a été étendu aux jeunes majeurs de moins de 21 ans qui ne sont pas suffisamment soutenus par leur famille. Contexte légal de la protection de l'enfance en danger en FranceCadre internationalLe contexte de la protection de l'enfance en danger en France s'inscrit dans une double articulation inscrite dans l'histoire. En effet, les droits de l'enfant et leur protection s'inscrivent tant dans les droits internationaux que dans les droits définis en France. Ces droits et cette protection, tant d'un point de vue international que national, ont connu des évolutions au cours du temps pour définir ce qu'est la protection de l'enfance en danger en France. Parmi les textes fondamentaux, il existe la Convention internationale des droits de l'enfant. Ce texte international a une valeur juridiquement contraignante dans chaque État qui l'a ratifié et ses citoyens peuvent s'en prévaloir directement. Toutefois, les pays signataires ont la possibilité d'émettre des réserves sur certains articles. La France a émis des réserves au regard de l'article 30 qui porte sur le droit des enfants des minorités linguistiques et culturelles (Dans les États où il existe des minorités […] linguistiques […], un enfant […] appartenant à une de ces minorités ne peut être privé du droit d'avoir sa propre vie culturelle, […] d'employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe). Elle considère notamment qu'il n'existe pas de minorités (ni culturelles, ni linguistiques) sur son territoire, et annule cet article en totalité sur le territoire de la République (y compris pour ce qui concerne les minorités religieuses et ethniques également mentionnées dans l'article 30 de la convention), en vertu de l'article 2 (qui ne porte que sur la langue française) de la Constitution (qui reconnaît pourtant l'existence de minorités culturelles ethniques dans les pays d'outre-mer avec des statuts juridiques spécifiques)[3]. Le Conseil économique et social des Nations unies a, en 2008, « recommandé » à la France de retirer cette réserve[4]. Pour connaître l'histoire des droits de l'enfant d'un point de vue international, voir l'article sur les droits de l'enfant. Cadre nationalLe ministère de tutelle de la protection de l'enfance est le ministère des Affaires sociales et de la Santé. C'est le ministère des Affaires sociales et de la Santé qui mène la politique générale d'action sociale du pays dont celui de la protection de l'enfance. Le ministère des Affaires sociales et de la Santé est le ministère français chargé des thématiques sociales, et de la solidarité officielle (familles, handicap, personnes âgées). Le ministère a souvent changé de nom, depuis 1983. Il a épisodiquement porté le nom de « ministère des Affaires sociales » (entre 2002 et 2004 par exemple). De plus, le groupement d'intérêt public Enfance en danger composé de l'État, des conseils départementaux et d'associations gère deux missions :
Cadre localDepuis les lois de décentralisation (lois Defferre du et du ), le conseil départemental est chargé de mettre en œuvre la politique de protection de l'enfance définie par le ministère. Il apporte un soutien matériel, éducatif et psychologique :
Une commune peut aussi mener une action sociale donc aussi de protection de l'enfance en vertu de sa clause de compétence générale. Organisation du service public de protection de l'enfanceTrois services du conseil départemental contribuent à sa mise en œuvre :
Aide sociale à l'enfanceC'est le principal service chargé de la protection de l'enfance. Le service de l'aide sociale à l'enfance a trois actions principales :
Protection maternelle et infantileC'est un service de santé publique ouvert à tous, dont l'objectif est la protection et la promotion de la santé de la mère et de l'enfant. Ce service comprend des médecins, des pédiatres, des gynécologues, des puéricultrices, des sages-femmes, des psychologues, des conseillers conjugaux, qui travaillent en équipe pluridisciplinaire. Ses actions contribuent à aider les familles et l'enfant avant et pendant la grossesse puis durant la petite enfance et l'enfance. Le service de la protection maternelle et infantile apporte son concours au service de l'aide sociale à l'enfance en évaluant si les mineurs sont en danger ou risquent de l'être, à la suite du recueil d'informations préoccupantes[10],[11]. Service social départementalC'est un service public chargé d'actions polyvalentes et spécialisées (loi de 1975). Ces actions sont menées par des assistants de service social qui aident les personnes, les familles ou les groupes connaissant des difficultés sociales, à restaurer leur autonomie et à assurer leur insertion. Dans le respect des personnes, ils recherchent les causes qui compromettent leur équilibre psychologique, économique ou social, analysent leur demande, et les conseillent, les orientent et les soutiennent. Le service social départemental participe aux actions de prévention des mauvais traitements et de prise en charge des mineurs maltraités[11]. Évolution du cadre légal de la protection de l'enfanceLoi duLa loi du réformant la protection de l'enfance vise à améliorer la prévention et le signalement des situations à risque pour les mineurs, dont près de 20 000 sont victimes de maltraitance chaque année en France. Il a été décidé notamment de sanctionner de six mois d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende toute personne ayant assisté à un accouchement et ne l'ayant pas déclaré dans les délais légaux de trois jours. Principales mesures du projet de loi de réforme de la protection de l'enfance[12] : Prévention« Entretien psychosocial » systématique au 4e mois de grossesse « pour identifier les problèmes pouvant créer des difficultés futures dans le lien mère-enfant ». Mise en contact systématique des parents avec les services de la protection maternelle infantile (PMI) lors du séjour à la maternité. Bilan pour tous les enfants de 3-4 ans à l'école maternelle et tous les enfants dans leur sixième année. Aide des adolescents en souffrance par développement de lieux d'écoute, des accueils de jour et des lieux de médiation entre parents et enfants. Dépistage des troubles physiques, psychologiques, sensoriels et de l'apprentissage. Visite médicale obligatoire au cours des 6e (avec dépistage des troubles spécifiques du langage et de l'apprentissage), 9e, 12e et 15e années. SignalementCréation dans chaque département d'une « cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes » pour les mineurs. Mise en place d'un observatoire départemental de l'enfance en danger établissant des statistiques transmises à l'assemblée départementale, aux représentants de l'État et de l'autorité judiciaire. Partage d'informations entre professionnels du travail social et de la protection de l'enfance habilités au secret professionnel. Clarification du partage des rôles : l'aide sociale à l'enfance (ASE) intervient à titre principal et la justice « en cas de danger manifeste » ou si les parents « ne peuvent pas ou ne veulent pas accepter l'accompagnement proposé » par l'ASE. Un « mineur capable de discernement » peut être entendu par le juge dans toute procédure le concernant et « lorsque son intérêt le commande ». Audition de droit lorsque le mineur la demande. Prise en charge
Divers
Loi duLa loi du relative à la protection de l'enfant met en place diverses mesures destinées à renforcer la protection des enfants : désignation d'un médecin référent sur la protection de l'enfance au sein du conseil départemental, renforcement du projet pour l'enfant, réforme de l'adoption simple afin de faciliter l'adoption, accompagnement du parent qui a récupéré son enfant initialement né sous X ou confié pour adoption. De plus, veiller à la stabilité du parcours de l'enfant devient un nouvel objectif de la protection de l'enfance[13]. Loi duLa loi du relative à la protection des enfants, dite loi Taquet, a pour objectif d'améliorer la politique de protection de l'enfance : interdiction de l'hébergement à l'hôtel, meilleure protection contre les violences sur mineurs, amélioration du statut des assistants familiaux (c'est-à-dire les familles d'accueil)[14]. Défenseur des droitsParmi les dispositions légales de défense des enfants, a été créé, en 2000, le défenseur des enfants. En droit français, le défenseur des enfants est « chargé de défendre et de promouvoir les droits de l'enfant ». Il garantit ainsi particulièrement l'exécution de la Convention de New-York sur les droits de l'enfant. À partir de 2011, c'est le Défenseur des droits qui le remplace[15]. Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE)Le Conseil national de protection de l'enfance, placé auprès du Premier ministre, a été mis en place en [16] à la suite de la loi du relative à la protection de l'enfant[17]. Ses missions :
Il comprend 66 membres répartis en 5 collèges représentant respectivement :
Un collège d'enfants placés est associé aux travaux du CNPE[18]. Il publie un rapport annuel d'activité[19]. Maltraitance sur mineur en FranceDéfinitionLa maltraitance ou des sévices à enfant sont des mauvais traitements physiques, psychologiques (moral) ou sexuels imposés à un enfant. Il existe plusieurs définitions relatives à l'enfance en danger. Par exemple :
Signalement des maltraitances sur mineurs en France
« La mise en œuvre de la loi du réformant la protection de l’enfance implique des modifications importantes, notamment parce qu’il crée dans chaque département une cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des situations de danger ou de risques de danger pour l’enfant et l’adolescent, et parce qu’il détermine les règles du partage d’informations entre professionnels. » in « le guide de la cellule départementale de recueil de traitement et d'évaluation », 2008. Traitement public de protection de l'enfance en dangerLe traitement public s'articule entre une protection sociale et administrative et une prise en charge judiciaire de l'enfance en danger. En France, les associations œuvrant dans la protection de l'enfance doivent être habilitées par le conseil départemental et (ou) le ministère de la Justice. Certaines d'entre elles sont des établissements uniques type maison d'enfants à caractère social (MECS), d'autres sont plus importantes et sont reconnues d'utilité publique. Elles peuvent alors ester en justice afin de défendre les droits des enfants lorsqu'ils sont en péril (exemple : La Fondation d'Auteuil). Elles peuvent alors être associées par les pouvoirs publics aux fonctionnements d'une politique ou d'une mesure nationale sur le sujet (exemple : le 119 ou Service national d'accueil téléphonique pour l'enfance maltraitée). Évidemment, certaines d'entre elles cumulent l'ensemble des formes d'autorisations publiques. Personnels responsables de la protection de l'enfance en danger en France
Les personnes mettant en œuvre les mesures sont principalement les éducateurs des associations et les chefs de service. Exemple d'établissement autorisé à œuvrer à la protection de l'enfance : Union française pour le sauvetage de l'enfance. Sources d'informationSources d'information sur le thème de la protection de l'enfant en danger en FranceObservatoire national de la protection de l'enfanceCréé en 2004 sous le nom d'Observatoire national de l'enfance en danger, l'Observatoire de la protection de l'enfance (ONPE) a pour mission de mieux connaître le champ de l'enfance en danger pour mieux prévenir et mieux traiter[6]. Observatoires départementaux de la protection de l'enfanceDans chaque département a été mis en place un observatoire départemental de la protection de l'enfance à la suite de la loi du réformant la protection de l'enfance. Ces observatoires ont pour missions :
L'observatoire départemental de la protection de l'enfance comprend entre autres des magistrats, des représentants des services de l'État et des services du conseil départemental, ainsi que des représentants des associations concourant à la protection de l'enfance, notamment des gestionnaires d'établissements[22]. RevuesEn dehors de cet observatoire, défini par la loi, il existe d'autres sources d'information sur ce thème comme :
DiversPlusieurs enfants placés témoignent une fois devenus adultes de leur expérience de la protection de l'enfance dans des livres. Parmi eux, on peut citer "L'enfer des foyers" paru en 2019 dans lequel Lyes Louffok raconte les maltraitances subies lors de ses différents placements[23]. Sources légales définissant la protection de l'enfant en danger en France
Enfance délinquante en FranceDonnées statistiques relatives la protection de l'enfanceEn 2015, les viols et les agressions sexuelles (dont harcèlement sexuel) enregistrés par les services de police et de gendarmerie ont concerné 8 300 enfants âgés de 0 à neuf ans et 11 900 enfants âgés de 10 à 17 ans, soit 20 200 mineurs. L'estimation du nombre de mineurs et jeunes majeurs suivis en protection de l'enfance au était de 308 400[1]. En 2017, 104 239 mineurs avaient fait l’objet d’une saisine d’un juge des enfants. Dix ans plus tôt, en 2007, le nombre était de 79 233[26]. En 2017, 100 mineurs victimes d’infanticides avaient été enregistrées par les forces de sécurité, l’auteur pouvant être un membre de la famille ou une personne extérieure à la famille. Au , le nombre d'enfants suivis en protection de l'enfance est estimé à 310 525. Ce nombre comprend aussi bien les enfants restés à leur domicile mais dont les familles bénéficient d'une aide du conseil départemental, que les enfants hébergés hors de leur famille (dans une famille d'accueil ou un foyer, etc.). Quant au nombre de jeunes majeurs suivis en 2021, il est de 35 112[27]. Débats et controverses sur la protection de l'enfance2018Un vif débat sur l'efficacité et les conceptions de base des dispositifs de protection de l'enfance s'est ouvert en , à la suite de la publication du livre « Le Massacre des innocents, les oubliés de la République ». Ce livre, publié sur Amazon, est écrit par Michèle Créoff, vice présidente du Conseil national de protection de l'enfance et ancienne directrice de l'enfance au conseil général du Val-de-Marne, et par la journaliste Françoise Laborde. Il critique vigoureusement le fonctionnement actuel des institutions et fait 19 propositions[28]. Les auteurs lancent par ailleurs une pétition relayée par différentes personnalités comme la philosophe Sylviane Agacinski ou l'animateur de télévision Nagui demandant au gouvernement la mise en œuvre de ces 19 propositions[29]. Parmi les critiques énoncées à l'égard du système actuel, on peut lire :
À la suite de cette publication, l'Organisation nationale des éducateurs spécialisés (ONES) exprime son désaccord avec ce qu'elle perçoit comme un manque d'impartialité de la vice présidente du CNPE et annonce sa mise en retrait provisoire du CNPE[31]. L'ONES explique qu'elle avait décidé de participer aux travaux du CNPE « en particulier en raison de l’objectif affiché de dépasser les idéologies sclérosantes et réductrices qui s’opposent dans le champ disciplinaire de la protection de l’enfance »[31]. 2022Dans son émission Zone interdite, la chaîne de télévision M6 diffuse le le reportage intitulé "Familles d'accueil, hôtels sociaux : le nouveau scandale des enfants placés" qui met au jour des dysfonctionnements de l'aide sociale à l'enfance : hébergement en hôtel d'une mineure faute de place adaptée à sa situation dans les foyers, jeunes filles en proie aux proxénètes dans un foyer, garçons travaillant dans le trafic de drogue au vu et su des éducateurs impuissants d'un foyer[32],[33]. 2024À Clermont-Ferrand, une adolescente de l'aide sociale à l'enfance se suicide fin janvier 2024 dans l'hôtel où elle était placée. Le , une centaine de personnes a manifesté devant le conseil départemental du Puy-de-Dôme pour dénoncer ses manquements dans la prise en charge de cette mineure. Si le gouvernement avait pris les mesures d'application de la loi Taquet de 2022, le conseil départemental du Puy-de-Dôme n'aurait pas pu placer l'adolescente dans un hôtel[34]. Notes et références
Voir aussiBibliographie
Articles connexes
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