Claude NobsClaude Nobs
Claude Nobs, né le [1] à Montreux dans le canton de Vaud en Suisse et mort le à Lausanne, est un organisateur de spectacle suisse. Il fut le fondateur et directeur du Festival de jazz de Montreux. BiographieEnfance et jeunesseFils d'un père boulanger et d'une mère infirmière qui s'étaient rencontrés à la clinique de Florimont à Lausanne, Claude Nobs grandit à Territet. Contrairement à son frère Jean-Pierre et à sa sœur Sylvia[2], qui étaient des enfants sérieux, disciplinés et studieux à l'école, Claude confessera plus tard qu'il était sauvage et turbulent, qu'il se saoulait volontiers et qu'il accumulait les bêtises[3]. Très jeune, il développe une passion pour la musique en écoutant les 78 tours sans étiquettes que son père achetait alors au poids. À six ans, surnommé par son père « Duke Ellington », il s’amusait à noter les disques qu’il aimait au moyen d’étoiles autocollantes. À en croire ses classements, c’était déjà au jazz qu'allait sa préférence. À 17 ans, alors qu'il rechignait à se lever aux aurores pour les besoins de la boulangerie familiale, son père le somme de se choisir une profession. Claude choisit de devenir cuisinier et commence une formation à l'hôtel Schweizerhof de Bâle. Quelques années plus tard, il obtient le titre honorifique de meilleur apprenti de Suisse. À cette époque, il prend l’habitude d’écouter tous les jours l’émission radiophonique Pour ceux qui aiment le Jazz, animée par Franck Ténot et Daniel Filipacchi sur Europe 1. Cette émission devient pour lui une véritable école de la musique à travers laquelle il apprend à mieux connaître Ray Charles, John Coltrane ou encore Joe Turner. Son apprentissage terminé, il travaille un temps au Centre des congrès de Zurich où, entre la préparation de deux plats, il se faufile discrètement dans les coulisses de la salle de concert pour écouter, par exemple, Duke Ellington, Count Basie ou Ella Fitzgerald, des artistes dont la plupart ne lui étaient pas inconnus grâce aux disques que son père possédait. À l'office du tourisme de MontreuxClaude Nobs regagne ensuite Montreux pour poursuivre sa formation à l'École hôtelière de Lausanne. Désireux d’approfondir ses connaissances dans la finance, il travaille un temps dans une banque et, durant ses loisirs, participe également à la création de la section locale des scouts, la Brigade de Saleuscex. C’est alors que Raymond Jaussi, directeur de l’office du tourisme de Montreux, le remarque et lui propose de rejoindre son équipe au poste de comptable. Raymond, qui décèle immédiatement l’esprit novateur de Nobs, lui confie rapidement l’organisation d’événements pour la ville de Montreux. Claude renoue ainsi avec sa première passion, la musique, en organisant des concerts au sein de l’Association des Jeunes de Montreux dont il est l’un des fondateurs, puis dès 1961 pour le Festival de la Rose d'or. C’est ainsi qu’en 1964, Claude se rend à l’aéroport de Genève au volant de sa vieille voiture pour chercher les artistes de la soirée, un jeune groupe qui se fait appeler The Rolling Stones et qui se produit, ce soir-là, pour la première fois hors de Grande-Bretagne. Une année auparavant, pour l'édition du Festival de la Rose d'or, qui devait avoir lieu du 29 avril au 4 mai 1963, il s'était rendu à Londres pour rencontrer les Beatles et avait proposé à la Télévision suisse romande, qui organisait le Festival, de les faire participer ; la chaîne avait refusé sous prétexte qu'ils n'étaient pas assez connus[4]. Il faut préciser que les Beatles n'ont connu le succès qu'au début d'année 1963, avec la chanson intitulée Please Please Me. Jusque-là, ils n'avaient eu qu'un succès mitigé avec leur premier single, Love Me Do, sorti en 1962. Claude Nobs déclara à ce sujet[3] :
Aussitôt, Claude décide de quitter son poste de comptable au sein de l'office de tourisme pour s'investir entièrement aux différents événements organisés à Montreux et commence donc par voyager en Europe et à l’étranger pour faire la promotion touristique de la région. Comme l'explique le journaliste Arnaud Robert, « Nobs a eu un jour l'audace de penser que [Montreux], cette station touristique déclinante, peu à peu abandonnée par la bourgeoisie britannique qui louait pourtant son microclimat, deviendrait une marque internationale. »[5] En 1965, lors de son premier voyage à New York pour le compte de l’office du tourisme de Montreux, il se présente spontanément aux bureaux d’Atlantic Records, l’adresse figurant sur les disques de son label préféré, et demande à voir les frères Ahmet Ertegün et Nesuhi Ertegün, directeurs du label. N'ayant pas effectué au préalable une demande de rendez-vous, il essuie un refus, mais insistant avec vigueur tout en expliquant qu’il vient de Suisse pour les rencontrer, comme par miracle, cet argument finit par convaincre Nesuhi Ertegün de le recevoir, son père ayant été pendant plusieurs années ambassadeur de Turquie à Berne. Lorsque Claude fait part à Nesuhi Ertegün de son projet de créer un festival de jazz à Montreux, ce dernier se révèle enthousiaste et lui offre son soutien. Aussitôt naît entre les deux hommes une grande complicité, qui ne fera que se renforcer au fil du temps. Cet épisode qui témoigne de l’audace et de la passion de Claude Nobs pour la musique Jazz marque le début d’une belle amitié et d'un moment décisif pour l’histoire du festival de jazz ainsi que pour la ville de Montreux et de ses environs. Les débuts du Festival de JazzClaude Nobs fonde le festival de Jazz de Montreux en 1967 avec le pianiste Géo Voumard et le journaliste René Langel[6]. Conçu comme un concours de jazz télévisé, l'événement dure trois jours. Les années suivantes, Nobs organise de nombreux concerts de jazz et de rock dans la région. Le festival prend peu à peu de l'importance. Fort de la relation de confiance que Nobs a développé avec Ahmet et Nesuhi Ertegün, il occupe pratiquement jusqu'à la fin de sa vie le poste de directeur européen d'Atlantic Records[6]. Ce poste permet à l'homme de faire venir dans la petite ville vaudoise dès les premières éditions les plus grands artistes du moment. Il attache un soin tout particulier à l'accueil des artistes qu'il invite à son chalet et à qui il fait véritablement vivre une expérience artistique et amicale originale. DécèsLe 24 décembre 2012, Claude Nobs est victime d'un grave problème de santé lors d'une sortie en ski de fond près de son domicile. Plongé dans le coma, il meurt, à l'âge de 76 ans, le 10 janvier à Lausanne, où il a été hospitalisé[7]. Mathieu Jaton, alors secrétaire général, est désigné le 15 janvier 2013 pour lui succéder au poste de directeur général du festival[8]. Hommages
Distinctions et prix
Claude Nobs et le Montreux Jazz FestivalEn 1967, Claude Nobs organise la première édition du Festival de jazz de Montreux avec un budget de 10 000 francs. Le festival se déroule alors sur trois jours et connaît immédiatement un grand succès. Deux ans plus tard, Nobs ouvre le festival à la musique rock avec le groupe Ten Years After, suscitant de vives critiques de la part des puristes. En parallèle, il se met à organiser chaque mois des concerts d’artistes tels que Pink Floyd, Chicago ou Santana, faisant ainsi de Montreux un haut lieu de la musique pop. En 1971, il fait venir Aretha Franklin ; une photographie les a immortalisés côte à côte[14]. Cette même année l’incendie du casino durant le concert de Frank Zappa, inspire au groupe Deep Purple le célèbre tube Smoke on the Water et dote Claude Nobs de son surnom de « Funky Claude » qui dans les paroles de la chanson « was running in and out », c'est-à-dire « courait de l'intérieur à l'extérieur pour évacuer les jeunes ». C'est d'ailleurs lui qui aidera le groupe à trouver de nouveaux locaux pour qu'il puisse terminer l'enregistrement de son album Machine Head. En 1973, Nobs est nommé directeur européen des relations artistiques du groupe WEA, regroupant les labels Warner Music Group, Elektra et Atlantic. Cette année-là, il rencontre Miles Davis au Newport Jazz Festival et l’invite à se produire à Montreux. En 1976, il décide de renommer le festival, qui n’est plus uniquement consacré au jazz, « Montreux International Festival ». Ce nouveau nom ne perdure cependant que deux éditions tant le Festival de jazz de Montreux s’est déjà imposé comme une marque auprès du public. Dans les années 1990, le festival s’étend progressivement dans la ville et sur les quais avec de nombreux concerts gratuits et s’ouvre à de nouveaux genres musicaux tels que la musique électronique et le hip-hop. En 1991 ont lieu au Montreux Jazz Festival les premiers enregistrements de concerts en haute définition. Cette année-là, Claude Nobs s’associe avec Quincy Jones qui coproduira le festival à trois reprises en 1991, 1992 et 1993. En 1999, le festival bat tous ses records de fréquentation en franchissant la barre des 220 000 visiteurs. La même année, Claude Nobs développe l’engagement culturel et pédagogique du festival en fondant le concours de piano solo, rapidement reconnu au niveau international. En 2001, Claude Nobs se retire de Warner Music pour se consacrer uniquement au festival. En 2006, à l’occasion des 40 ans de la manifestation, il organise deux concerts exceptionnels en hommage aux frères Ertegün et célèbre également son 70e anniversaire à Los Angeles lors des Grammy Awards[15]. Puis, en 2010, il délègue la direction opérationnelle du festival pour se concentrer sur des projets et concerts spéciaux qui lui tiennent à cœur. Les enregistrements « live » de 1967 à 2012 révèlent l’influence de grands musiciens dans l’évolution du jazz, du blues et du rock, et reflètent l’historique des divers courants stylistiques. En créant le « Montreux Jazz Digital Project » en 2008, Claude Nobs et l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) ont réuni leurs efforts, afin de trouver les financements pour numériser l’ensemble des documents et mettre en valeur cette ressource digitale de premier ordre pour les générations futures. Ce rêve est devenu, dès 2010, une réalité, grâce au soutien de la Manufacture Horlogère Audemars Piguet qui a reconnu dans ce projet, un attachement et des valeurs communes pour la préservation du patrimoine. Claude Nobs a laissé un patrimoine documentaire de portée mondiale pour les générations futures, inscrit en juin 2013 au registre de la Mémoire du Monde de l'UNESCO. Son partenaire, Thierry Amsallem, va continuer à faire vivre son œuvre, en créant la Fondation Claude Nobs afin de préserver et rendre accessible au plus grand nombre cette collection de 5 000 concerts « live » enregistrés en audio et vidéo. « Il s'agit du plus grand témoignage de l'histoire de la musique, qui illustre le jazz, le blues et le rock ». C'est en ces termes que Quincy Jones, a qualifié la collection du Festival de jazz de Montreux. Vie privéeCuisinier amateur, Claude Nobs aimait beaucoup préparer les repas qu'il servait aux musiciens qu'il invitait[16]. Claude Nobs ne cachait pas son homosexualité[17]. Il fut en couple à partir de 1987 et jusqu'à sa mort avec Thierry Amsallem qui crée, après la mort de Claude Nobs, la fondation qui porte son nom pour perpétuer sa mémoire et assurer la valorisation des archives du festival[18]. FilmographieÀ plusieurs reprises, Claude Nobs a produit des vidéos de captation des concerts du festival :
Plusieurs documentaires lui ont été consacrés :
Publications
Fondation Claude NobsCréationEn 2014, Thierry Amsallem crée la Fondation Claude Nobs à la suite du décès de son compagnon de vie Claude Nobs[20]. Thierry Amsallem a confié à la fondation les archives, la signature et le logo de Claude Nobs[21]. But de la fondationLa fondation est active dans les domaines suivants conformément à son objectif :
Organisation et projetsLa Fondation compte au total sept membres au sein de son conseil d'administration. Le Président est Thierry Amsallem, les Vice-Présidents sont Laurent Wehrli et Olivier Gfeller. Les autres membres sont Patrick Aebischer, Olivier Audemars, Joëlle Borgatta et Eric Merk (à partir de 2022). L'héritage du Montreux Jazz Festival a été inscrit au Registre mondial des documents de l'UNESCO en 2013[23]. Thierry Amsallem poursuit la collaboration avec l'École polytechnique fédérale de Lausanne entamée en 2007 pour numériser des fichiers audio et vidéo[24]. Ces copies numériques sont mises gratuitement à la disposition des étudiants pour leurs recherches au Montreux Jazz Café sur le campus de l'EPFL. Amsallem a présenté un certain nombre de stars qui se sont produites à Montreux dans la Maison Blanche du président Barack Obama à l'occasion de son 50e anniversaire. Anniversaire du Montreux Jazz Festival dans le cadre de la Journée Internationale du Jazz 2016[25],[26].
Notes et références
Voir aussiArticle connexeLiens externes
Liens web Fondation Claude Nobs
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