Le comte d'Arbaud le choisit en 1778 comme ingénieur de la Guadeloupe, à la place du sieur Raillé, parti pour la Dominique nouvellement conquise[1]. Il assure si bien toutes les tâches qu'on lui confie, qu'en 1779 d'Arbaud demande à le garder à la place du sieur Vidal d'abord choisi[2],[3].
En mai 1782 le maréchal de Ségur, ministre de la Guerre, « prête » Monneron à la Marine pour l'Expédition de la baie d'Hudson. Monneron embarque donc sur le Sceptre, commandé par La Pérouse[4] ; il participe à toute l'action, débarque avec les troupes et leur trace « à la boussole un chemin dans les bois et dans les marais »[5]. À l'issue de cette campagne, il demande un congé, mais envisage de reprendre ensuite du service, de préférence dans les colonies et pour le ministère de la Marine et des Colonies.
Sa participation à l'expédition de La Pérouse
La Pérouse le propose à Fleurieu comme ingénieur en chef de l'expédition de découvertes, car « un tel caractère joint à des conoissances est ce qui convient ». Au début de l'année 1785, Monneron passe le congé dont il bénéficie à Paris, en attendant son ordre d'embarquement pour l'Inde : La Pérouse propose de l'emmener avec lui pour sa campagne de découvertes dans l'océan Pacifique.
Au retour, Monneron serait déposé à l'île de France pour reprendre son service aux colonies, comme il le désirait.
Tout autant que pour le choix de de Langle, La Pérouse manifeste le plus grand désir de voir ratifier sa proposition par le ministre avant de demander à Monneron son assentiment, qui selon lui ne saurait manquer. Il obtient satisfaction avec l'engagement, le 28 mai, de Monneron, en qualité d'ingénieur en chef sur le bâtiment que doit monter M. de La Pérouse.
La mission que La Pérouse lui confie en Angleterre, afin de préparer l'expédition, montre bien les traits marquants de sa personnalité : son caractère sociable lui attire confiance et confidences ; curieux de tout, il sait retenir une foule de détails intéressants de ses conversations avec John Webber.
Monneron est choisi, comme les officiers de marine et les équipages de la Boussole et de l'Astrolabe, par les capitaines eux-mêmes. Ces derniers se reposent donc entièrement sur ces hommes qu'ils appréciaient[6].
Au cours de l'expédition, il découvrit une île dans la mer du Japon, qui fut baptisée île Monneron.
Aujourd'hui, un pétrolier, un hôtel et... aussi une vodka fameuse perpétuent également le nom de l'ingénieur.
Paul Mérault Monneron disparait en 1788 avec tous les membres de l'expédition dans le naufrage des navires sur l'île de Vanikoro.
Notes et références
↑Monneron se trouvait alors en congé à la Guadeloupe et proposa de lui-même ses services.
↑En particulier, Monneron avait reconstruit les fortifications des îles des Saintes de manière très satisfaisante.
↑Cet officier remplissant très bien ses fonctions et étant beaucoup plus instruit que ne l'est le sieur Vidal. À deux reprises, d'Arbaud sollicite pour Monneron une gratification de 1200 livres, qui serait, selon lui « bien méritée : c'est un officier plein d'esprit et de talens pour son métier dont il remplit les fonctions avec un zèle et une volonté incroyable. »
↑La Pérouse peut affirmer à Fleurieu que Monneron a « la passion des voiyages ». En effet, il a eu l'occasion de bien connaître Monneron à la baie d'Hudson, d'apprécier ses qualités professionnelles, d'en faire son ami. Monneron eût aimé rester à la baie d'Hudson, mais les ordres du ministre s'y opposant absolument, La Pérouse ne put accéder à sa demande. Selon La Pérouse, « l'objet du désir qu'il avoit de rester dans cet affreux payis étoit de voiyager l'hiver avec les sauvages et d'étendre les connoissances très imparfaites qu'on a du payis ».
↑La Pérouse ordonna au capitaine du génie Monneron, d'en tracer un à la boussole au milieu du bois. Ce travail extrêmement pénible exécuté, servit à faire connaître qu'il y avait deux lieues de marais à traverser, pendant lesquelles on enfoncerait souvent dans la vase jusqu'aux genoux. Un coup de vent qui survint dans la nuit, força La Pérouse inquiet à rejoindre ses bâtimens. Il se rendit sur le rivage ; mais la tempête continuant, il ne put s'embarquer.
↑Actif, vif et intelligent, Monneron présente bien des traits proches de La Pérouse ; ses compétences particulières le désignaient tout spécialement pour la campagne envisagée ; enfin il est l'ami de La Pérouse, connaît Lauriston, peut-être aussi Robert Sutton de Clonard : il ne peut que se sentir parfaitement dans son élément au cours de ce voyage et en servir les objectifs avec toute la compétence et tout le zèle souhaitables.
↑Journal de La Pérouse...Je dois ici témoigner ma reconnaissance au chevalier Banks, qui, ayant appris que M. de Monneron ne trouvait point à Londres de boussole d'inclinaison, voulut bien nous faire prêter celles qui avaient servi au célèbre capitaine Cook. Je reçus ces instruments avec un sentiment de respect religieux pour la mémoire de ce grand homme. M. de Monneron, capitaine au corps du génie, qui m'avait suivi dans mon expédition de la baie d'Hudson, fut embarqué en qualité d'ingénieur en chef ; son amitié pour moi, autant que son goût pour les voyages, le déterminèrent à solliciter cette place : il fut chargé de lever les plans, d'examiner les positions. M. Bernizet, ingénieur-géographe, lui fut adjoint pour cette partie. Monneron fit faire à son compte un « ballon en toile doublé intérieurement en papier Joseph collé sur la dite toile, ayant 26 pieds de hauteur sur 22 pieds six pouces de diamètre » (soit 8,58 m de hauteur sur 7,42 m de diamètre) ; il paya pour cet article 730 livres 16 sols...
↑Journal de La Pérouse - Ténériffe ... Mr de Monneron, capitaine au corps de génie, fit aussi le voyage du Pic dans l'intention de le niveler jusqu'au bord de la mer ; c'était la seule manière de mesurer cette montagne qui n'eût pas été essayée. Les difficultés locales ne pouvaient l'arrêter si elles n'étaient insurmontables, parce qu'il était extrêmement exercé à ce genre de travail...
↑Journal de La Pérouse - Ile-de-La-Trinité... Dès la pointe du jour j'avais aussi envoyé à terre un canot commandé par M. Boutin, lieutenant de vaisseau, accompagné de MM. de Lamanon et Monneron ; mais j'avais défendu à M. Boutin de descendre, si la biscayenne de l'« Astrolabe » était arrivée avant lui : dans ce cas, il devait sonder la rade, et en tracer le plan le mieux qu'il lui serait possible dans un si court espace de temps. M. Boutin ne s'approcha en conséquence que jusqu'à une portée de fusil du rivage ; toutes les sondes lui rapportèrent un fond de roc, mêlé d'un peu de sable. M. de Monneron dessina le fort tout aussi bien que s'il avait été sur la plage ; et M. de Lamanon fut à portée de voir que les rochers n'étaient que du basalte, ou des matières fondues, restes de quelques volcans éteints. Cette opinion fut confirmée par le père Receveur qui nous apporta à bord un grand nombre de pierres toutes volcaniques, ainsi que le sable, qu'on voyait seulement mêlé de détriments de coquilles et de corail. D'après le rapport de M. de Vaujuas et de M. Boutin, il était évident que nous ne pouvions trouver à la Trinité l'eau et le bois qui nous manquaient. Je me décidai tout de suite à faire route pour l'île Sainte-Catherine, sur la côte.
↑Journal de La Pérouse L'île Sainte-Catherine s'étend depuis le 27e degré 19e minute 10e seconde de latitude sud, jusqu'au 27e degré 49e minute ; sa largeur de l'est à l'ouest n'est que de deux lieues ; elle n'est séparée du continent, dans l'endroit le plus resserré, que par un canal de deux cents toises. C'est sur la pointe de ce goulet qu'est bâtie la ville de Nostra-Senora-Del-Destero, capitale de cette capitainerie, où le gouverneur fait sa résidence ; elle contient au plus trois mille âmes et environ quatre cents maisons ; l'aspect en est fort agréable.
.../...
Je fus, le même jour, avec M. de Langle et plusieurs officiers, faire ma visite au commandant de ce poste, qui me fit saluer de onze coups de canon ; ils lui furent rendus de mon bord. J'envoyai le lendemain mon canot, commandé par M. Boutin, lieutenant de vaisseau, à la ville de Nostra-Senora-Del-Destero, pour faire mes remercîmens au gouverneur, de l'extrême abondance où nous étions par ses soins. MM. de Monneron, de Lamanon et l'abbé Mongès accompagnèrent cet officier, ainsi que M. de La Borde Marchainville et le père Receveur, qui avaient été dépêchés par M. de Langle pour le même objet ; tous furent reçus de la manière la plus honnête et la plus cordiale.
↑observations de Paul Monneron - Île de la Trinité.
Sous voile, le .
L'île de la Trinité, située dans l'hémisphère méridional, à cent quatre-vingts lieues environ de la côte du Brésil, est restée inhabitée jusqu'à la dernière guerre que les Anglais, dit-on, l'ont occupée, dans la vue sans doute d'avoir des moyens plus faciles de faire des prises françaises, espagnoles et hollandaises : on assurait qu'ils avaient abandonné ce poste à la paix. L'intention de M. De La Pérouse était de vérifier la chose :
Lorsque nous eûmes pris connaissance de cette île, nous ne tardâmes pas d'apercevoir le pavillon de Portugal sur un coteau situé dans l'enfoncement d'une petite baie dans le sud-est de l'île.
M. de La Pérouse, ayant fait mettre un canot à la mer, m'ordonna de m'y embarquer pour tâcher de faire quelques remarques sur ce poste. L'officier qui commandait cette embarcation, avait ordre de ne mettre à terre que dans le cas où on pourrait l'exécuter sans risque.
signé Monneron
↑observations de Paul Monneron - îles Sandwich.
Au mouillage, le . Latitude, 20 degrés 34 minutes. Longitude à l'ouest du méridien de Paris, 158 degrés 25 minutes.
Si j'avais un mémoire à faire sur l'avantage de la position de ces îles sous un ou sous plusieurs points de vue, je serais obligé de chercher des documents dans la relation du troisième voyage de Cook ; mais si l'utilité d'une telle discussion était démontrée, il est évident qu'elle se ferait avec une plus grande sagacité à Paris qu'en pleine mer.
A bord de la Boussole, le .
signé Monneron.
↑observations de Paul Monneron - Baie des français
Située à la côte du nord-ouest de l'Amérique, par 58 degrés 38 minutes de latitude. Au mouillage en divers points de cette baie, depuis le jusqu'au .
L'impossibilité, selon mon sens, d'établir utilement une factorerie française dans cette baie, rendrait toute discussion sur ce point embarrassante pour moi ; un mémoire appuyé sur des suppositions vagues, ne méritant pas plus de confiance que celui qui pose sur des faits incertains. Aussi ai-je vu avec une grande satisfaction, par un écrit que M. De La Pérouse a eu la bonté de me communiquer, qu'il dissuadait le gouvernement, d'un pareil établissement, au moins jusqu'à l'époque de son retour en France.
Je produirai, dans ce temps, toutes les notes nécessaires pour discuter cette matière dans le plus grand détail ; et si le gouvernement prend quelque parti sur cet objet, il sera très-facile d'en démontrer l'avantage ou les inconvénients.
Il n'est pas difficile de présumer que l'âpreté de ce climat, le peu de ressources de ce pays, son éloignement prodigieux de la métropole, la concurrence des Russes et des Espagnols, qui sont placés convenablement pour faire commerce, doivent éloigner toute autre puissance européenne que celles que je viens de nommer, de former aucun établissement entre Monterey et l'entrée du prince-Williams.
D'ailleurs, je crois qu'avant toutes choses, et sur-tout avant de songer à former un établissement, on doit en balancer la dépense et les profits pour en déduire le nombre de personnes employées à la factorerie. Cette connaissance est d'une nécessité indispensable pour travailler aux moyens de pourvoir à la sûreté de ces individus et des fonds qui leur seraient confiés, soit contre les naturels du pays, soit contre les ennemis du commerce de France.
à bord de la « Boussole », le .
signé Monneron.
Bibliographie
Plongée magazine, no 16, « Vanikoro », sous-titré « Dernières nouvelles de La Pérouse », par Pierre Larue, p. 52
Le Mystère Lapérouse, ou le Rêve inachevé d'un roi, par l'association Salomon, éditions de Conti,
Pierre Bérard, Le voyage de La Pérouse : Itinéraire et aspects singuliers, Albi, Un Autre Reg’Art, , 175 p. (ISBN978-2-916534-60-2, lire en ligne)