Fonds des services de santé

Le Fonds des services de santé (FSS, anciennement appelé fonds des services hospitaliers de 1976 à 1978 puis fonds de l'assurance-maladie jusqu'en 1981) est depuis 1976 un fonds spécial géré par le gouvernement du Québec qui est destiné au financement des services de santé[1].

Même s'il est distinct du fonds général du revenu, le fonds des services de santé n'est pas classé comme un fonds spécial aux fins de la comptabilité gouvernementale et ses résultats financiers sont groupés avec le fonds général dans les comptes publics[2] même s'il est désigné fonds spécial dans la Loi sur la Régie de l’assurance maladie du Québec[3].

Lors de l'année fiscale terminée le 31 mars 2022 le FSS a permis de financer les services de santé à hauteur de 9,16 milliards de dollars ; ce qui en faisait la 3e plus importante source de financement après la contribution du gouvernement du Québec (30,45 milliards) et les transferts du gouvernement du Canada (12,64 milliards principalement par le Transfert canadien en matière de santé)[4].

Historique

1970–1976 : Instauration d'une contribution

Le , le ministre des Finances Paul Dozois annonce une réforme de l'assurance-maladie au Québec dans son discours sur le budget. Le ministre indique que son parti, l'Union nationale, s'était en effet engagé aux élections de 1966 à mettre en place un régime d'assurance-maladie géré par une régie autonome. Pour assurer le financement de cette mesure le ministre annonce l'instauration d'une nouvelle contribution appliquée[5]:

  • Aux particuliers ayant un revenu supérieur à 2 000 $ (4 000 $ si en couple) à un taux de 0,8 % de leur revenu net à concurrence de 125 $[6];
  • Aux employeurs à un taux de 0,8 % de leur masse salariale[7].

En 1973 l'exemption pour les particuliers est haussée à 2 500 $ (5 000 $ si en couple)[8].

Le gouvernement du Canada refuse de régler sa contribution en tant qu'employeur. À la suite d'un accord intervenu avec le gouvernement du Québec en 1978, le gouvernement fédéral et les sociétés d'État fédérales acceptent de se soumettre aux dispositions de la contribution et de régler de façon rétroactive leurs cotisations dues depuis 1975. En contrepartie le gouvernement du Québec modifie certaines de ses taxes indirectes et abandonne le recouvrement des contributions du gouvernement et des sociétés fédérales pour les années 1971 à 1974 conformément à l'entente signée[9].

Depuis 1976 : Financement par fonds spéciaux

1976–1978 : création du fonds des services hospitaliers (FSH)

Le premier fonds spécial de financement, dénommé fonds des services hospitaliers est mis en place le [10]. À cette occasion la contribution est rehaussée :

  • À 1,2 % en 1976 puis 1,5 % à partir de 1977 du revenu net excédant l'exemption (3 700 $ ou 5 600 $ si en couple) pour les particuliers, à concurrence de 235 $[11];
  • Pour les employeurs à 1,5 % de leur masse salariale versée à partir du [note 1],[13].

Dès lors le ministère du Revenu, qui perçoit les cotisations des particuliers et employeurs, est tenu de remettre 815 des fonds à la Régie de l'assurance-maladie (RAMQ) et le solde (715) au fonds des services hospitaliers (FSH)[note 2],[15].

En pratique, malgré son statut de fonds spécial, les opérations du FSH sont confondues avec le fonds général du revenu dans les comptes publics[16].

1978–1981 : fonds de l'assurance-maladie (FAM)

Le FSH est abrogé le [17] et immédiatement remplacé par le fonds de l'assurance-maladie (FAM)[18].

Contrairement au FSH, l'intégralité de la contribution est remise au FAM et une nouvelle disposition prévoit que le gouvernement du Québec doit renflouer le fonds – si ses dépenses excèdent les contributions perçues – à même le fonds général du revenu[19].

La contribution pour les particuliers est intégralement supprimée, seule subsiste la contribution des employeurs égale à 1,5 % de leur masse salariale[20]. La contribution des employeurs est déductible du revenu net aux fins de l'impôt sur les sociétés, ce qui a pour effet de faire supporter une partie du financement sur le gouvernement fédéral, comme le reconnaît Jacques Parizeau en 1978[note 3].

Depuis 1981 : fonds des services de santé (FSS)

Le , le ministre des Finances Jacques Parizeau annonce une réforme du financement de la santé dans son discours sur le budget[21]:

  • Le FAM est aboli le et est remplacé par le fonds des services de santé (FSS) qui finance toujours l'assurance-maladie mais également une partie de l'assurance-hospitalisation[22] ;
  • Le taux de cotisation pour les salaires versés après le 31 mars 1981 est doublé et passe à 3 %[note 4],[24] ;
  • La moitié de la contribution est affectée au financement de l'assurance-maladie, l'autre au financement du ministère des Affaires sociales ;
  • La réforme annoncée devait générer 508 millions de dollars de nouveaux revenus, somme tenant compte du fait que la contribution au FSS est déductible aux fins de l'impôt des sociétés.

Le taux de cotisation au FSS pour les employeurs est relevé plusieurs fois à partir de la fin des années 1980. Le taux statutaire est inchangé mais une surtaxe est instaurée et régulièrement haussée :

  • Une première hausse est effective le lorsqu'une surtaxe de 7,25 % est imposée (le taux effectif passe donc de 3 à 3,2175 %) ;
  • La surtaxe est haussée à 12 % à partir du (le taux effectif passe à 3,36 %) ;
  • La surtaxe est haussée à 15 % à partir du (le taux effectif passe à 3,45 %) ;
  • La surtaxe est abandonnée et le taux est haussé à 3,75 % le à la suite d'une annonce faite au budget 1991 en mai 1991. La hausse devait intervenir le initialement[25] ;
  • Le taux est haussé une dernière fois lors du budget 1995 à 4,26 % à partir du [26].

Le , le ministre des Finances Gérard D. Levesque annonce que la quasi-totalité des revenus (sauf, notamment, les revenus d'emplois et les pensions alimentaires) perçus par les particuliers feront l'objet d'une cotisation au FSS[note 5] payable au moment de la production de la déclaration de revenus. La mesure est appliquée à partir du . La cotisation est calculée comme suit[28],[29]:

  • Aucune cotisation n'est calculée sur les premiers 5 000 $ de revenus ;
  • 1 % des revenus au-dessus de 5 000 $, à concurrence de 150 $ et ;
  • 1 % des revenus au-dessus de 40 000 $ sans que la cotisation n'excède 1 000 $.

Une réduction d'impôt de 20 % est instaurée au moment de la mise en place de la cotisation[30]. La réduction est supprimée en 2005 lorsque le régime unifié d'imposition est mis en place mais le montant payé est inclus dans le calcul du montant complémentaire au montant de base[31].

Les pensions de sécurité de la vieillesse sont exclues de l'assiette de calcul de la cotisation dès 1994[32],[33].

Financement

Le FSS est principalement financé par des cotisations versés par les employeurs situés au Québec[34]. Les particuliers résidents au Québec doivent également verser des contributions sur certains types de revenus (les revenus d'emploi étant notamment exonérés). Cette cotisation est calculée et perçue lors de la déclaration annuelle des revenus[35]. Ces deux cotisations sont perçues par Revenu Québec.

Le gouvernement du Québec est lui-même assujetti à la contribution au FSS à titre d'employeur[36].

Notes et références

Notes

  1. Un taux dérogatoire à 0,8 % est instauré pour la masse salariale des municipalités versée entre le et le [12].
  2. La répartition est fixée à 23 (RAMQ) et 13 (FSH) de façon dérogatoire pour l'année 1976[14].
  3. « Une des caractéristiques des contributions des employeurs, c'est qu'elles sont soustrayables de l'impôt sur les profits des corporations, ou plutôt du revenu imposable aux fins du calcul de l'impôt sur les corporations. C'est donc dire que le gouvernement fédéral paie une bonne partie – indirectement, bien sûr, par le truchement de l'impôt sur les corporations – de ces contributions des employeurs[9]. »

    — Jacques Parizeau, ministre des Finances et ministre du Revenu

  4. Les municipalités bénéficient par dérogation du taux précédent de 1,5 % pour les salaires versés entre le et le [23].
  5. Selon la loi appliquant la disposition, la cotisation est officiellement nommée contribution jusqu'au [27].

Références

  1. Comptes de la santé 2023, p. 9.
  2. [PDF] Comptes publics 2021-2022, vol. 2 : Renseignements financiers sur le Fonds consolidé du revenu : Fonds général et fonds spéciaux, Québec, Gouvernement du Québec, , 481 p. (ISSN 1925-1815, lire en ligne), p. 1
  3. RLRQ, c. R-5, art. 38.
  4. Comptes de la santé 2023, p. 3.
  5. Paul Dozois, ministre des Finances, Discours du budget, Québec, Gouvernement du Québec, , 65 p. (lire en ligne), p. 55
  6. LQ 1970, c. 37, art. 64.
  7. LQ 1970, c. 37, art. 67.
  8. Raymond Garneau, ministre des Finances, Discours sur le budget 1973/74, Québec, Gouvernement du Québec, , 54 p. (lire en ligne), p. 12
  9. a et b Journal des débats, 23 mai 1978
  10. LQ 1976, c. 27, art. 8.
  11. LQ 1976, c. 27, art. 2, 15(a).
  12. LQ 1976, c. 27, art. 15(c).
  13. LQ 1976, c. 27, art. 5, 15(d).
  14. LQ 1976, c. 27, art. 15(e).
  15. LQ 1976, c. 27, art. 7.
  16. Comptes publics 1977-1978, vol. 1 : États financiers, Québec, Gouvernement du Québec, , 526 p. (ISSN 0706-2869), p. 21
  17. LQ 1978, c. 70, art. 12.
  18. RLRQ, c. R-5, art. 32 tel que spécifié par LQ 1978, c. 70, art. 10.
  19. RLRQ, c. R-5, art. 33 tel que spécifié par LQ 1978, c. 70, art. 10.
  20. RLRQ, c. R-5, art. 28 tel que spécifié par LQ 1978, c. 70, art. 10.
  21. Jacques Parizeau, ministre des Finances et président du Conseil du trésor, Discours sur le budget 1981-1982, Québec, Gouvernement du Québec, , 116 p. (lire en ligne), p. 25, 93
  22. LQ 1981, c. 12, art. 28.
  23. LQ 1981, c. 12, art. 27(2).
  24. LQ 1981, c. 12, art. 27.
  25. Gérard D. Levesque, ministre des Finances, Discours sur le budget 1991-1992, Québec, Gouvernement du Québec, , 233 p. (lire en ligne), A69
  26. Loi modifiant la loi sur les impôts, la loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, LQ 1995, c. 63, art. 283 (lire en ligne, consulté le )
  27. LQ 1993, c. 64, art. 222(2).
  28. Gérard D. Levesque, ministre des Finances, Discours sur le budget 1993-1994, Québec, Gouvernement du Québec, , 186 p. (lire en ligne), p. 15, A24–A27
  29. LQ 1993, c. 64, art. 222(1).
  30. LQ 1993, c. 64, art. 71.
  31. Ministère des Finances, Budget 2004-2005 : Renseignements additionnels sur les mesures du budget, Québec, Gouvernement du Québec, , 240 p. (ISBN 2-551-22482-9, lire en ligne), p. 39
  32. André Bourbeau, ministre des Finances, Budget 1994-1995 : Discours sur le budget et Renseignements supplémentaires, Québec, Gouvernement du Québec, , 242 p. (ISSN 0839-8445, lire en ligne), p. 15
  33. RLRQ, c. R-5, art. 34.1.4 tel que spécifié par Loi modifiant la loi sur les impôts, la loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, LQ 1995, c. 1, art. 219 (lire en ligne, consulté le )
  34. Revenu Québec, « Cotisation de l'employeur au Fonds des services de santé », sur Revenu Québec (consulté le )
  35. Revenu Québec, « Cotisation des particuliers au Fonds des services de santé », sur Revenu Québec (consulté le )
  36. Comptes de la santé 2023, p. 2.

Bibliographie

  • [PDF] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Comptes de la santé : 2020-2021, 2021-2022, 2022-2023, Québec, Gouvernement du Québec, (ISBN 978-2-550-93943-6, lire en ligne)
  • Loi sur la Régie de l’assurance maladie du Québec, RLRQ, c. R-5 (lire en ligne, consulté le )
  • Loi de l'assurance-maladie, LQ 1970, c. 37 (lire en ligne, consulté le )
  • Loi pourvoyant au financement des programmes de santé, LQ 1976, c. 27 (lire en ligne, consulté le )
  • Loi modifiant la Loi de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, LQ 1978, c. 70 (lire en ligne, consulté le )
  • Loi modifiant certaines dispositions législatives, pour donner suite à la politique budgétaire du gouvernement pour l'exercice 1981-1982, LQ 1981, c. 12 (lire en ligne, consulté le )
  • Loi modifiant de nouveau la loi sur les impôts et diverses dispositions législatives, LQ 1993, c. 64 (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi