Mineuse

Mineuse
Nom vulgaire ou nom vernaculaire ambigu :
l'appellation « Mineuse » s'applique en français à plusieurs taxons distincts.
Description de cette image, également commentée ci-après
Le plus souvent comme pour cette mineuse des ronces, la chenille creuse une galerie dont le diamètre s'accroît avec la croissance de la larve (ici une mine-corridor qui, après une mue, s'élargit en plaque). Elle laisse derrière elle des trainées d'excréments sous forme de pelotes fécales foncées.

Taxons concernés

Parmi les Diptera :

Parmi les Lepidoptera :

Parmi les Hymenoptera :

Parmi les Coleoptera :

Mineuse ou insecte mineur est un nom vernaculaire ambigu désignant des insectes parasites (principalement des larves de mouches ou de papillons) qui creusent dans les feuilles des galeries, entre les deux épidermes du limbe, formant ce que l'on appelle une mine en consommant le parenchyme chlorophyllien. Certaines espèces minent également les bourgeons, les fruits, ou les jeunes écorces des tiges à l'intérieur desquels elles accomplissent généralement leur mue larvaire et leur nymphose.

Par ce travail de minage, l'insecte provoque sur la feuille l'apparition de dessins ou de taches, d'ordinaire caractéristiques pour chaque espèce. La géométrie de la mine (linéaire, ramifiée, serpentine ou sinueuse, circulaire, en spirale, etc.) et la disposition du « frass (en) » (excréments et vermoulure) permettent en général une détermination précise du ravageur.

Physiologie, comportement et écologie

Une mine d'insecte est une galerie forée dans l'épaisseur d'une feuille, entre l'épiderme supérieur et l'épiderme inférieur par des larves de petites tailles pour s'alimenter et accumuler un maximum de ressources. Les mères sont assez exigeantes quant au niveau de qualité des feuilles-hôtes acceptables pour ponte. Si cette qualité est insuffisante, elles sélectionnent d'autres parties de la plante : racine, bourgeon, fleur ou fruit[1].

Il existe des mines de différentes formes : certaines sont spiralées, d'autres très allongées, d'autres en plaque ou en tache et leur aspect permet souvent d'identifier l'espèce de l'insecte.

Alors que de nombreuses espèces passent tout leur stade larvaire à creuser des galeries et à vivre dans ces mines, les larves d'autres espèces minent exclusivement dans leurs stades jeunes et poursuivent ensuite leur développement dissimulées à l'extérieur dans des fourreaux, des constructions foliaires ou librement sur la surface des feuilles. Ces larves sont en général monophages, les oligophages sont moins fréquentes et les polyphages exceptionnelles. Compte tenu de leur milieu de vie très contraint, elles présentent « diverses adaptations convergentes : des yeux réduits ou absents (il n’y a rien à voir) ; des pattes très réduites ou absentes (il suffit de ramper comme dans un tunnel étroit) ; une taille très réduite qui exclut les grandes espèces et une forme aplatie ; une tête non dirigée vers le bas mais en avant et fortement aplatie elle aussi. Pour identifier le groupe auquel appartient une larve donnée, il faut donc s’équiper d’une très bonne loupe mais cela suppose de déchirer la mine ce qui condamne de facto son occupant[2] ».

Une fois que les nymphes ont quitté la mine, plusieurs cortèges d'insectes non mineurs peuvent venir s'installer dans ces abris, ce qui fait qualifier ces mineuses d'espèces ingénieures[2].

Impact sur la végétation

La conséquence du minage pour la plante est une réduction de sa capacité photosynthétique, ce qui entraîne des retards de croissance et de développement variables selon la fraction des surfaces foliaires atteintes. En cas de forte infestation, il peut y avoir un dessèchement total du feuillage, des nécroses sur les feuilles, les fruits ou les bourgeons qui sont alors sensibles aux attaques d'autres pathogènes (champignons, bactéries).

Dégâts causés par la Mineuse du marronnier.

Organismes nuisibles à l'agriculture, à l'horticulture et aux arbres forestiers, un certain nombre d'entre eux sont devenus des espèces invasives importantes dont la pullulation peut avoir une incidence économique ou écologique (mineuse du marronnier, ravageurs des agrumes, mouche mineuse de la pomme de terre…). Les dégâts foliaires augmentent avec le réchauffement climatique qui favorise les éclosions avancées, augmente les abondances et les taux d'infestations. La lutte contre ces ravageurs passe par des mesures de prophylaxie et des méthodes de lutte biologique (emplois de pièges à phéromones, d'auxiliaires parasitoïdes, des œufs et des larves) préférables à l'utilisation d'insecticides chimiques qui induisent l'acquisition de résistance chez les nuisibles et ont des effets sur l'environnement et la santé humaine[3].

L'impact des mineuses, tel qu'il peut s'apprécier par la densité des mines foliaires, est variable selon les espèces mais également d'une station à l'autre et d'un arbre à un autre pour une même espèce mineuse. En dehors des périodes de pullulation, l'incidence du minage sur les feuilles est le plus souvent faible, tout au moins en milieu naturel. Les parasitoïdes d'œufs ou de larves jouent en effet un rôle important dans la régulation des populations de mineuses[4].

Histoire évolutive

Chronologie de l'évolution des plantes et des types d'herbivorie (leaf mining=minage).
La larve mineuse de Stigmella tityrella (en) creuse des galeries en contournant les nervures plus coriaces à manger. Les changements de direction sont stéréotypés.
Galeries de larves de Phytomyza ilicis dans une feuille de Houx. La larve a induit une hyperplasie et une hypertrophie cellulaire[5].
La nepticule de l'oseille (en) produit des éliciteurs de réactions de défense : la plante synthétise des tanins toxiques rouges qui ont peu d'effet sur l'insecte[6]
La larve de Ectoedemia subbimaculella (en) crée un lambeau triangulaire ouvert sur l'extérieur qui permet de rejeter les excréments[7].
Mine-tente de Acrocercops brongniardella : la plaque est tapissée de soie tissée, ce qui la fait sécher et soulever l'épiderme en cloque.
La chenille du porte-case du bouleau (en) se nourrit comme une mineuse mais se cache dans une case puis un fourreau en forme de cigare à partir duquel elle creuse de petites taches ou mines taches.
Mine-corridor de Phyllocnistis hyperpersea sur une feuille de laurier.
Les grandes plages où se développent des asticots de Pegomya sont des mines collectives.
La chenille de Coleophora binderella (en) creuse des mines taches mais vit dans un fourreau fabriqué à l'aide de morceaux de feuilles et de fils de soie.

Quatre grandes lignées indépendantes d'insectes endo-phytophagess ont évolué vers ce mode de vie très spécialisé. Il permet de se protéger de l'environnement physique (risques de dessiccation, UV), d'échapper aux ennemis naturels (prédateurs, parasitoïdes, parasites, agents pathogènes), constituant un véritable succès évolutif. Ces lignées comprennent environ 30 000 espèces réparties dans 51 familles qui appartiennent dans leur grande majorité aux quatre principaux ordres d'insectes holométaboles : des diptères (asticots des mouches de la famille des Agromyzidés, avec plus de 2 500 espèces), des lépidoptères (chenilles de 34 familles différentes de microlépidoptères), de manière plus anecdotique des hymenoptères (tenthrèdes) et des coleoptères[8],[9].

La coévolution plantes hôtes et insectes parasites a émergé très tôt, certaines mineuses devant se nourrir de tissus durs de Gymnospermes ou de Lycophytes arborescentes. La plupart des ordres majeurs des insectes existaient déjà au Trias moyen, il y a 240 Ma, avant l'apparition des Angiospermes, telle la lignée des Nepticulidés dont les chenilles se sont probablement adaptées à la nouvelle source alimentaire offerte par les tissus végétaux plus tendres des plantes à fleurs[10].

Les feuilles étant la source alimentaire majeure des insectes phytophages, ces derniers ont élaboré trois principales stratégies d'exploitation : creuser des feuilles pour consommer des tissus à haute valeur nutritionnelle ou induire des galles en manipulant la physiologie de la plante pour provoquer l'hyperplasie et l'hypertrophie cellulaire. Comme les animaux gallicoles, quelques espèces de mineuses peuvent induire une masse calleuse par des agents inducteurs (hormones végétales, en particulier l'auxine, peptides, cytokines) présents dans les déjections larvaires[11]. Les insectes foreurs de tige (dont les xylophages) forment la troisième forme majeure d'endo-phytophagie.

Noms français et noms scientifiques correspondants

Parmi les mineurs de feuilles qui peuvent aussi être, bien que plus rarement, des larves de Coléoptères ou d'Hyménoptères, les espèces listées ici ont les caractéristiques générales des Diptères ou des Lépidoptères, avec des nuances pour chaque espèce : voir les articles détaillés pour plus d'informations sur leur description ou leur mode de vie.

Liste alphabétique de noms vulgaires ou de noms vernaculaires attestés[12] en français.
Note : certaines espèces ont plusieurs noms et figurent donc plusieurs fois dans cette liste. Les classifications évoluant encore, certains noms scientifiques ont peut-être un autre synonyme valide.

Galerie

Notes et références

  1. (en) G. Valladares, J. H. Lawton, « Host-Plant Selection in the Holly Leaf-Miner: Does Mother Know Best? », Journal of Animal Ecology, vol. 60, no 1,‎ , p. 227-240 (DOI 10.2307/5456).
  2. a et b Gérard Guillot, « Les mineuses écrivent leur histoire sur les feuilles », sur zoom-nature.fr (consulté le ).
  3. (en) Natalia Kirichenko, Sylvie Augustin & Marc Kenis, « Invasive leafminers on woody plants: a global review of pathways, impact, and management », Journal of Pest Science, vol. 92,‎ , p. 93–106 (DOI 10.1007/s10340-018-1009-6).
  4. (en) Edward F Connor, Melissa P. Taverner, « The Evolution and Adaptive Significance of the Leaf-Mining Habit », Oikos, vol. 79, no 1,‎ , p. 6-25 (DOI 10.2307/3546085).
  5. L'épiderme déchiré marque certainement le trou de bec de la mésange bleue, principale espèce prédatrice de la larve qui entend le bruit qu'elle fait lorsqu'elle s'agite dans sa loge.
  6. Le système digestif de l'insecte est capable d'inhiber ces tanins (présence de surfactants, d'entérobactéries qui produisent des tannases…). Cf (en) Kevin C. Spencer, Chemical Mediation of Coevolution, Elsevier Science, , p. 347-364.
  7. (en) « Ectoedemia subbimaculella », sur naturespot.org.uk (consulté le ).
  8. (en) Juan Núñez-Farfán, Pedro Luis Valverde, Evolutionary Ecology of Plant-Herbivore Interaction, Springer International Publishing, , p. 152.
  9. Gérard Guillot, « Les mineuses de la ronce : des micro-papillons », sur zoom-nature.fr (consulté le ).
  10. (en) Camiel Doorenweerd et al., « Phylogeny, classification and divergence times of pygmy leaf-mining moths (Lepidoptera: Nepticulidae): the earliest lepidopteran radiation on Angiosperms? », Systematic Entomology, vol. 42, no 1,‎ , p. 267–287 (DOI 10.1111/syen.12212).
  11. (en) Antoine Guiguet, Akihisa Hamatani, Taisuke Amano, Seiji Takeda, « Inside the horn of plenty: Leaf-mining micromoth manipulates its host plant to obtain unending food provisioning », PLoS ONE, vol. 13, no 12,‎ (DOI 10.1371/journal.pone.0209485).
  12. Attention aux appellations et traductions fantaisistes circulant sur l'Internet
  13. Nom en français d'après l'Inventaire National du Patrimoine Naturel, sur le site Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN)
  14. a et b Nom en français d'après Dictionary of Common (Vernacular) Names sur Nomen. [lire en ligne]
  15. a et b Meyer C., ed. sc., 2015, Dictionnaire des Sciences Animales. [lire en ligne]. Montpellier, France, Cirad.
  16. Lutter contre les mineuses sur le site Ooreka, consulté le 4 avril 2019.
  17. Cémiostome du pommier, Mineuse cerclée sur le site de l'Encyclopédie des ravageurs européens de l'INRA, consulté le 4 avril 2019.
  18. La mineuse de la tomate - cycle évolutif et stratégies de protection des tomates de serre, sur le site du Ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales de l'Ontario. Consulté le 4 avril 2019.
  19. Tuta absoluta (Mineuse de la tomate) - Fiche de renseignements sur le site de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, consulté le 4 avril 2019.
  20. Mineuse des agrumes (Phyllocnistis citrella ), sur le site Carib Fruits, consulté le 4 avril 2019.
  21. Mineuse des céréales sur le site Agrobase France, consulté le 4 avril 2019.
  22. Mineuse des feuilles d'arbres fruitiers sur le site de l'Encyclopédie des ravageurs européens de l'INRA, consulté le 4 avril 2019.
  23. a et b Mineuse sinueuse sur le site Agrobase France, consulté le 4 avril 2019.
  24. Mineuse des feuilles du pommier sur le site de l'Encyclopédie des ravageurs européens de l'INRA, consulté le 4 avril 2019.
  25. Mineuse des ronces sur le site Agrobase, consulté le 4 avril 2019.
  26. Mineuse du poireau : le bio marche-t-il ?, Par Société Nationale d'Horticulture de France. Publié le 08/02/2015 sur le site du Figaro Jardin, consulté le 4 avril 2019.
  27. Phyllonorycter, Mineuse marbrée sur le site de l'Encyclopédie des ravageurs européens de l'INRA, consulté le 4 avril 2019.
  28. Mineuse marbrée sur le site Agrobase, consulté le 4 avril 2019.
  29. Mineuse sud-américaine de la tomate sur le site Agrobase, consulté le 4 avril 2019.
  30. Mouches mineuses sur le site ephytia de l'INRA, consulté le 4 avril 2019.
  31. Petite mineuse du pêcher sur le site Agrobase, consulté le 4 avril 2019.
  32. Petite mineuse sur le site Agrobase France, consulté le 4 avril 2019.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) E.M. Hering, Biology of the Leaf Miners, Springer, , 420 p. (lire en ligne)
  • (en) György Csóka, Leaf mines and leaf miners, Agroinform, , 192 p.

Articles connexes

Liens externes