Miracle eucharistiqueDans la tradition catholique, un miracle eucharistique est un phénomène paranormal lié à une hostie consacrée, ou dans de rares cas à du vin consacré. Les récits les plus anciens de ces phénomènes datent du haut Moyen Âge, et les plus récents datent du XXIe siècle. L'Église catholique considère les miracles reconnus par elle comme des « signes certains de la Révélation » et des « motifs de crédibilité de la foi ». Toutefois, elle pose des limites à cette notion en précisant que, même si elle reconnaît officiellement certains des « miracles eucharistiques », ceux-ci ne font pas partie du « dépôt de la foi », et elle appelle au "discernement". Pour l'Église catholique, les dogmes liés à l'eucharistie sont ceux de la transsubstantiation et de la présence réelle. HistoireLe plus ancien récit écrit connu concernant ce thème est daté vers l'an 710[1]. Il s'agit du récit du miracle eucharistique de Rome (une hostie consacrée aurait été transformée en chair ensanglantée) après une messe célébrée par Grégoire le Grand (540-604)[1]. Toutefois, le développement du thème des miracles eucharistiques s'observe plus particulièrement à partir du XIIIe siècle, en lien avec la pratique de la communion, le culte et l'adoration eucharistique étant assumés par l'Église catholique, qui y trouve un instrument apologétique puissant[2]. Au XIIIe siècle, les récits de miracles eucharistiques aiguisent les discussions des universitaires au sujet de la présence réelle[3]. Cela est notamment le cas pour les évènements rapportés comme ayant eu lieu en présence de plusieurs témoins, comme le miracle de Douai (où plusieurs personnes auraient notamment vu le visage du Christ dans une hostie)[4]. Thomas d'Aquin apporte l'explication que le miracle eucharistique change les "espèces", mais que la substance ne change pas car elle avait déjà changé lors de la transsubstantiation[5]. Contrairement à une idée répandue, du fait de la difficulté de se représenter certains détails, les récits de "miracles" augmentent les questionnements théologiques plutôt que de mettre simplement en évidence la doctrine[6]. Au Xvie siècle, lors de la Réforme protestante, Luther, Calvin et leurs émules dénoncent de façon vigoureuse le culte des reliques et des saints comme de pures inventions de l'Église[7]. Le concile de Trente (1545-1563) rappelle que seuls le pape et les évêques sont habilités à authentifier un miracle[7]. Au siècle suivant, des philosophes divers (Descartes, Malebranche, Bayle, ...) se joignent aux critiques des protestants[7]. Au Xviiie siècle, la philosophie des Lumières et Voltaire tentent de démonter la position de l'Église concernant le surnaturel et les miracles[7]. A la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle, des échantillons d'hosties de cinq miracles eucharistiques (Lanciano du VIIIe siècle, Buenos Aires de 1992-1996, Tixtla de 2006, Sokółka de 2008[8], et Legnica de 2013[9]) sont analysés scientifiquement, et du tissu cardiaque humain est identifié dans ces cinq cas[10]. Position de l'Église catholiquePour les théologiens catholiques, les miracles eucharistiques diffèrent de la présence réelle, qui, même définie comme transsubstantiation, n'est pas à proprement parler un « miracle » mais plutôt un « mystère »[11]. Dans l'Église catholique, seuls le pape et les évêques sont habilités à authentifier un phénomène prodigieux en tant que miracle[7]. Selon l'Église catholique, les miracles eucharistiques reconnus par elle sont des « signes certains de la Révélation » et des « motifs de crédibilité de la foi »[12],[13], mais n'appartiennent pas au dépôt de la foi. Concernant les révélations privées, le Catéchisme de l'Église catholique dit[14] :
Typologie des miracles eucharistiquesDéfinitionPlusieurs types d'événements ont été qualifiés de miracles eucharistiques. Il s'agit principalement d'hosties consacrées "ensanglantées", ou "préservées" (de la corruption, de la profanation, de la destruction ou du feu)[15]. Des évènements liés au vin consacré[16], ou à l'apparition d'une image sur l'hostie consacrée sont également référencés[17], ainsi que des guérisons liées à une hostie consacrée[18]. Ces manifestations jugées surnaturelles ont été décrites comme des « miracles » religieux[19]. On dénombre au moins 135 miracles eucharistiques depuis le VIIIe siècle notamment en Italie, en Espagne, et en France[20], surtout du XIIIe siècle au XVIe siècle[21]. Selon l'historien Sbalchiero, leur nombre connu est sans nul doute inférieur à la réalité car les témoignages entre le IIe siècle et le IXe siècle font défaut[22]. Ambiguïtés des représentations théâtralesLes récits de ces « miracles eucharistiques » correspondent à des intentions apologétiques renforcées au Moyen Âge par de nombreuses commémorations : des représentations théâtrales connues sous le nom de « mystères », tel le « mystère de la Sainte Hostie » mettant en scène le « miracle des Billettes »[23]. Or les témoignages du XVIe siècle ne permettent parfois guère d'établir une distinction entre le miracle lui-même, sa représentation ou sa commémoration[24]. À partir du XVIe siècle, la propagande religieuse liée à la réaffirmation du dogme de la présence réelle par le concile de Trente incite également les spectateurs à confondre mise en scène et événement concret[24]. La différence entre ce qui est et ce qui n'est pas, entre ce qui se passe et ce qui est montré, entre le réel et l'illusion, s'avère d'autant plus difficile à percevoir qu'il s'agit souvent de fraudes pieuses destinées à convaincre les foules par le biais d'artifices[24]. Le statut de ces représentations, « miracles » et « mystères », demeure donc ambivalent, indistinct[24]. Analyses scientifiquesHypothèse d'origine bactériologiqueLa Serratia marcescens, parfois appelée "Monas prodigiosa", est une bactérie qui forme un pigment rouge sang (“prodigiosine”) en se développant à température ambiante sur des aliments contenant des glucides[25]. Ces bactéries donnent l'impression de sang coagulé lorsqu'elles se confluent en colonies[25]. Découverte en 1819 en Italie, cette bactérie est évoquée comme pouvant être à l'origine du « miracle de Bolsena » (XIIIe siècle) et d'autres phénomènes de cette époque[25]. Toutefois, des dépôts de sang (divisé en plasma et sérum) sont identifiés sur la relique (corporal) de Bolsena lors des photographies sous ultraviolets lors de sa restauration début 2015[26]. Analyse scientifique du miracle de LancianoDes fragments extraits des reliques du miracle de Lanciano (VIIIe siècle, où l'hostie consacrée serait devenue chair, et le vin consacré devenu sang) ont fait l'objet d'analyses scientifiques modernes en laboratoire menées par le professeur Odoardo Linoli les et [27]. Le résultat est le suivant : il s'agit de chair (tissu du muscle cardiaque) et de sang, tous deux d'origine humaine et de groupe sanguin AB[27]. La validité de l'analyse est ensuite confirmée par le professeur Ruggero Bertelli[27]. Analyses scientifiques de miracles récentsLes hosties consacrées des miracles eucharistiques de Buenos Aires (1992-1996), Tixtla (Mexique, 2006), Sokółka (Pologne, 2008[8]), et Legnica (Pologne, 2013[9]) sont également analysées scientifiquement[10]. Du tissu cardiaque humain "traumatisé" (phénomène de fragmentation des cellules myocardiques, lié à une souffrance physique et émotionnelle extrême) est détecté dans chacune de ces quatre hosties[10]. Dans ces quatre cas, les tissus ont présenté des caractéristiques de tissus vivants, malgré leur dégradation concomitante[10]. Notes et références
BibliographieArticles spécialisés
Ouvrages spécialisés
Ouvrages généraux
Voir aussiArticles connexesBanques de données, dictionnaires et encyclopédies
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