Professeur de dessin, Jean Le Gac n'est guère tenté par une carrière conforme aux tendances qui dominent les années 1960, et ses premières activités (promenades, envois postaux) s'affirment en marge des catégories admises, comme celles de Christian Boltanski qu'il connaît depuis 1966.
Passionné de littérature, il en vient à proposer, d'abord dans de modestes cahiers juxtaposant photos et textes également allusifs, le récit des faits et gestes d'un peintre anonyme : ce matériel narratif l'autorise à se définir comme artiste-peintre, projetant ses problèmes, ses doutes et ses humeurs sur son double.
Présenté par Harald Szeemann à la « Documenta V » dans le cadre des Mythologies individuelles, Le Gac est alors intégré dans un Narrative Art aux côtés de Boltanski, Messager ou Jochen Gerz. Son travail rejoint progressivement la présentation classique de la peinture : photos et textes (eux-mêmes photographiés) s'organisent en panneaux encadrés, sans renoncer à l'aspect livresque (Le Peintre de Tamaris, 1989 ; La Biographie (avec peintre et religieuse), 1989 ; Introduction aux œuvres d'un artiste dans mon genre, 1987).
Depuis 1981, il reproduit avec les techniques traditionnelles (fusain, pastels) des illustrations empruntées à la littérature populaire, qui permettent à son personnage de vivre de nouvelles aventures, toutes également stéréotypées, et complète ses images par des objets (machine à écrire, appareil photo, projecteur de cinéma) évocateurs d'une mise en scène ou d'une fiction qui n'en finit pas de mettre en abyme ses procédés : l'œuvre de Le Gac s'élabore sur l'absence d'œuvre de son héros.
« Je ne parviens plus à croire comme certains que l'art moderne fait encore question. Pour moi, l'histoire de l'art moderne a été vite plébiscitée. C'est aujourd'hui une vieille dame assez conformiste qui ressasse ses souvenirs[1]. »
Évelyne Artaud, L'Atelier de Jean Le Gac, Paris, Thalia Édition, 2010.
Laurent Olivier, Jean Le Gac, l'effraction douce, éditions La Pionnière / Pérégrines, 2009.
Catherine Francblin, Jean Le Gac, Paris, Flammarion, 1984.
Dimosthenis Davvetas et Bernard Marcadé, Jean Le Gac, le peintre blessé, Paris, éditions Galilée, 1988.
Anne Dagbert, Jean le Gac, Paris, Fall Éditions, 1998.
Collectif, Une œuvre de Jean Le Gac, Marseille, éditions Muntaner, coll. « Iconotexte », 2000.
Jean-Pierre Mourey, « Fiction et mise en récit : Jean Le Gac », in Traces photographiques, traces autobiographiques, Saint-Étienne, Puse, coll. « Cierec », 2004, p. 53-63.