Comme son cousin Mawsonia, Axelrodichthys est un cœlacanthe au crâne allongé, bas et large, dont les os du toit crânien et de la joue sont caractérisés par une forte ornementation[7]. Il diffère de Mawsonia principalement par une région pariétonasale plus allongée, le développement du processus descendant du supratemporal, et par la forme et la disposition des os de la joue et de la mâchoire inférieure. Sur cette dernière, les deux branches postérieures du dentaire sont de longueur similaire chez Axelrodichthys alors que la branche inférieure de la bifurcation est beaucoup plus longue que la supérieure chez Mawsonia. La surface de contact avec l’angulaire est également plus étendue chez Axelrodichthys[8].
Taxonomie
Plusieurs espèces d’Axelrodichthys ont été décrites. La validité de certaines d’entre elles est discutée et d’autres spécimens sont laissés en nomenclature ouverte car représentés par des fossiles trop incomplets pour une détermination spécifique. Le genre comprend les taxons suivants :
Axelrodichthys araripensis est l’espèce type du genre. Elle est aussi l’espèce la mieux connue grâce à la découverte de nombreux spécimens entiers exceptionnellement conservés en trois dimensions dans des nodulescarbonatés[1],[8]. Ces fossiles proviennent de la formation de Crato, daté de l’Aptien, et surtout de la formation de Romualdo (anciennement un membre de la formation de Santana, cette dernière ayant été élevée au rang de groupe), à laquelle est attribué un âge albien mais qui pourrait dater de l’Aptien supérieur[9]. Ces deux formations sont situées dans le bassin d’Araripe au nord-est du Brésil (États de Ceará, Pernambouc et Piauí). Il est possible que cette espèce soit également présente dans la formation de Tlayúa (Albien supérieur) dans l’ État de Puebla au Mexique[3]. Cependant, le spécimen mentionné dans la littérature scientifique n'a jamais été décrit et a malheureusement été perdu par la suite[4].
Axelrodichthys maiseyi provient de la Formation de Codó, datée de l’Albien moyen - supérieur, et située dans le bassin de Grajaú (état de Maranhão) au nord-est du Brésil. L’espèce est nommée d’après John G. Maisey le créateur du genre Axelrodichthys[10]. Toutefois, le statut d’A. maiseyi est discuté par certains auteurs qui doutent de l’interprétation de certaines structures anatomiques et suggèrent de réviser cette espèce[8].
Axelrodichthys megadromos provient de diverses formations géologiques du Crétacé supérieur du sud de la France dont l’âge s’étend du Campanien inférieur au Maastrichtien inférieur. L’espèce est nommée d’après le grecmegas, grand, et dromos, allée, et fait référence à la fois à l’arrivée en Europe de ce taxon originaire du Gondwana, et à la construction d’une nouvelle autoroute à proximité de la localité type[6]. A. megadromos est représenté par un crâne partiel et de nombreux os crâniens isolés provenant de plusieurs sites localisés en Provence (Bouches-du-Rhône et Var) et en Occitanie (Aude et Hérault)[7]. Les spécimens les plus anciens, tels le crâne holotypique découvert à Ventabren dans les Bouches-du-Rhône, datent du Campanien inférieur. Le spécimen le plus récent, provenant de la formation des Marnes Rouges Inférieures dans l’Aude, est daté par la magnétostratigraphie du Maastrichtien inférieur, il y a 71,5 millions d’années[6],[7],[11]. Cette espèce est donc le dernier représentant connu des Mawsoniidae d'eau douce[7] et l’un des derniers cœlacanthes fossiles avec le genre Megalocoelacanthus d’Amérique du Nord d’âge comparable[12],[13] (le cœlacanthe fossile le plus récent étant un mawsoniidé fragmentaire trouvé dans les couches marines du Maastrichtien supérieur du Maroc[14]). La présence d'A. megadromos dans ce qui était l’île Ibéro-Armoricaine durant le Crétacé supérieur est la preuve d’un événement de dispersion du genre Axelrodichthys depuis le Gondwana occidental (Afrique + Amérique du Sud) vers l’archipel européen de cette époque[6],[7].
? Axelrodichthys lavocati, nommé d’après le paléontologue français René Lavocat, provient de sédiments de la fin du Crétacé inférieur (Albien) et/ou du début du Crétacé supérieur (Cénomanien) du Maroc et d’Algérie[15],[16],[5]. Seulement connue par des os isolés, cette espèce fut d’abord attribuée au genre Mawsonia[15],[16] avant d’être reversée dans le genre Axelrodichthys en 2019[8]. Le statut de cette espèce reste toutefois incertain car le matériel regroupé sous le nom lavocati pourrait en fait appartenir à la fois aux genres Mawsonia et Axelrodichthys[17].
Gottfried et des collègues ont attribué à une espèce indéterminée d’Axelrodichthys deux os isolés découverts à Madagascar dans les grès d’Ankazomihaboka d’âge Coniacien-Santonien (89,8 à 83,6 millions d’années)[2]. Le genre serait également présent dans l’Aptien du Niger[2].
Paléoécologie
Les Axelrodichthys ont vécu dans des environnements différents selon les espèces et l’époque. Durant le Crétacé inférieur, l’espèce A. araripensis habitait à la fois les eaux saumâtres et les eaux marines côtières du Gondwana occidental. En effet, la formation de Romualdo, d’où provient essentiellement cette espèce, s’est déposée dans une lagune côtière influencée par des cycles de transgressions et régressions marines et un apport variable en eau douce[9]. À la fin du Crétacé supérieur, l’espèce A. megadromos vivait exclusivement en eau douce (lacs et rivières), sur l’île Ibéro-Armoricaine, une terre émergée constituée d’une grande partie de la France et de la péninsule Ibérique[6],[7],[18]. Tous les sites ayant livré cette espèce ne présentent aucune influence marine. Les spécimens du Campanien inférieur proviennent de dépôts lacustres, et ceux du Campanien supérieur et du Maastrichtien inférieur furent découverts dans des sédiments de rivières et de plaines inondables[19],[6],[7]. Les restes d’Axelrodichthys du Crétacé supérieur du Maroc et de Madagascar proviennent également de sédiments d’eau douce[5],[2]. L’arrivée du genre Axelrodichthys dans les écosystèmes continentaux du sud-ouest de l’Europe s’est probablement effectué à la suite de connexions terrestres ayant permis des liaisons fluviales entre l’Europe et le Gondwana[18].
Le régime alimentaire des mawsoniidés est encore mal connu. Bien que des dents minuscules soient présentes sur le palais et la partie interne de la mandibule, la bouche de ces poissons est essentiellement édentée. Aussi certains auteurs ont supposé qu’ils devaient se nourrir en aspirant leurs proies à la manière du Latimeria actuel. D’autres chercheurs ont proposé un mode d’alimentation par filtration des nutriments[20]. La description en 2018 d’un spécimen articulé d’A. araripensis ayant avalé un poisson entier semble confirmer le mode d’alimentation par aspiration[21].
Une analyse phylogénétique de la famille publiée en 2020 a trouvé une polytomie regroupant les genres crétacés “Lualabaea”, Axelrodichthys, Mawsonia, ainsi que le genre marin du JurassiqueTrachymetopon. “Lualabaea” pourrait être congénérique avec Axelrodichthys[7].
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