Hospice de Nice, en latin Hospitius, en langue niçoiseOuspici est mort le . Il est également connu sous le nom d’Hospice le Reclus[1]. C'est une figure hagiographique du christianisme de la région niçoise dont l'hagiographie figure dans l’Histoire des Francs de Grégoire de Tours (VIe siècle) dont il aurait été contemporain. Répertorié comme saint dans les listes et ouvrages hagiographiques catholiques, il est fêté le 21 mai.
Selon une tradition unique rapportée par Grégoire de Tours, Hospitius aurait vécu en reclus dans une tour près de Nice. Cet auteur le décrit comme un ascète et précise : « (Il) ne mangeait rien autre chose que du pain et quelques dattes. Dans les jours du carême il se nourrissait de la racine d’une herbe d’Égypte à l’usage des ermites de ce pays et que lui apportaient les négociants[2] ». Toujours selon la tradition, il se couvrait volontairement de lourdes chaînes et passait sa vie dans la prière.
L’auteur lui attribue un don de prophétie : le même texte indique qu'il aurait prédit que la Gaule serait envahie par les Lombards, ce qui serait une punition divine pour la dépravation de ses habitants[2]. Selon l’hagiographie, il conseille aux moines d’aller se réfugier ailleurs à cause de l’invasion ; mais ceux-ci ne voulurent pas partir sans Hospitius, qui les rassure en prédisant qu’il souffrirait des Lombards mais qu’ils ne le tueront pas.
La tradition raconte ensuite que des soldats lombards arrivés devant la tour de l’ascète et le voyant couvert de chaînes, pensent que c'est un criminel emprisonné. Un des soldats voulant le tuer voit sa main figée et son épée tomber au sol. Hospitius le guérit et, en remerciement, le soldat lui demande à devenir moine, Hospitius le tonsurant sur place. Ce moine aurait relaté ce miracle à Grégoire[3]. Le reste de la troupe laisse Hospitius en paix et rentre sain et sauf en Lombardie.
Hospitius aurait poursuivi sa vie de prière par la suite. La tradition grégorienne lui attribue les guérisons d'un infirme, d'un aveugle et plusieurs femmes possédées. Il aurait prédit la date de sa mort et demandé qu'on appelle l’évêque de Nice, Austadius — inconnu hors du récit de Grégoire —, pour présider à ses funérailles. Selon Grégoire de Tours, plusieurs récits de la vie d'Hospitius auraient été écrits mais il n'en existe nulle trace.
En une mention incidente, Victor Hugo (1802-1885), parlant de concordances entre les « menues fables populaires », compare aussi dans Les proses philosophiques (1860-1865, publication posthume) cette légende locale à celle mettant en scène « le cheik Amrou [qui] paralyse l’émir Nassar-Eddin prêt à le frapper ». Et Victor Hugo de conclure : « Ces légendes, quelques-unes poétiques, d’autres puériles, n’ont d’autre valeur philosophique que leur ressemblance. C’est par là seulement qu’elles méritent d’être visées et homologuées en passant[5] ». Par ailleurs, un personnage du roman Han d’Islande (1823) du même auteur, invoque « Saint Hospice» par deux fois[6].
Frédéric Mistral (1830-1914) mentionne ce saint dans son Tresor (1879) : « Sant Ouspice, saint Hospice ou Sospis, cénobite célébré à Nice, mort en 581[7] ».
Dans l’Oblat, de Joris-Karl Huysmans (1848-1907), le personnage de Dublat mentionne anecdotiquement « Hospitius qui s’écroua près de Nice » parmi d'autres reclus locaux[8].
Sospis fait figure de forme populaire. Auguste Longnon (1844-1911) dans Les noms de lieu de la France (1922)[9] explique cette forme par une mécoupure. « Le passage du groupe latin ct au son chuintant, qu’on observe dans la langue espagnole (noche = noctem ; — ocho = octo ; — techo = tectum) s’est aussi produit dans les parlers de la France méridionale […]. Sanctus et sancta sont ainsi devenus, au Moyen Âge, sanch et sancha […][10]. » C’est ainsi que Saint-Chinian (Hérault) répond à Sanctus Anianus, par mécoupure. Dans d’autres zones[11] on a le son sifflant au lieu du son chuintant, d’où Saint-Sospis répondant à Sanctus Hospitius.
Une chapelle Saint-Hospice se trouve sur la pointe Saint-Hospice de Saint-Jean-Cap-Ferrat. Elle fut construite au XIe siècle sur les ruines de la tour où avait vécu cet ermite. Laissée à l’abandon, elle subit les outrages du temps jusqu’en 1980, puis elle a bénéficié d’une restauration complète grâce à l’action du conseil général des Alpes-Maritimes et de l'Association pour la restauration de Saint-Hospice. Elle est classée monument historique[13]. Les environs de la chapelle constituent le lieu-dit « Saint-Hospice ».
La pointe sur le côté est de la presqu’île du cap Ferrat porte le nom de pointe Saint-Hospice[14]. Située au niveau cette pointe, et à proximité de la chapelle Saint-Hospice, une statue de douze mètres de haut, classée monument historique[15], porte le nom de « Vierge de Saint-Hospice[16] ». Elle se trouve près de la tour Saint-Hospice, dite tour génoise, également classée monument historique[17] et édifiée par le roi de Sardaigne Charles-Emmanuel III au XVIIe siècle pour servir de prison d'État mais qui n'a jamais accueilli de prisonnier[18].
Le fort construit en 1560-1561 sur décision du duc de Savoie Emmanuel-Philibert afin de défendre le territoire niçois, prit le nom de fort Saint-Hospice[18].
Il existe une chapelle Saint-Hospice à Bonson (Alpes-Maritimes). La Saint-Hospice (fêtée en 2011 le dimanche ) est l’occasion d’une procession où l’on porte une statue de saint Hospice, sculptée par Marius Giacobi[26].
Invocations locales
Saint Hospice était invoqué dans la région pour obtenir la pluie. Il était considéré comme étant le patron des témoins et un adage local en niçois fustige les faux témoins en évoquant Ouspici (Hospice)[14].
Un autre proverbe local dit « Que sant'Ouspici ti garde judici » (Que saint Hospice te garde le bon jugement)[14].
Notes et références
↑Grégoire de Tours (trad. MM. J Gadet et Taranne), Histoire ecclésiastique des Francs en dix livres, Renouard, (lire en ligne), p. 361.
↑ a et btexte ici [1] (rechercher le mot « Hospitius »).
↑Frédéric Mistral, Lou tresor dóu felibrige ou dictionnaire provençal-français, édition préfacée par Jean-Claude Bouvier, éditeur : Aix-en-Provence : Edisud, 1990, 2 vol., 1196 + 1164 p., 24 cm, (ISBN2-85744-052-9) (édition papier apparemment en facsimile) ; Sub verboOUSPICE (tome II, page 450) on trouve mentionné « Sant Ouspice, saint Hospice ou Sospis, cénobite célébré à Nice, mort en 581. »
↑Auguste Longnon, Les noms de lieu de la France : leur origine, leur signification, leurs transformations : résumé des conférences de toponomastique générale faites à l’École pratique des hautes études, section des sciences historiques et philologiques, publié par Paul Marichal et Léon Mirot, préface de Jacques Chaurand, Éditions Honoré Champion, Paris, 1999, XV pages + 831 pages, 23 cm, (ISBN2-7453-0046-6), « réimpression de l’édition de Paris, 1929 ».
↑ a et bVictor Emanuel, « À Saint-Hospice — un promontoire historique — le fort et la tour, la vierge de bronze » inNice-Historique, 1914, no 357, p. 80-83 [lire en ligne]
↑« Rue Saint-Hospice », in Marguerite et Roger Isnard, Per carriera : Dictionnaire historique et anecdotique des rues de Nice, Nice, Serre, 2003 [lire en ligne].
↑ Une photographie légendée Le martyre de saint Hospice. Groupe sculpté polychrome, Nice, chapelle des Pénitents Rouges figure dans : Denis Ghiraldi, « Hospice (saint) », page 187 inRalph Schor (sous la direction de), Dictionnaire historique et biographique du comté de Nice, Serre, 2002, 412 page, (ISBN2-86410-366-4) (Dictionnaire constituant le volume IV de l’Encyclopædia Niciensis).
↑Vies des saints et des bienheureux selon l’ordre du calendrier avec l’historique des fêtes avec la collaboration de Dom Jules Baudot, Dom Paul Antin et Dom Chaussin, Paris, Letouzé et Ané, 1935-1959, 13 volumes, 22 cm (le tome 13 contient une table générale) : tome 5 (mois de mai), 639 pages, 1947, « Saint Hospice, ermite et confesseur (VIe siècle) » (pages 415-419) ; voir page 419 : « La cathédrale de Nice ne possède comme reliques de saint Hospice qu’un os de sa main. Il en existe d’autres dans plusieurs églises du diocèse, notamment à Villefranche, à la Turbie et dans le sanctuaire de la presqu’île San Sospis. »
↑J.-M. Moreau, « Bonson : Fêtez la Saint-Hospice dimanche », page 8 in Nice-Matin (support papier ; édition « Nice Vallées ») no 23205 du jeudi 13 octobre 2011.
Grégoire de Tours, Histoire des Francs, traduit du latin par Robert Latouche, édité à Paris par Les Belles Lettres ; deux tomes (1963-1965). Tome 1, 325 pages (livres I à V), 1963. Tome 2, 354 pages (livres VI à X). Chapitre VI du livre VI : tome 2, pages 16 à 21.
Alban Butler (1710-1773), Vies des Pères, des martyrs, et des autres principaux saints, volume 4, chez Barbou, 1766, page 475 : « Saint Hospice, reclus en Provence » : [4]
Vies des saints et des bienheureux selon l’ordre du calendrier avec l’historique des fêtes avec la collaboration de Dom Jules Baudot, Dom Paul Antin et Dom Chaussin, Paris, Letouzé et Ané, 1935-1959, 13 volumes, 22 cm (le tome 13 contient une table générale) : tome 5 (mois de mai), 639 pages, 1947, « Saint Hospice, ermite et confesseur (VIe siècle) », pages 415-419
Article « St. Hospitius » in Catholic Encyclopedia, 1913, article en ligne
Pierre Gioffredo (1629-1692), Nicæa Civitas, p. 105 sv. — Référence fournie dans : Denis Ghiraldi, « Hospice (saint) », page 187 inRalph Schor (sous la direction de), Dictionnaire historique et biographique du comté de Nice, Serre, 2002, 412 page, (ISBN2-86410-366-4) (Dictionnaire constituant le volume IV de l’Encyclopædia Niciensis).
Victor Emanuel, « À Saint-Hospice — un promontoire historique — le fort et la tour, la vierge de bronze » inNice-Historique, 1914, no 357, p. 80-83 [lire en ligne]
Denis Ghiraldi (1915-2006), « Hospice (saint) », page 187 inRalph Schor (sous la direction de), Dictionnaire historique et biographique du comté de Nice, Serre, 2002, 412 page, (ISBN2-86410-366-4) (Dictionnaire constituant le volume IV de l’Encyclopædia Niciensis) [lire en ligne]
« Rue Saint-Hospice », dans Marguerite Isnard, Roger Isnard, Per carriera : Dictionnaire historique et anecdotique des rues de Nice, Nice, Serre, 2003 (ISBN2-86410-388-5) [lire en ligne].
« Saint Hospice ou Hospitius, ermite », dans Marguerite Isnard, Roger Isnard, Nouvel almanach du comté de Nice: memoria e tradicioun, Serre, 2006 (ISBN286410461X et 9782864104612), p. 130 [lire en ligne].