Les ilustrados (en espagnol : [ilusˈtɾaðos], « érudits » [1], « savants » [2], ou « éclairés » [3]) constituaient l'intelligentsia philippine (classe instruite, souvent dans l'enseignement supérieur) pendant la période coloniale espagnole à la fin du XIXe siècle[4],[5]. Ailleurs en Nouvelle-Espagne (dont faisaient partie les Philippines), le terme gente de razón (gens de raison) avait une signification similaire.
Il s'agit de Philippins de la classe moyenne et supérieure de la fin de la colonisation espagnole, dont beaucoup ont été éduqués en Espagne et exposés aux idées du libéralisme et du nationalisme et de l'identité nationale, débattues en Espagne et en Europe. La classe ilustrado était composée d'intellectuels nés et/ou élevés aux Philippines et traversait les lignes ethnolinguistiques et raciales — métis( à la fois de Sangleyes et de Español ), insulares et indios, entre autres — et désirait une réforme à travers « un arrangement plus équitable du pouvoir à la fois politique et économique » sous la tutelle espagnole.
Stanley Karnow, dans son ouvrage In Our Image: America's Empire in the Philippines, a qualifié les ilustrados de « riche intelligentsia » parce que beaucoup étaient les enfants de riches propriétaires fonciers ou de familles de bailleurs ayant des locataires (inquilinos). Ils furent des figures clés du développement du nationalisme philippin[3],[6],[7],[8],[9].
Les romans de Rizal Noli Me Tangere (« Ne me touche pas ») et El Filibusterismo (« Le subversif ») « ont exposé au monde les discriminations et injustices imposées aux Philippins sous le régime colonial espagnol »[8],[11].
Au début, Rizal et ses collègues ilustrados préféraient ne pas obtenir l'indépendance de l'Espagne, mais voulaient plutôt l'égalité juridique pour les péninsulaires et les indigènes — les indiens, les insulares et les métis, entre autres — et les réformes économiques exigées par les ilustrados demandaient que "les Philippines soient représentées dans les assemblées parlementaires (Cortes) et considérées comme une province d'Espagne" et "que les paroisses soient sécularisées "[9],[11].
Le 20 janvier 1872 a lieu une mutinerie dans l'arsenal de Cavite, près de Manille, durant laquelle les ouvriers et marins philippins tuent plusieurs officiers espagnols. Leur geste est, semble-t-il, motivé par des rumeurs sur la perte de certains privilèges liés à leur engagement dans l'armée. Le gouvernement espagnol, qui y voit à tort une insurrection motivée par les idées libérales en provenance d'Europe, réagit de façon brutale et ordonne l'exécution de trois prêtres réformateurs, José Burgos, Mariano Gomez et Jacinthe Zamora, et condamne à l'exil de nombreux intellectuels philippins. Ces événements constituent les prémices de la révolution philippine (1896-1898).
Surnommé le Don Quichotte des Philippines, et exécuté par les autorités espagnoles en 1896, Rizal devient aussitôt un martyr et héros national, ce qui renforce la résistance au régime colonial.
La politique philippine des États-Unis a renforcé la position dominante des ilustrados au sein de la société philippine. Des domaines des congrégations et monastères des frères ont été vendus aux ilustrados, et la plupart des postes gouvernementaux leur ont été offerts[9].
↑Megan Christine Thomas, Orientalists, Propagandists, and Ilustrados: Filipino Scholarship and the End of Spanish Colonialism, U of Minnesota Press, (ISBN978-0-8166-7190-8, lire en ligne), 213
↑Michael Cullinane, Ilustrado Politics: Filipino Elite Responses to American Rule, 1898-1908, Ateneo University Press, (ISBN978-971-550-439-3, lire en ligne)
↑ abc et dHistory of the Philippines, Embassy of the Republic of the Philippines, Department of Foreign Affairs, PhilippineEmbassy-USA.org (undated, archived from the original on July 13, 2007), consulté le