Exhumation de Francisco Franco

Tombe de Franco à Valle de los Caídos.
Francisco Franco, à droite, durant sa dernière année de vie avec Carlos Arias Navarro.
Le Valle de los Caídos, dans la commune de San Lorenzo de El Escorial.
Blason de la Maison de Franco (es) en vigueur jusqu'en 1975, qui a couvert le cercueil de Franco durant son déplacement.

L'exhumation et la relocalisation du corps de Francisco Franco ont été approuvées par le gouvernement de Pedro Sánchez le 15 février 2019[1]. Initialement prévue avant le 1er mars 2019, elle a été retardée en raison d'une suspension préventive par le juge José Yusty Bastarreche[2],[3], et plus tard également à titre conservatoire par le Tribunal suprême à l'unanimité[4]. Enfin, le 24 septembre 2019, le Tribunal suprême, rejetant le recours formé par la famille, a entériné l'exhumation de Francisco Franco, ainsi que son enterrement dans le cimetière de Mingorrubio[5].

Le gouvernement a déterminé que les restes du dictateur devaient être transférés de la Valle de los Caídos au cimetière de Mingorrubio d'El Pardo, après que l'emplacement de la cathédrale de l'Almudena à Madrid, proposé par la famille de Franco, a été rejeté[6].

Historique

Le secrétaire général de l'époque, Pedro Sánchez, du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), avait promis que les restes de Franco seraient retirés de la Valle de los Caídos conformément au mandat du Congrès des députés[réf. souhaitée].

Décision politique

En , le Congrès des députés vote en faveur du transfert des restes de Franco hors du mausolée du Valle de los Caídos. Le gouvernement de Mariano Rajoy, formé par le Parti populaire qui fut le seul à ne pas voter la résolution, n'est toutefois pas dans l'obligation de l'appliquer[7].

Après le vote d'une motion de censure contre Mariano Rajoy en , le socialiste Pedro Sánchez devient président du gouvernement[8]. Le 25 août 2018, son gouvernement socialiste publie un décret-loi ouvrant la voie à son exhumation et au transfert de sa dépouille au cimetière du Pardo[9],[10]. Le Parti populaire et Ciudadanos s'opposent en revanche à cette décision[11].

Le pays est cependant partagé : « d’après les sondages un peu plus de 40 % soutiennent l’exhumation, 38 % la critiquent et 20 % n’en pensent rien »[12].

Bataille judiciaire

Le 4 juin 2019, le Tribunal suprême espagnol suspend l'exhumation de la dépouille de Franco, une semaine avant qu'elle ait lieu, estimant qu'il faut attendre l'issue des recours de la famille de Franco pour empêcher le transfert du corps[13].

Le , le Tribunal suprême rejette le recours de la famille autorisant ainsi l'exhumation de Franco du Valle de los Caídos pour son transfert dans le discret cimetière du Pardo, où est enterrée son épouse[14]. Le , le prieur Santiago Cantera interdit l'accès à la basilique afin d'empêcher le transfert[15]. Le , la numéro deux du gouvernement, la socialiste Carmen Calvo, annonce que, d'ici le 25 octobre, la dépouille de Franco ne sera plus au Valle de los Caídos et que sa famille sera « informée 48 heures à l'avance du jour et de l'heure » de l'opération[16].

Se basant sur un décret royal ordonnant le règlement sur les honneurs militaires dus notamment aux anciens présidents du gouvernement, la famille demande expressément les honneurs « pour une unité avec drapeau, groupe et musique ». Ils doivent comprendre « un chant de l'hymne national complet, de l'arme présentée et d'une décharge de fusil » ou « des tirs de canon ». La famille demande que le cercueil de Franco « soit recouvert d'un drapeau national lors du transfert et de l'inhumation de sa dépouille » et que soient célébrés un office religieux lors de l'exhumation et une messe lors de la réinhumation[17]. L'exécutif espagnol rejette ces demandes n'autorisant qu'une eucharistie brève et intime sur le lieu de l'inhumation célébrée par Ramón Tejero (fils d'Antonio Tejero)[18].

Saisie en urgence, le 14 octobre, par la Fondation Francisco Franco, la CEDH décide, le 17 octobre, de « ne pas intervenir »[19].

Déplacement de la dépouille

Dans la soirée du 17 octobre, on apprend que les permissions ont été suspendues pour la journée du au sein des unités de la Garde civile proches du Valle de los Caídos[20]. Dans l'après-midi du , la communauté bénédictine informe que des machines sont amenées sur le site pour « procéder à la profanation »[21],[18]. Le , le gouvernement espagnol annonce que le transfert aura lieu le [22].

L'exhumation commence le avant 11 heures en présence de 22 membres de la famille de Franco et de la ministre de la Justice Dolores Delgado. Le cercueil est sorti de la basilique peu avant 13 heures et porté par 8 membres de la famille, puis placé dans le corbillard au cri de « Vive l'Espagne ». La dépouille est réinhumée après une cérémonie religieuse au cimetière de Mingorrubio. L'hymne de la phalange est chanté par deux cents nostalgiques rassemblés près du cimetière[23].

Opposition à l'exhumation

Partis politiques représentés au parlement

Parmi les groupes politiques les plus en vue, Unidas Podemos a soutenu la décision du gouvernement tandis que Vox, le Parti populaire et Ciudadanos y étaient opposés[24],[25].

Famille et proches du site

La famille de Franco, la Fondation Francisco Franco, la communauté bénédictine et l'association de défense de la Valle de los Caídos ont recouru en vain au Tribunal suprême pour paralyser l'ordre du gouvernement. La famille a fait appel devant la Cour européenne des droits de l'homme[26]. L'abbaye bénédictine qui garde la Valle de los Caídos a également fait appel de cette décision contre le gouvernement, qui attend la réponse de la haute cour[27]. Leur ferme position qu'en cas de mutation, le lieu où le dictateur devait être inhumé se trouve dans la crypte de la cathédrale de la Almudena à Madrid[28] et finalement ils ont demandé que les restes de Francisco Franco ne soient pas utilisés à des fins politiques[29].

Le gouvernement, par le biais de la délégation du gouvernement à Madrid, a interdit le 24 février les manifestations de la Fondation Francisco Franco et de l'Association pour la revendication des incendies de mémoire historique à Mingorrubio, dont l'interdiction a été levée par la Haute Cour de justice de Madrid le même 24 février[30]. En revanche, le prieur de l'abbaye de Valle de los Caídos a dénoncé le 21 octobre le gouvernement pour avoir empêché le libre accès aux services religieux et la garde civile pour « accès non-autorisé » à un lieu de culte[31].

Militants franquistes et phalangistes

D'autre part, des partisans franquistes ont menacé les agents chargés de soulever la dalle et de restaurer le sol, qui ont été contraints de se présenter à la garde civile[32], et ont également menacé un salon funéraire qui était censé être responsable de l'exhumation[33].

Notes et références

  1. « El Gobierno español aprueba la orden para exhumar al dictador Francisco Franco », Agencia EFE, .
  2. « Un juzgado de Madrid suspende cautelarmente el permiso para exhumar a Franco », El País, .
  3. « El Gobierno intentó negociar con los Franco hasta esta semana la exhumación del dictador », eldiario.es, .
  4. « El Supremo paraliza de forma cautelar la exhumación de Franco y retrasa los planes del Gobierno », RTVE, .
  5. Reyes Rincón, « El Supremo avala que los restos de Franco salgan del Valle de los Caídos y vayan al cementerio de El Pardo », El País,‎ (lire en ligne).
  6. « Gobierno de España aprueba orden para exhumar al dictador Franco », Publimetro, .
  7. « Espagne : les députés réclament que Franco quitte son mausolée », AFP,‎ (lire en ligne).
  8. El socialista Pedro Sánchez asumió como nuevo presidente del Gobierno. Publicado el 2 de junio de 2018. Consultado el 16 de febrero de 2019.
  9. Sánchez ya tiene el decreto para exhumar a Franco, El Periódico de Catalunya, 21 août 2018.
  10. Décret-loi royal no  10/201 du 24 août 2018 portant modification de la loi no  52/2007 du 26 décembre 2007, par laquelle sont reconnus et élargis les droits en faveur des victimes de persécutions ou de violences pendant la Guerre civile et la Dictature et pour lesquels sont prévues des mesures., Bulletin officiel de l'État, 25 août 2018.
  11. (es) EFE, Cadena SER, « PP y Ciudadanos no apoyarán el decreto ley del Gobierno para exhumar a Franco », Cadena SER,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  12. « La Cour suprême espagnole autorise l'exhumation de Franco », sur lecho.be, .
  13. « En Espagne, l’exhumation de Franco suspendue », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  14. « La Cour suprême espagnole autorise l’exhumation de Franco », sur Le Monde, (consulté le ).
  15. « Espagne : l’exhumation de Franco bloquée par un moine », sur sudouest.fr, .
  16. « Espagne: Franco sera exhumé d'ici le 25 octobre, annonce le gouvernement », sur lexpress.fr, .
  17. « Espagne : la famille du dictateur Franco demande des honneurs militaires lors de la prochaine inhumation », sur lindependant.fr, .
  18. a et b (es) Juanma Romero, « Últimas horas de Franco en el Valle: la maquinaria está dentro, y el operativo, listo », sur elconfidencial.com, .
  19. « La CEDH rejette une demande de suspension de l'exhumation de Franco », sur bfmtv.com, .
  20. (es) Luis F. Durán, « Suspendidos los permisos para el próximo lunes 21 de octubre a los guardias civiles de los puestos cercanos al Valle de los Caídos », .
  21. (es) « Entra en el Valle de los Caídos la maquinaria para la exhumación de Franco », sur abc.es, .
  22. « Espagne: les restes de Franco seront exhumés jeudi », sur lefigaro.fr, .
  23. « La dépouille du général Franco exhumée après des mois de bataille judiciaire », sur lemonde.fr, .
  24. Raphael Minder, « Spanish Court Approves Franco’s Exhumation », The New York Times,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  25. « Ciudadanos y PP dicen no defender a Franco pero se oponen a su exhumación », sur El Plural (consulté le ).
  26. La familia Franco amenaza con acudir al Tribunal Europeo de Derechos Humanos.
  27. La familia Franco recurrirá al Supremo para frenar el acuerdo de la exhumación. Publicado el 16 de febrero de 2019. Consultado el 17 de febrero de 2019.
  28. Los Franco insisten: «Si no es el Valle, es la Almudena». Publicado el 16 de febrero de 2019. Consultado el 17 de febrero de 2019.
  29. El abogado de la familia Franco: «Si un Gobierno tiene voluntad de reconciliación, tendría que haber pensado en enterrar en el Valle de los Caídos a Manuel Azaña». Publicado el 17 de febrero de 2019. Consultado el 17 de febrero de 2019.
  30. Laura Lorenzo, « El Gobierno prohíbe las concentraciones en Mingorrubio », Onda Cero,‎ (lire en ligne).
  31. « El prior del Valle de los Caídos denuncia a la Delegación Gobierno y a la Guardia Civil por restringir el acceso a la basílica », El Mundo,‎ (lire en ligne).
  32. Juan Carlos Espinosa, « Furia franquista contra los marmolistas que levantarán la losa de Franco », sur El País, .
  33. Ángel N. Lorasque, « Los malditos 15 minutos de la exhumación de Franco que temen las funerarias », sur La Razón, .

Voir aussi