En 1974, après la chute de la dictature et la révolution des Œillets, les anarchistes ont pratiquement disparus. Ce qui n'empêche pas la presse, pendant « l’été chaud » de 1975, de parler beaucoup « d’anarcho-populisme », reliquat de l’esprit du Mai 68 français[1].
En 1886 à Lisbonne, Antero de Quental forme, avec Eça de Queiros, Guerra Junqueiro et Ramalho Ortigão, le Cenáculo, un groupe d’intellectuels anarchistes en révolte contre les conventions politiques, sociales et intellectuelles de leur temps. Il sera plus tard l’un des fondateurs du Parti Socialiste portugais.
Les premiers groupes anarchistes apparaissent au milieu des années 1880[1]. S'ouvre alors une période d'intense activité éditoriale : plusieurs dizaines de périodiques anarchistes sont édités dans tout le pays.
Sous l'influence de Élisée Reclus et de Pierre Kropotkine, le communisme libertaire apparait à Lisbonne et Porto vers les années 1886-1887, avec la parution de quelques périodiques libertaires et la constitution des premiers groupes de propagandistes[2].
Parallèlement au syndicalisme se développe la propagande par le fait soutenue notamment par le
journaliste José do Vale, éditeur des journaux O Petardo et La Dinamite. Le « geste exemplaire » est pratiquement quotidien et apparait, en quelque sorte, comme un complément à « l'action légale », lorsque celle-ci a épuisé ses possibilités. Une vague d'attentats individuels vise des journalistes (Manuel Pinheiro Chagas en pour avoir manqué de respect à Louise Michel), des patrons, des représentants de l'État ou de la magistrature tel le juge Barros en 1896[2].
Face au spectre de la « terreur révolutionnaire », l'État adopte en 1896 - à l'instar des Lois scélérates françaises - une loi spéciale contre les menées anarchistes[3]. Cette loi reproduit au Portugal les politiques répressives d'autres pays qui visent les anarchistes et le mouvement ouvrier, aboutit à la conférence anti-anarchiste à Rome en 1898[4].
Ce nouvel instrument juridique permet désormais l'arrestation de quiconque « soutient, défend ou incite, oralement ou par écrit, une action subversive [...] ou professe des doctrines anarchistes ». La presse se voit formellement interdire de faire écho aux activités, aux enquêtes de police et aux procédures concernant des anarchiste.
Grâce à ces méthodes expéditives, les tribunaux expulsent pour la Guinée-Bissau, le Mozambique et surtout pour Timor, des « centaines de travailleurs dangereux ou suspects ».
La Confederação Geral do Trabalho
L'État portugais légalise les syndicats en 1891.
Sous l’influence du syndicalisme révolutionnaire, les structures ouvrières se développent très rapidement à partir de 1909[1].
Les principes fondamentaux et les objectifs de la CGT, adoptés lors de ce congrès sont : la libre fédération autonome des travailleurs ; l'action directe - en dehors de toute influence politique ou religieuse - en vue d'éliminer le salariat ; la collectivisation des moyens de production ; l'internationalisme de la solidarité ouvrière et l'élimination du capitalisme.
Jusqu'en qu'à la fin des années 1930, l'anarcho-syndicalisme est majoritaire dans le mouvement ouvrier. Ce n’est qu'à la suite de la prise du pouvoir des bolcheviks en Russie, et de la soumission des organisations ouvrières au Parti communiste local, que cette influence est marginalisée[1].
La Fédération Anarchiste Ibérique
Quelques jours avant le coup d'état du 28 mai 1926, à l'initiative notamment de Manuel Joaquim de Sousa[6], la Fédération Anarchiste Ibérique (FAI) est fondée - en France (Marseille, ) - lors du deuxième Congrès de la Fédération des groupes anarchistes de langue espagnole[9]. Influencé par l'exemple de la Fédération ouvrière régionale argentine, l'objectif est de renforcer le caractère anarchiste de la Confédération nationale du travail et de la Confédération générale du travail portugaise en créant des comités mixtes associant des membres de la FAI et des syndicalistes afin d'éloigner le syndicat de l'influence des groupes politiques républicains[10]. Le terme ibérique se réfère à sa volonté d'unifier le mouvement anarchiste portugais et espagnol dans une organisation pan-ibérique. Vu l'instabilité politique en Espagne, son siège est fixé à Lisbonne.
La dictature militaire, l’Estado Novo et la répression
En 1933, sous l'impulsion du futur dictateur António de Oliveira Salazar, une nouvelle constitution est proclamée, l’Estado Novo. Dans le nouveau régime, autoritaire et à parti unique, les grèves sont déclarées illégales. Les syndicats ouvriers et patronaux passent sous contrôle de l'État. C'est l'heure de la répression.
Dès le coup d'État du , la CGT et son journal A Batalha sont interdits. De nombreux militants anarcho-syndicalistes, sont arrêtés et incarcérés.
Le , un groupe d'anarchistes dont Emídio Santana(pt), tentent d'assassiner Salazar alors que celui-ci se rend à la messe[12]. Le dictateur échappe de peu à l'attentat. Emídio Santana(pt), recherché par la Polícia internacional e de defesa do estado (PIDE) et s'enfuit au Royaume-Uni, où il est arrêté par la police anglaise et extrader vers le Portugal. Il est condamné à 8 ans de prison et 12 ans de déportation. Il ne sera libéré que le .
La répression qui suit cette tentative d'attentat est telle qu'il n'y a pratiquement plus de mouvement réel à partir de cette époque. C'est le parti communiste portugais qui va se développer et qui, avec le soutien de l'Union soviétique, devient la principale force d'opposition au régime dictatorial.
Époque contemporaine
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Manifeste de la Fédération anarchiste communiste du Portugal, , [lire en ligne].
Presse libertaire
Fondé le , A Batalha(pt), est un journal quotidien, porte-voix de la CGT. Dans les années 1920, c'est le troisième titre de presse en termes de diffusion. Pendant la Première République, il est régulièrement suspendu et son imprimerie de la Calçada do Combro, à Lisbonne, attaquée par la police. À la suite du coup d'État du , la CGT et le journal sont interdits. Le dernier numéro sort le , lorsque ses installations sont définitivement détruites par la police. Après le , un groupe de vieux militants anarcho-syndicalistes reprend la publication avec la mention A Batalha - Jornal Anarquista[14].
Le magazine Renovação est publié à Lisbonne entre le et le . Sous-titré Bihebdomadaire Magazine d'Art, Littérature et Nouvelles, la publication appartient au quotidien A Batalha, très proche des idéaux anarchistes, défendant le syndicalisme révolutionnaire prôné à l'époque par la Confédération générale du travail (CGT). Beaucoup de ses collaborateurs étaient également des collaborateurs de Batalha[15].
Aurora, Revue mensuelle de sociologie, science et art publie quatorze numéros entre et , sous la dictature militaire[16]. Ce magazine d'idéologie anarchiste, publié dans la ville de Porto, sous la responsabilité des groupes A Comuna et Propaganda Libertária (groupe né en 1904 et existant jusqu'en 1925) est fermé par la Polícia internacional e de defesa do estado (PIDE) en [17].
D’ à , des militants liés à l'Organisation révolutionnaire anarchiste (France) publient un mensuel rédigé en portugais, « Portugal libertário », destiné aux immigrés portugaiss en France. La révolution des Œillets entraîne l’interruption du titre[18],[19].
La revue A Ideia (1975-1991), publication trimestrielle sous-titrée « Organe anarchiste portugais » est éditée par le groupe Os Iguais (Les égaux)[20],[21],[22].
Fondée en avril 1995, Revista Utopia est un magazine anarchiste de culture et d'intervention qui revendique l'héritage historique du mouvement libertaire tout en réinterprétant l'anarchisme à la lumière du temps présent. Publié régulièrement en version papier jusqu'en 2009, il reparait sous forme numérique en 2012[réf. nécessaire].
En parallèle à la publication du journal quotidien, la Secção Editorial d’A Batalha édite une collection de romans populaires sous l'intitulé A novela vermelha. Douze titres sont publiés à Lisbonne en 1921-1922. Chaque ouvrage est vendu au prix unique de 25 cents[23].
Associations libertaires
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Carlos Da Fonseca, Introduction à l'histoire du mouvement libertaire au Portugal suivi de Caractéristiques de l'activité fouriériste dans la péninsule ibérique, Éditions ArqOperaria / Vosstanie, 2017, [lire en ligne].
José Pacheco Pereira, L'historiographie Ouvrière Au Portugal, Le Mouvement Social, 123, 1983, p. 99–108, [lire en ligne], [lire en ligne].
Anarchisme et naturisme au Portugal, dans les années 1920, [lire en ligne].
João Freire, Panorama des mouvements sociaux : le Portugal, XIXe, XXe siècles, Variations, 20|2017, [lire en ligne].
Ana Cristina Clímaco Pereira, L'exil politique portugais en France et en Espagne, 1927-1940, Thèse de doctorat en Histoire sous la direction de Andrée Bachoud, Université Paris-Diderot, 1998, résumé en ligne.
F. Avila, C. Ferreira, B. Lory, C. Orsoni, Charles Reeve, Portugal, L'Autre Combat. Classes et Conflits dans la Société, Paris, Spartacus, 1975, [lire en ligne].
En portugais
Luís Bigotte Chorão, Para uma História da Repressão do Anarquismo em Portugal no Século XIX suivi de A Questão Anarchista de Bernardo Lucas, Letra Livre, 2015[23].
Edgar Rodrigues, História do Movimento Anarquista em Portugal, Universo Ácrata, Editora Insular Florianópolis, 1999, [lire en ligne].
História do Movimento Libertário, textes disponibles sur le Portail Anarquista.
A Batalha
(pt) Carlos Bobone, Repressão da Imprensa “Operária”, sur le site centenariodarepublica.org, (s/d), [lire en ligne].
↑ abcde et fJoão Freire, « Panorama des mouvements sociaux : le Portugal, XIXe, XXe siècles. », Variations, 20|2017, lire en ligne.
↑ a et bCarlos Da Fonseca, Introduction à l'histoire du mouvement libertaire au Portugal suivi de Caractéristiques de l'activité fouriériste dans la péninsule ibérique, Éditions ArqOperaria / Vosstanie, 2017, [lire en ligne].
↑(pt) « Lei contra os anarquistas », Centro de Estudos do Pensamento Político, 13 février 1896.
↑(pt) Luís Bigotte Chorão, Para uma História da Repressão do Anarquismo em Portugal no Século XIX suivi de A Questão Anarchista de Bernardo Lucas, Letra Livre, 2015.
↑(pt) « Criação da Confederação Geral do Trabalho. No II Congresso Operário Nacional realizado em Coimbra, constitui-se a Confederação Geral do Trabalho. Segue-se o modelo da CGT francesa, por inspiração de Emílio Costa », Centro de Estudos do Pensamento Político, 18 septembre 1919.
↑(pt) Alexandre Samis, Minha Pátria é o Mundo Inteiro. Neno Vasco, o Anarquismo e o Sindicalismo Revolucionário em Dois Mundos, Lisboa, Letra Livre, 2009.
↑(pt) « No Congresso Revolucionário Sindicalista de Berlim, de 1922-1923, cria-se a Associação Internacional dos Trabalhadores, com sindicatos italianos, argentinos e alemão, participando a Confederação Geral do Trabalho portuguesa e a que no ano seguinte adere a congénere espanhola », Centro de Estudos do Pensamento Político, Anarco-Sindicalismo.
↑(pt) « Na sequência das prisões que acompanharam e sucederam ao movimento do 18 de Janeiro de 1934, foram presos muitos militantes confederais. Na imagem encontramos um grupo de militantes presos no forte de Peniche. Sentado ao centro, encontra-se "Manuel Joaquim de Sousa. À sua esquerda, José Francisco; à direita, António Inácio Martins. De pé, da esquerda para a direita: José António Machado, José Vaz Rodrigues e José Meste Vargas Júnior, este morto na Guerra Civil de Espanha". », Inconnu, Arquivo Histórico-Social, « Militantes cegetistas presos em Peniche », sur mosca-servidor.xdi.uevora.pt, 1934 ou 1935.
↑(pt) « Atentado bombista falhado contra Salazar na Avenida Barbosa du Bocage em Lisboa, organizado pelo anarco-sindicalista Emídio Santana, com o apoio da Legião Vermelha. », Centro de Estudos do Pensamento Político, 4 juillet 1937.
↑Le site du Centro de Cultura Libertária, espaço anarquista em Almada.
↑(pt) Jacinto Baptista, Surgindo Vem ao Longe a Nova Aurora… Para a História do diário sindicalista A Batalha 1919-1927. Livraria Bertrand, Lisboa, 1977.
↑(pt) João Freire (espólio), 1978-1986, Arquivo Histórico-Social / Projecto MOSCA, [lire en ligne].
↑Catalogue collectif de France, « Version réduite, simplifiée et mise à jour d'une thèse de doctorat, présentée en 1988 à l'ISCTE, Université technique de Lisbonne. Bibliogr. p. 333-334 », [lire en ligne].