L'École de Lyon est au XVIe siècle un groupe de poètes, d'humanistes et de lettrés lyonnais ayant les mêmes inspirations, dont les principaux membres étaient Maurice Scève et ses disciples Louise Labé, Pernette du Guillet, Antoine Héroët, Guillaume Des Autels et Pontus de Tyard[1]. Si ce groupe d'humanistes, nommé également solidarium, pratique surtout la poésie, certains membres n'hésitent pas à travailler d'autres formes littéraires, contes ou récits galants ou populaires. Ce groupe travaille essentiellement la langue française, langue encore en formation et qu'il contribue à former, même si certains riment en latin ou mélangent un peu de francoprovençal[2].
Précédés par plusieurs auteurs de la poésie néo-latine tels Nicolas Bourbon, Gilbert Ducher ou Jean Visagier, ils sont inspirés par le Platonisme (Platon inspire leurs idées mystiques sur l'amour, instrument de connaissance et de sagesse) et par le pétrarquisme (Pétrarque leur donne, par des sonnets, l'exemple d'une poésie à la fois précieuse et passionnée). Certains membres de l'école de Lyon sont également marqués par les idées néoplatoniciennes de Marsile Ficin et l'hermétisme.
Cette école lyonnaise de poésie accepte les femmes de lettres en son sein. Autour de Louise Labé et de Pernette du Guillet, d'autres poétesses fréquentent l'école lyonnaise, parmi les plus connues, Clémence de Bourges[3], Jeanne Gaillard, Marguerite du Bourg, Sibylle Scève et Claudine Scève, cousines ou sœurs de Maurice Scève, et d’autres poétesses dont la réputation de talent, d’esprit et de beauté a gravité autour de celle de Louise Labé et de Pernette du Guillet[4].
Les poètes lyonnais ont la particularité, contrairement à l'habitude qui veut à cette époque de louer dans les œuvres les puissants, de parler d'eux-mêmes et de leurs pairs au sein de leurs poèmes.
Membres
Définir précisément quels sont les membres de l'école lyonnaise de poésie est délicat. En effet, plusieurs personnes qui lui sont traditionnellement rattachées semblent de fait appartenir à d'autres cercles[5]. Cette liste présente de manière large les personnalités qui ont été un jour rattachées à ce cercle littéraire.
Pernette du Guillet, poétesse française née à Lyon vers 1520 et morte le .
Benoît du Troncy
Benoît du Troncy, est un notaire lyonnais qui écrit sous le pseudonyme de Bredin le cocu un texte littéraire comique sous le titre du Formulaire fort récréatif de tous contrats [...], publié en 1594. Il s'amuse avec la langue française, en y mêlant des expressions en patois local[7].
Sybille Scève
Sybille Scève, femme de lettres, fille de Maurice Scève père et de Claude Pacot, et donc sœur de Maurice Scève.
Elle était poète, et son portrait est conservé au château de Versailles porte la dédicace suivante : « Mademoiselle Sibille de Scève, Lyonnaise excellente en l’art poétique et rareté d’esprit »[8].
Elle épousa Girolano Tolomei : Lettres de Claudio Tolomei à Sybille Sève, [9].
Avec sa sœur Claudine, elles étaient « renommées pour leur esprit et leur talent poétique », mais on n'a jamais retrouvé leurs recueils[10]. Quelques vers, écrits par les deux sœurs[11], témoignent de leur talent. On trouve les noms de Claudine et Sibille à plusieurs reprises dans l'étude qu'Albert Baur a consacré à Maurice Scève et à la renaissance lyonnaise[12]. Elles sont également célébrées dans certains poèmes de Clément Marot[13].
Claudine Scève
Claude[Note 1], ou Claudine Scève, femme de lettres, fille de Maurice Scève père et de Claude Pacot, et donc sœur de Maurice Scève.
Elle épouse Mathieu de Vauzelles (frère de Jean de Vauzelles) et ami de Maurice Scève[14],[15],[16].
Elle est la traductrice d'un roman de BoccaceUrbain le mescongneu filz de l'empereur Federic Barberousse (Lyon, Claude Nourry, 1533)[17],[18].
Avec sa sœur Sybille, elles étaient « renommées pour leur esprit et leur talent poétique », mais on n'a jamais retrouvé leurs recueils[10]. Quelques vers, écrits par les deux sœurs[11], témoignent de leur talent. On trouve les noms de Claudine et Sibille à plusieurs reprises dans l'étude qu'Albert Baur a consacré à Maurice Scève et à la renaissance lyonnaise[12]. Elles sont également célébrées dans certains poèmes de Clément Marot[13]. Maurice Scève lui-même, dans Délie object de plus haulte vertu (dizain CCCLXXXV), écrit « Ou lon entent les deux Sœurs resonner »[19].
Personnalités proches
De nombreux poètes et écrivains gravitent plus ou moins longtemps autour du groupe proprement lyonnais, sans qu'ils en fassent réellement partie.
Antoine Héroët, ou Herouet, poète et un ecclésiastique français né vers 1492 et mort vers 1567. Enzo Giudici ne considère cependant pas Héroët parmi le groupe, car il appartient avant tout à l'entourage de Marguerite de Navarre et n'est présent à Lyon que de manière épisodique[5].
Enzo Giudici ne considère cependant pas Pontus de Tyard comme membre de l'école lyonnaise de poésie, car il fait bien davantage partie de la Pléiade[5].
Bibliographie de l’œuvre
Peu de choses sont connues sur l’œuvre de Claudine Scève :
Claudine Scève (Traducteur), Janine Incardona (Éditeur scientifique) et Pascale Mounier (Éditeur scientifique) (trad. de l'italien), Urbain le mescongneu filz de l'empereur Federic Barberousse : version de Da Sabbio-Garanta, traduction de c. 1533 en regard, Genève, Droz, coll. « Cahiers d'humanisme et Renaissance » (no 112), , 334 p., 23 cm (ISBN978-2-600-01610-0, ISSN1422-5581, BNF43649066)
Jeanne Scève, femme de lettres, fille de Maurice Scève père et de Claude Pacot, et donc sœur de Maurice Scève.
Elle épouse G. ou Jean du Choul le chez Jean de Vauzelles[20],[21].
Elle est aussi connue par les Estrennes de Clément Marot : À Jane Seve Lyonnoise[22].
Jeanne Scève pourrait être l'auteure de Les Comptes amoureux par Madame Jeanne Flore, touchant la punition que faict Venus de ceulx qui contemnent [condamnent] et mesprisent le vray amour (paru à Lyon à la fin des années 1530)[Note 2].
Bibliographie de l’œuvre
(Supposément) Jeanne Flore, Comptes amoureux : touchant la punition que faict Venus de ceulx qui contemnent & mesprisent le vray amour (Edition originale), Lyon, Denis de Harsy, ca 1531, LXXXIIII f. : ill. ; in-8° (BNF30443579) Comptes amoureux sur Gallica
Postérité
Si les trois principales figures de ce mouvement : Maurice Scève, Louise Labé et Pernette du Guillet, sont connues et célébrées de leur vivant, elles tombent dans l'oubli dès leur disparition. Ce n'est qu'au XVIIIe siècle que leur renommée refait surface et qu'au XIXe que la critique leur rend à nouveau hommage. Enzo Giudici établit un bilan historiographique de l'école en 1959[23].
Jean Pierre Landry, La vie littéraire, p. 74-77, dans Claude Royon (coord.), Lyon, l'humaniste ; Depuis toujours, ville de foi et de révoltes, Éditions Autrement, 2004, Paris, 230 p., (ISBN2-7467-0534-6)
Évelyne Wilwerth, Visages de la littérature féminine, Bruxelles, P. Mardaga, coll. « Psychologie et sciences humaines » (no 168), , 244 p., couv. ill. ; 22 cm (ISBN2-87009-321-7, ISSN1378-4587, BNF34962134, lire en ligne), p. 46
Évelyne Berriot-Salvadore, Les femmes dans la société française de la Renaissance, Genève, Droz, coll. « Histoire des idées et critique littéraire » (no 285), , 592 p., couv. ill. ; 22 cm (ISSN0073-2397, BNF35308957), p. 358
Enzo Giudici, « L'école poétique lyonnaise du XVIe siècle et sa renommée hors de France », Cahiers d'Histoire, t. IV-4, , p. 307-321
Verdun-Louis Saulnier, Boccace et la nouvelle française de la Renaissance. L'Urbano traduit par Claudine Scève (Urbain le méconnu, 1533), Paris, É. Champion, coll. « Revue de littérature comparée » (no XXI), , 28 cm (ISSN0035-1466, BNF34349098), p. 404-413
Clément Marot et Abel Grenier (Éditeur scientifique), Œuvres complètes de Clément Marot : revues sur les meilleures éditions avec une notice et un glossaire, Paris, Garnier frères, ca 1920, 2 vol. (LI-570 p., 475 p.) ; 19 cm (BNF35772272) Œuvres complètes de Clément Marot sur Internet Archive
Antoine Péricaud et Claude Bréghot Du Lut, Biographie lyonnaise : catalogue des lyonnais dignes de mémoire, Paris, Techener, , IV-336 p., in-8 (BNF31081430) Biographie lyonnaise sur Gallica
Louise Labé et Charles Boy (Éditeur scientifique), Œuvres de Louise Labé, Paris, A. Lemerre, , 2 vol. ; in-16 (BNF31862244), p. 24, t. 2
Notes et références
Notes
↑Il existe, au moins, une lettre adressée À Madame Claude Scève, femme de Monsieur l'Advocat du Roy, A Lyon
↑
« … ont donc été proposées toutes les lettrées lyonnaises connues de la période, Claudine et Jeanne Scève, Jeanne Gaillarde, Marguerite de Bourg, Catherine de Vauzelles… et même une écrivaine du nord de la France, Hélisenne de Crenne » Éliane Viennot, journée d’études sur le thème « émancipation sexuelle ou contrainte des corps ? », Université Paris 7, le 13 juin 2003.
↑Pernette Du Guillet et Elise Rajchenbach (Éditeur scientifique), Rymes : édition critique, Genève, Droz, coll. « Textes littéraires français » (no 583), , 295 p., 1 vol. + musique imprimée, 18 cm (ISBN978-2-600-01063-4, ISSN0257-4063, BNF40241088, lire en ligne), p. 157-159
↑Verdun-Louis Saulnier, Boccace et la nouvelle française de la Renaissance. L'Urbano traduit par Claudine Scève (Urbain le méconnu, 1533), Paris, É. Champion, coll. « Revue de littérature comparée » (no XXI), , 28 cm (ISSN0035-1466, BNF34349098), p. 404-413.