Au-delà des mots
Au-delà des mots
Albums de Alan Stivell Au-delà des mots (En tu-hont d'ar c'homzoù en breton) est le 21e album original d'Alan Stivell et son 17e album studio (quatrième album instrumental), paru le 21 mai 2002 en France et en août en Angleterre, nommé Beyond Words. Il marque les 50 ans de la renaissance de la harpe celtique. Avec ses six harpes différentes et la collaboration de deux musiciens de renom mais avec une grande orchestration, l'œuvre puise sa source au plus ancien à travers la harpe tout en étant tourné vers le futur avec les effets modernes. Conception
— Alan Stivell, 2002, texte accompagnant l'album, p. 3 du livret (traduit en anglais et breton) Au-delà des mots est le quatrième album d'Alan Stivell à la gloire de ses harpes. Ce dernier est porté davantage vers l'impro et une orchestration sous l'influence des sons actuels[2]. Environ la moitié de l'album (La harpe, l'eau, le vent, Goltraidhe...) est construite à partir d'impros très spontanées, en général à la harpe ou aux claviers, suivant les états d'âme de l'artiste, un peu comme les fameux goltraidhe, suantraidhe et geantraidhe (modes anciens qui faisaient pleurer, rêver et rire) des gaéliques harpeurs médiévaux. Enregistré en 2001, cet album éthéré est la recherche d'une qualité sonore vers la modernité, qui s'appuie, néanmoins, sur la rigueur et le respect du passé, Alan Stivell confirmant la pleine maîtrise de son art : « La quête du son, c'est mon obsession. Le titre veut d'ailleurs signifier qu'un texte sera toujours pour moi plus approximatif qu'une note. Ici, j'ai cherché à concilier pureté et innovation, afin d'évoquer, le plus justement possible, la nature, le sensible, le minéral, l'aquatique, l'aérien. Je ne cesserai jamais de rêver à de nouvelles harpes. [...] Pour cet album, j'ai pris le temps d'obtenir des sons évoquant la sanza, la marimba, la contrebasse, la guitare électrique avec distorsion, le clavier... »[3]. La nature des cordes influence énormément le jeu et la sonorité, que ce soit sur une harpe classique, la Telenn Gentañ à cordes de boyaux, une électrique à cordes métalliques, une acoustique à cordes en bronze[4]. Parutions et réceptionEn France, l'album paraît le 21 mai 2002. Après Renaissance de la harpe celtique, cet album est l'aboutissement de ce bouleversement de la musique par l'évolution de cet instrument, qui a, par la même occasion, bouleversé sa vie. Au-delà des mots est sorti en Angleterre en août 2002 sous le titre Beyond words. Il entre dans le « Top albums » France le 20 mai 2002, en 56e position, et il y reste pendant 4 semaines[5]. L'album est remastérisé et réédité en 2007 (distribution Harmonia Mundi). Dès le 6 mai 2002, Alan Stivell présente son album à José Artur dans l'émission Pop-Club sur France Inter[6]. La presse bretonne et spécialiséeLa critique salue l'album, introspectif et créatif, entre tradition, modernité et liberté absolue[7]. En mai, l'hebdomadaire Bretagne Hebdo s'amuse même à titrer : « Alain Ier, duc de Bretonnie » à la suite d'un sondage de popularité auprès de ses lecteurs[8] et Alan Stivell le présente au Pop Club de José Artur, l'une des émissions où tout a commencé. Jean-Luc Germain dans Bretagne Magazine analyse l'œuvre ainsi : « Cela fait trente ans qu'il « dure » ainsi... À chaque revival, Alan Stivell trouve le ton juste, la bonne idée pour se situer « au-delà des mots », titre de son nouvel album, mais surtout au-delà des modes. Poétiques, très inspirées, les quatorze dentelles musicales qui émaillent ce disque doré à l'or fin de la sensibilité, dressent un pont entre la Bretagne profonde et les hautes terres d'Écosse ou d'Irlande. Un album innovant et particulièrement inspiré. »[9]. J-J Boidron dans Trad Magazine, introduit sa chronique par « Retour à la source ! » et conclut par « À ingérer sans modération et en boucle »[10]. Le Télégramme conclut sa chronique le jour de la sortie par : « Doux et envoûtant, il transporte l'auditeur dans une grande variété de paysages celtiques mais aussi parfois africains et orientaux »[11]. Sur AllMusic, l'avis anglais est positif : « Mais en dépit de sa fascination pour l'Antiquité, Stivell est un modernisateur, comme il ressort, par exemple, par les effets de batterie électronique sur Bleimor, le Bagad. L'ambiance, les esthétiques spacieuses, portent Stivell près du domaine de nouvel âge, mais surtout on peut entendre le son naturellement grinçant des instruments à cordes acoustiques et c'est toujours un plaisir. »[1] Tournée anniversaire en EuropePour célébrer les 50 ans de la « Telenn Gentañ », la harpe construite par Georges Cochevelou, « un Stradivarius au son cristallin inégalé », son fils Alan fait construire par le facteur nantais Camac une futuriste « harpe du troisième millénaire » qu'il présente sur scène en 2004[12]. Avec un concept plus intimiste, le Breton préféré des Bretons (Bretagne Hebdo, mai 2002) est accompagné par une nouvelle équipe scénique (un claviériste, un flûtiste et un percussionniste). C'est son premier spectacle où la musique instrumentale occupe tant de place (les deux tiers)[13]. La tournée débute en avant-première par la Nuit celtique 2003 au Stade de France[14] et le conduit à travers l'Europe[15]. Les 19, 20 et 21 mars 2004, il s'arrête dans la salle parisienne de La Cigale[16]. Sous une forme un peu différente, de nouveaux concerts ont lieu de mars jusqu'à l'été 2005 dans les festivals européens (Celtica à Nantes, Belgique, Italie, Espagne, Pays de Galles)[13]. Caractéristiques artistiquesDescription des morceauxLa Harpe, l'eau, le ventMorceau qui s'ouvre sur le bruit des éléments (l'eau, fond sonore similaire à la séquence du « Dor II » de Harpes du Nouvel Âge puis le vent représenté par des sons de synthé), arrière-plan sur lequel la harpe jaillit pour devenir la source musicale principale, avec une superposition d'arpèges « cristallins » et une basse monocorde[17]. Stivell détourne la représentation supposée des éléments essentiels à la vie (la terre, l'eau et le feu) par le triskell[18]. Il rêve d'un monde en liaison avec la nature ; du fait des éléments c'est donc une pensée en mouvement[19] La Celtie et l'Infini (A et B)Thème, d'abord lentement interprété à la harpe, puis au low whistle - par Alan Stivell - et au pib-uilleann par Ronan Le Bars, rejoints par les percussions et accompagnés par un nappe de synthé et divers sons pertinents. Huit minutes d'émotion pour évoquer une Celtie éternelle et marine. Son nouveau prototype de harpe lui permet de moduler le son à loisir, au point de pouvoir obtenir celui d'une distorsion proche d'une guitare électrique[20]. Dihun telenn vMarzhin (« Réveillée, la harpe enchantée »)Morceau qui célèbre le réveil de la harpe celtique, presque cinquante ans après la renaissance offerte par son père Georges Cochevelou. Inauguré par des claviers solennels, Laurent Bourdelas trouve qu'il est « comme transpercé par le son cristallin de la harpe, dans un surgissement qui confine au magique »[21]. La Harpe et l'EnfantComposition limpide et fluide - sans exclure les diverses modulations de sons - en plusieurs mouvements, qui dit un éveil, une joie, un apprentissage, l'acquisition d'une virtuosité, ce qui a été le cas d'Alan Stivell tout petit. Ronan Le Bars l'accompagne en douceur au low whistle, comme David Hopkins aux percussions. Le tout s'inspire aussi d'Eured ar Beg (« Le mariage de la pie ») de l'ethno-musicologue Donatien Laurent[22] Bleimor, le BagadHommage rythmé rendu au bagad Bleimor, dont il utilise un sample tiré de l'album Sonerezh keltiek (1974) qui se baigne en partie dans le flux et le reflux océanique, le tout ponctué par un son très électrique de harpe. Gourin-PontivyStivell s'inspire de son « pays » Vannetais, des villes de Gourin (Poher) et Pontivy (Pourlet) où sont nés ses grands-parents[23], pour réaliser un dialogue mâtiné d'électro entre la harpe et les percussions vigoureuses ; un appel à la danse comme il les affectionne, et un rappel de l'importance de l'enracinement et de l'authenticité. E kreiz BreizhMorceau qui poursuit l'hommage aux lieux aimés (ici les Hauts de Cornouaille) et l'invitation à la danse (percussions assurées par Alan Stivell et David Hopkins). GoltraidheMorceau de harpe mélancolique - « les gammes de la tristesse » est-il indiqué - rejoint par le pib-uillean très nostalgique de Ronan Le Bars ; Alan y joue aussi du low whistle, dont les notes s'entremêlent subtilement à celles de sa harpe. Il s'agit d'exprimer ici à la fois l'émotion ayant fait suite aux attentats du 11 septembre 2001 mais aussi celle du souvenir de la disparition de son père, ravivé par ce disque d'une certaine manière commémoratif (Stivell a traversé aussi à cette époque, sur le plan personnel, un moment déstabilisant)[24]. Et les feuilles repousserontTitre faisant allusion aux paroles de Délivrance : « Et les feuilles repousseront de Bretagne en Espagne / Du Mali au Chili, d'Indochine en Palestine ». La harpe y est à la fois proche et lointaine, disant peut-être le souvenir et la mémoire, peut-être aussi des espoirs déçus, marqués par des ruptures de rythme[24]. Demain matin chez O'CarolanNouvel hommage de Stivell à Turlough O'Carolan, l'un des derniers harpistes professionnels irlandais, via cette slip jig, après lui avoir dédié un morceau - Kervallan - sur Harpes du Nouvel Âge[25]. Harpe Atlantique / La Route de l'étainMorceau qui témoigne à sa manière, avec des silences, ses reprises et ses improvisations, ses percussions même (de Stivell et Hopkins), le chemin mystérieux qui reliait la Bretagne aux rivages de la Méditerranée à l'âge du bronze. Il comprend le thème irlandais de Cooley's Reel, joué avec dextérité à la harpe, surtout connu interprété au violon, qui sera d'ailleurs repris par le groupe italien Rhapsody comme interlude sous le titre Elnor’s Magic Valley sur l'album Rain of a Thousand Flames[26]. La Celtie et l'Infini / La harpe, l'eau, le ventMorceaux qui referment le cercle formé en ouverture, avec tous les musiciens qui jouent de tous les instruments présents sur le disque et toujours le bruit de l'eau pour les relier, en début et fin de morceau[27]. Pochette et disqueLa pochette, une photo de plage/océan/ciel (la plage du Sillon à Saint-Malo) d'Andrée Lebrun, redesignée jusqu'à l'abstraction, illustre les propos du musicien : « La harpe, l’eau, le vent, au-delà des mots, résonance infinie vers l’harmonie »[26]. L'horizon de cet océan onirique s'étend à perte de vue, tout comme les cordes graves de la harpe dite « de cristal », intégrée sur la pochette du CD, qui se prolongent jusqu'en bas. Dans le livret, le harpeur remercie en particulier Marie-José, sa « femme-fleur merveilleuse » pour son aide, et il contient des clichés d'Alan Stivell à la harpe et de deux de ses instruments. Fiche techniqueListe des morceaux
CréditsMusiques : Alan Stivell, sauf :
Équipe artistique
Équipe technique
Notes et références
Voir aussiBibliographie
Articles connexesLiens externes
|